Ambition artistique ou politique, Ruffin nourrit les spéculations
Le député François Ruffin, dont le film sur les "gilets jaunes" est sorti mercredi, mêle les démarches artistique et politique pour être le...

Ambition artistique ou politique, Ruffin nourrit les spéculations

Le député François Ruffin, dont le film sur les "gilets jaunes" est sorti mercredi, mêle les démarches artistique et politique pour être le...
Public Sénat

Par Baptiste BECQUART

Temps de lecture :

2 min

Publié le

Mis à jour le

Le député François Ruffin, dont le film sur les "gilets jaunes" est sorti mercredi, mêle les démarches artistique et politique pour être le porte-voix de la contestation, nourrissant les spéculations sur ses véritables ambitions.

La méthode d'électron libre du fondateur du journal Fakir, élu député en 2017 avant de prendre place au sein du groupe La France insoumise, s'est manifestée de façon spectaculaire au cours des derniers mois, avec la sortie de son documentaire "J'veux du soleil" réalisé avec Gilles Perret et d'un livre.

L'ouvrage, "Ce pays que tu ne connais pas" (Les Arènes), pamphlet contre Emmanuel Macron, a nourri à sa sortie en février les spéculations sur les véritables objectifs du "député-reporter". D'abord parce qu'il s'y confronte d'égal à égal avec le chef de l'Etat, qui a grandi à Amiens comme lui.

Mais aussi parce qu'il s'y interroge sur son destin politique. L'élection présidentielle, écrit-il, "pervertit tout. Et je le sens jusqu'en moi-même: ça vous effleure, grossit en vous comme une tumeur, ce +Pourquoi pas moi ?+ Les médias, les sondages, les collègues vous farcissent d'une ambition qui n'est pas la vôtre".

François Ruffin et Gilles Perret lors d'une présentation publique de leur film
François Ruffin et Gilles Perret lors d'une présentation publique de leur film "J'veux du soleil", le 2 mars 2019 à Marseille
AFP/Archives

Le réalisateur Gilles Perret, qui a aussi filmé Jean-Luc Mélenchon dans "L'Insoumis" (2017), assure à l'AFP que le Picard de 43 ans a d'abord "besoin d'être reconnu par son écriture, par son travail pour rendre beaux" les "gilets jaunes" ; "il a une sincère affection pour les milieux populaires, les gens le sentent".

- "Vieux outils" -

Mais le microcosme politique le scrute avec attention, en premier lieu les Insoumis. "D'un côté il semble hésiter, de l'autre il agit de manière très méthodique. Et il faut bien constater qu'il se passe quelque chose", observe un cadre insoumis historique, qui grince: "Le premier grand meeting de la campagne de LFI pour les Européennes se déroulait à Caen devant 800 personnes, le lendemain Ruffin en réunissait plusieurs milliers au milieu des champs".

François Ruffin et Jean-Luc Mélenchon à l'Assemblée nationale, le 5 février 2019
François Ruffin et Jean-Luc Mélenchon à l'Assemblée nationale, le 5 février 2019
AFP

"En Mélenchonie, Ruffin compte comme une province autonome", s'amuse un autre cadre. "Il suit sa propre trajectoire, qui le conduit très probablement à une candidature à la présidentielle" en 2022 ou 2027, juge-t-il.

Manuel Bompard, directeur des campagnes de LFI, voit de la "complémentarité" plutôt que de la "concurrence" avec Jean-Luc Mélenchon: "François ne manœuvre pas, il a des instincts avec son bouquin, son film... Dans les salles beaucoup de gens vont voter pour nous".

"Leurs relations sont très bonnes, Ruffin fait partie des quelques personnes que Jean-Luc voit chaque semaine" seul à seul, rapporte un proche de M. Mélenchon.

Le député de la Somme a lui-même raconté au Figaro, début mars, que "l'un de ceux qui (l)'encouragent à ne pas fermer la porte de la présidentielle, c'est justement Jean-Luc Mélenchon". "Il me dit: +Si un jour le drapeau est à terre et que c'est toi qui dois le relever, tu le feras et tu le porteras+", a-t-il ajouté.

En revanche, avance un poids lourd de la galaxie insoumise, "François Ruffin n'est pas un danger pour Mélenchon si celui-ci décide d'aller à la présidentielle. Ça ne s'improvise pas, il faut de l'expérience, de la détermination. Mélenchon reste de très loin le meilleur et la référence" de LFI.

Mais au-delà de LFI? François Ruffin semble plus compatible avec les communistes, qui l'ont soutenu aux législatives de 2017, malgré la rupture avec Jean-Luc Mélenchon après des années de Front de gauche, souligne un responsable du PCF: "Quand il a organisé sa +Fête à Macron+ (mai 2018), il appelait tout le monde à manifester tandis que l'autre s'enfermait dans son bus à impériale avec sa garde rapprochée".

"Pour l'instant, on se dit que Ruffin ferait un bon candidat de gauche radicale, mais qu'il ne serait pas majoritaire. Va-t-il pouvoir dépasser son personnage pour capter l'âme de ce pays?", s'interroge un cadre historique insoumis.

Le député LFI Alexis Corbière, fidèle de M. Mélenchon, déclarait en février: "Avant de jeter les vieux outils qui fonctionnent, encore faut-il s'assurer que nous ayons des outils neufs qui soient aussi efficaces que les précédents".

Partager cet article

Dans la même thématique

Ambition artistique ou politique, Ruffin nourrit les spéculations
3min

Politique

« C'est 50.000 euros de manque à gagner » : un an après les Jeux, ce para-sportif dénonce le départ de ses sponsors

Un an après, quel est l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques ? Inclusion, transports, infrastructures, sponsors… pour Sofyane Mehiaoui, joueur de basket fauteuil qui a représenté la France, si l’accès à la nouvelle Adidas Arena porte de Clignancourt à Paris est un vrai bénéfice, le départ de ses sponsors révèle le manque d’engagement durable des marques auprès de parasportifs. Il témoigne dans l'émission Dialogue Citoyen, présenté par Quentin Calmet.

Le

Ambition artistique ou politique, Ruffin nourrit les spéculations
6min

Politique

Agences de l’État, qui veut gagner des milliards ? 

La ministre des Comptes publics propose de supprimer un tiers des agences de l'État pour faire deux à trois milliards d’économies. Seulement, pour en rayer de la liste, encore faudrait-il savoir combien il en existe…Une commission d'enquête sur les missions des agences de l’État s’est plongée dans cette grande nébuleuse administrative. ARS, France Travail, OFB, CNRS, ADEME, ANCT, des agences, il y en a pour tous et partout ! Mais “faire du ménage” dans ce paysage bureaucratique touffu rapportera-t-il vraiment les milliards annoncés par le gouvernement et tant espérés par la droite ? Immersion dans les coulisses de nos politiques publiques…

Le

President Emmanuel Macron Visits the 55th Paris Air Show at Le Bourget
7min

Politique

Budget 2026 : « Emmanuel Macron a une influence, mais ce n’est pas le Président qui tient la plume »

Le chef de l’Etat reçoit lundi plusieurs ministres pour parler du budget. « Il est normal qu’il y ait un échange eu égard à l’effort de réarmement qui est nécessaire », explique l’entourage d’Emmanuel Macron. « Il laisse le gouvernement décider », souligne le macroniste François Patriat, mais le Président rappelle aussi « les principes » auxquels il tient.

Le

Bruno Retailleau public meeting at Docks 40 in Lyon.
5min

Politique

Tribune de LR sur les énergies renouvelables : « La droite essaye de construire son discours sur l’écologie dans une réaffirmation du clivage gauche/ droite »

Après la publication d’une tribune sur le financement des énergies renouvelables, le parti de Bruno Retailleau s’est retrouvé sous le feu des critiques. Pourtant, en produisant un discours sur l’opposition aux normes écologiques, LR semble revitaliser le clivage entre la gauche et la droite.

Le