Au procès de la perquisition mouvementée à LFI, Mélenchon revendique son “insoumission”

Au procès de la perquisition mouvementée à LFI, Mélenchon revendique son “insoumission”

"Accuser un insoumis de délit de rébellion, c'est une forme de pléonasme", a lancé jeudi à la barre Jean-Luc Mélenchon, au premier jour de son...
Public Sénat

Par Wafaa ESSALHI, Baptiste BECQUART

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"Accuser un insoumis de délit de rébellion, c'est une forme de pléonasme", a lancé jeudi à la barre Jean-Luc Mélenchon, au premier jour de son procès à Bobigny avec cinq de ses proches, pour rébellion et actes d'intimidation lors de la perquisition mouvementée au siège de LFI en octobre.

Le procès, prévu sur deux jours, s'est ouvert dans un climat électrique, alimenté par les attaques répétées du leader Insoumis contre la justice. Au président qui lui demandait s'il acceptait de comparaître, M. Mélenchon a répondu : "Je crois pas que j'aie le choix, mais oui".

Jean-Luc Mélenchon est poursuivi pour "actes d'intimidation envers un magistrat et un dépositaire de l'autorité publique, rébellion et provocation". Il encourt jusqu'à 10 ans de prison, une amende de 150.000 euros et 5 ans d'inéligibilité. Comparaissent aussi les députés Bastien Lachaud et Alexis Corbière, le député européen Manuel Bompard, le président de l'association "L'ère du peuple" Bernard Pignerol et l'attachée de presse de LFI.

Le chef de file de LFI a été le premier à être interrogé. Ce 16 octobre 2018, "la journée a commencé dans une ambiance de confusion, de sidération", avec la perquisition chez plusieurs militants insoumis, s'est justifié M. Mélenchon, quand le président du tribunal Benoît Descoubes a souligné que la matérialité de ce que lui est reproché était établie.

Jean-Luc Melenchon à sa sortie du tribunal correctionnel de Bobigny (Seine-Saint-Denis) le 19 septembre 2019
Jean-Luc Melenchon à sa sortie du tribunal correctionnel de Bobigny (Seine-Saint-Denis) le 19 septembre 2019
AFP

Le député a déclaré éprouver "un sentiment d'humiliation" : "Ce sont mes locaux, je n'ai jamais prétendu être au-dessus des lois".

Il a rappelé avoir eu peur que le fichier des 500.000 inscrits sur la plateforme LFI soit saisi. Il a alors invoqué "la responsabilité morale vis-à-vis de ceux qui ont donné leur nom et adresse pour soutenir (sa) campagne présidentielle".

Et il s'est dit à nouveau victime d'un "procès politique" : "Je ne parle pas de complot, mais d'effet de système".

Dans un face à face tantôt tendu, tantôt comique, le leader LFI s'est trouvé ensuite sous le feu des questions de Me Éric Dupond-Moretti, l'un des avocats des parties civiles. "C'est une technique classique, de couper petit morceau par petit morceau les questions. Allez droit au but, soyez offensif !" lui a conseillé M. Mélenchon, déclenchant le rire dans la salle.

Visiblement agacé par la longueur des réponses du leader des Insoumis, qui a plusieurs fois expliqué que sa réaction à la perquisition était avant tout celle d'un militant revendiquant son insoumission, Me Dupond-Moretti a ironisé : "Ici, on est dans une enceinte judiciaire, pas devant le tribunal, avec des pancartes!" Une référence aux dizaines de militants insoumis qui s'étaient postés dès le matin devant le tribunal pour soutenir les prévenus.

"Vous n'avez pas tous les droits en tant que personne publique", a renchéri l'un des deux représentants du ministère public. "Moi petit procureur, comment voulez que je justifie votre outrage?", s'est interrogée la vice-procureur Juliette Gest.

- "Mon niveau de décibels" -

Arrivée de Jean-Luc Mélenchon et ses coprévenus le 19 septembre 2019 au tribunal de Bobigny
Arrivée de Jean-Luc Mélenchon et ses coprévenus le 19 septembre 2019 au tribunal de Bobigny
AFP

A l'un des policiers qui s'est porté partie civile, M. Mélenchon dit "regrette(r) profondément de vous avoir perturbé par mon niveau de décibels, au point d'avoir provoqué sept jours d'ITT".

De son côté, le député Alexis Corbière a dit assumer "indiscutablement" avoir haussé le ton contre un policier lors de la perquisition. "Cette manière de monter le ton peut être apaisante", a-t-il affirmé.

L'audience s'est achevée peu avant 23h00 avec la parole donnée aux parties civiles.

"Je suis marqué par cet événement", a déclaré l'un des policiers qui a tenté de maîtriser au sol deux militants LFI tandis qu'un autre a reproché à M. Mélenchon de lui avoir dit "à tort" d'"être un militant d'extrême droite".

La matinée d'audience avait été consacrée au visionnage des images tournées par la presse lors de la perquisition du 16 octobre qui avait viré à la confrontation. Certaines séquences ont provoqué des rires dans la salle d'audience bondée notamment lorsque M. Mélenchon déclare dans une séquence le fameux: "La République, c'est moi".

La perquisition au cœur du procès avait été menée au siège parisien de LFI dans le cadre de deux enquêtes du parquet de Paris : sur les comptes de la campagne présidentielle de 2017 et sur les conditions d'emploi d'assistants d'eurodéputés de LFI, confiées depuis à des juges d'instruction.

Filmant en direct sur Facebook la perquisition de son domicile, M. Mélenchon avait d'abord dénoncé une "énorme opération de police politique" avant de se rendre avec des proches au siège du mouvement. Devant des caméras, il avait appelé ses proches à "enfoncer la porte". On le voyait également bousculer un représentant du parquet, ainsi qu'un policier qui tentait de s'interposer.

La journée de vendredi est consacrée aux plaidoiries qui débuteront à 9h30 et seront suivies des réquisitions. Le jugement sera mis en délibéré.

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