Agnès Pannier-Runacher : « pompier de service » ou championne de la réindustrialisation ?
La réindustrialisation, ils l’ont tous à la bouche et elle semble s’imposer comme un thème central de la campagne présidentielle. Alors que l’année 2021 a vu deux fois plus d’usines ouvrir que fermer et que la ministre de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, se présente bien volontiers comme la « ministre des solutions », la réindustrialisation est-elle vraiment en marche ? Dans « Un Monde en Docs », Rebecca Fitoussi et ses invités ouvrent le débat.

Agnès Pannier-Runacher : « pompier de service » ou championne de la réindustrialisation ?

La réindustrialisation, ils l’ont tous à la bouche et elle semble s’imposer comme un thème central de la campagne présidentielle. Alors que l’année 2021 a vu deux fois plus d’usines ouvrir que fermer et que la ministre de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, se présente bien volontiers comme la « ministre des solutions », la réindustrialisation est-elle vraiment en marche ? Dans « Un Monde en Docs », Rebecca Fitoussi et ses invités ouvrent le débat.
Public Sénat

Par Aurélien Tillier

Temps de lecture :

4 min

Publié le

La crise sanitaire liée au covid-19 a fait prendre conscience à l’ensemble de la classe politique qu’il était nécessaire de réindustrialiser la France, dont la part des activités industrielles n’a cessé de diminuer, notamment depuis vingt ans. Mais quel bilan pour le quinquennat d’Emmanuel Macron et comment se faire entendre face aux grands industriels ?

« Il faut arrêter de se flageller »

Pour Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l’Industrie, le gouvernement n’a pas à rougir de ses résultats : « 90 % des entreprises en difficulté ont une solution à la sortie et 75 % des emplois sont sauvés, grâce à l’intervention de l’Etat ». Elle cite par exemple l’usine pharmaceutique Famar (Rhône) et l’aciérie Ascoval (Nord), épargnées de la cessation d’activité et de la délocalisation. Agnès Pannier-Runacher salue également le travail de réindustrialisation et de compétitivité mené depuis trois ans par son ministère. « Il faut arrêter de se flageller en disant que parce qu’on produit en France, ça coûte plus cher », affirme-t-elle. « Aujourd’hui les industriels qui produisent en France sont compétitifs et arrivent à vendre leurs marchandises à l’international ».

Un bilan en demi-teinte ?

Toutefois, le bilan défendu par Agnès Pannier-Runacher ne trouve pas complètement grâce aux yeux du sénateur de Meurthe-et-Moselle Jean-François Husson (LR), pour qui la ministre semble plutôt jouer le rôle du « pompier de service » et dont l’action révèle surtout « le défaut d’une politique industrielle bien pensée ». Selon le sénateur, la réindustrialisation ne peut passer que par une collaboration de divers acteurs : l’Etat et les entreprises, mais aussi les collectivités locales et les syndicats. L’usine Toyota implantée à Valenciennes (Nord) en 1997 sous l’égide du député-maire Jean-Louis Borloo et du président de la CFDT, Jacques Chérèque, est pour lui un bon exemple de l’efficacité d’une stratégie à la fois volontariste et libérale.

Reprendre la main

Mais l’Etat est-il aujourd’hui assez puissant pour imposer quoi que ce soit aux grands groupes industriels ? Comment reprendre la main sans changer de modèle ? Pour la ministre de l’Industrie, une relocalisation généralisée est impossible, puisqu’elle impliquerait de relocaliser toutes les étapes des chaînes de production. Les nationalisations temporaires, quant à elles, ne sont pas efficaces tant qu’il n’y a pas de clients et de demande. Il s’agit donc de défendre nos avantages compétitifs et d’en finir avec cette culture « schizophrène ». « Les mêmes qui veulent plus de pouvoir d’achat, ce que permettent les importations à très bas coût, disent qu’il faut acheter français », déplore la ministre, qui en appelle donc à la responsabilité des consommateurs et de la puissance publique pour privilégier les produits industriels français.

Penser l’industrie de demain

Un autre dossier de taille pour la ministre est de concilier transition industrielle et écologique. Ainsi, pour préparer la fin des moteurs thermiques, fixée par l’Europe pour 2025, sans perdre d’emplois, « l’Etat est en train de réindustrialiser une filière de batterie électrique, avec la vallée européenne de la batterie entre le Pas-de-Calais et le Nord ». L’innovation doit aussi jouer un rôle majeur, c’est pourquoi elle est au cœur du projet France 2030 présenté par Emmanuel Macron en octobre dernier. Pour ce dossier-là, l’alerte est lancée. Reste à voir si elle empêchera l’incendie.

Revoir l’émission sur notre espace replay

Partager cet article

Dans la même thématique

Photo Cazeneuve
11min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015, le récit de Bernard Cazeneuve : « Très vite, on a conscience que nous sommes confrontés à une attaque de grande ampleur »

ENTRETIEN - Dix ans après les attentats de Paris et de Seine-Saint-Denis, qui ont coûté la vie à 130 personnes, l'ancien ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, revient auprès de Public Sénat sur cette nuit de terreur, et la gestion de crise aux côtés du Président de la République et du Premier ministre.

Le

Agnès Pannier-Runacher : « pompier de service » ou championne de la réindustrialisation ?
3min

Politique

« Il n’y a aucune délinquance dans les écoles de musique », affirme le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus

Il est sans conteste le maestro français le plus célèbre de sa génération. A 92 ans, Jean-Claude Casadesus continue de remplir les plus belles salles du monde sans jamais renier son attachement à la région du Nord. Lui qui a créé puis dirigé l’orchestre national de Lille, s’est engagé toute sa vie pour rendre la musique classique accessible à tous. Invitée de Rebecca Fitoussi dans Un monde, Un regard, Il revient sur son immense carrière marquée par la passion et le partage.

Le

Paris: Senate pension debat
6min

Politique

Retraites : la gauche du Sénat désunie sur la suspension de la réforme

A partir du 19 novembre, le Sénat examinera en séance publique le projet de loi de financement de la Sécurité sociale et sa mesure phare : la suspension de la réforme des retraites. Une concession du gouvernement faite au PS qui n’a aucune chance d’être adoptée à la haute assemblée à majorité de droite. Les socialistes ne devraient également ne pas être suivis par les communistes et écologistes sur le vote de cette mesure.

Le

Photo horizontale Hollande
11min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015 : « Je vois des victimes qui sortent du Bataclan, le regard hagard… », se remémore François Hollande

ENTRETIEN – Dix ans après les attentats du 13 novembre 2015, l'ancien président de la République revient auprès de Public Sénat sur le déroulé des attaques terroristes de Seine-Saint-Denis et de Paris. Il détaille la gestion de la crise et les décisions prises cette nuit-là, mais analyse aussi l'évolution du pays face à cette épreuve.

Le