Le Premier ministre a annoncé plusieurs mesures relatives à l’école, la famille et les réseaux sociaux dans le cadre d’un discours où il a demandé un « sursaut d’autorité ». Si le diagnostic sur la violence des jeunes est partagé par les sénateurs de tous bords, ils veulent maintenant savoir comment cela se traduira concrètement.
Au QG de Fillon, fébrilité et «gouvernement» mis en cause
Par Public Sénat
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Un jour sans fin. La campagne de François Fillon semble se répéter. Plus de trois semaines après une conférence de presse de crise, revoilà à nouveau le candidat de la droite devant une masse de journalistes, à son QG. Début février, il avait présenté ses excuses aux Français tout en maintenant sa candidature, après les révélations du Canard enchaîné sur l’emploi présumé fictif de sa femme Pénélope en tant que collaboratrice parlementaire. A deux mois du premier tour, François Fillon annonce aujourd’hui sa future mise en examen, le 15 mars, dans cette affaire. Mais il maintient coûte que coûte sa candidature : « Je ne céderai pas, je ne me rendrai pas, je ne me retirerai pas ».
En présence de Bruno Retailleau, Valérie Pécresse et François Baroin, arrivés juste avant lui, le candidat continue de dénoncer « une enquête à charge », avec « une présomption d’innocence complètement disparue ». Sa convocation tombe deux jours avant la date limite de dépôt des 500 parrainages nécessaires pour se présenter, le 17 mars. « C’est entièrement calculé pour m’empêcher d’être candidat » soutient François Fillon. « Nombre de mes amis parlent d’assassinat politique. C’est un assassinat, en effet ». Et d’en appeler « au peuple français », « seul le suffrage universel peut décider ».
Rumeurs et parlementaires sans infos
Quelques minutes avant, dans la grande salle de presse du QG, l’ambiance était étonnante, presqu’en apesanteur. Quelques parlementaires, comme la député Isabelle Le Callennec ou la sénatrice Sophie Primas, membres de l’équipe Fillon, se sont mêlés aux journalistes. Ils ont fait le déplacement pour en savoir plus. Ils ne sont au courant de rien et se demandent, comme la presse, ce que va annoncer le candidat. « J’étais venue ce matin. Je devais faire partie de la délégation de Fillon pour la visite au Salon de l’agriculture. Et on m’a dit un quart d’heure avant que c’était retardé… Et voilà » raconte Sophie Primas.
Dans l’heure qui précède la déclaration, les rumeurs vont bon train. On parle d’une garde à vue de Pénélope Fillon, qui n’a en réalité pas lieu. La démission du directeur de campagne, Patrick Stefanini, est évoquée, avant d’être démentie. Dans la salle, certains relâchent la pression par le rire. « Il va y avoir un malaise… Parce qu’il fait trop chaud ! » lance une permanente de la campagne. « Je stresse » avoue une parlementaire LR, pour qui l’attente devient difficile.
Fillon est en retard. Derrière le rideau bleu du fond, une ombre passe. « C’est le sens de la dramaturgie » plaisante un élu. C’est Juppé ? « Peut-être » rigole (ou pas) le même. Un parlementaire s’inquiète. Et imagine le pire, en parlant au passé : « C’était trop simple. On avait un beau projet, un beau candidat, on a fait une belle primaire ». Quelques minutes plus tard, le même est soulagé : « C’est reparti. Au boulot ! »
Longuet : « Une procédure qui en l’espèce vient du parquet, c’est à dire du gouvernement »
Les soutiens de Fillon font justement le boulot, après la déclaration. Fidèles à leur ligne de défense, il s accusent une justice qui serait téléguidée par le pouvoir en place. « Tout ça s’accélère à une vitesse incroyable. Pour un autre justiciable, ça ne s’accélèrerait pas comme ça. (…) François Fillon est traité de façon hors norme » pense le député Eric Woerth.
Le sénateur Gérard Longuet dénonce une instruction « exclusivement à charge » et évoque « un sentiment d’embuscade préparée de main de maitre ». L’ancien ministre de la Défense va même plus loin et vise « le gouvernement » : « Tout le monde peut être mis en examen. (Pour un candidat) c’est parfaitement anormal. Il faudra que la loi, dans l’avenir, prévoit des règles du jeu pour faire en sorte que les électeurs ne soient pas pris en otage par une procédure qui en l’espèce vient du parquet, c’est à dire du gouvernement, mais qui pourrait demain venir de quiconque à travers une plainte avec constitution de parti civile » souligne-t-il. Regardez :
« Mettre qui à sa place ? »
Reste que Fillon ne tient pas sa première parole de se retirer en cas de mise en examen. Le candidat avait par la suite certes fait comprendre qu’il irait jusqu’au bout, quoi qu’il arrive. Mais les mots sont là. « Comme tous les innocents, (...) il méconnaissait ce que les procédures judicaires peuvent recéler de traquenards ou de manœuvres » met en avant Gérard Longuet, « et il est mis en examen alors qu’aucun élément de sa défense n’est pris en considération ». Pour Sophie Primas, « la procédure est complètement dévoyée, on voit bien que c’est une parodie de justice. La mise en examen est caduque » justifie la sénatrice des Yvelines.
Juste à côté, le député Bernard Debré dénonce « un acharnement… j’allais dire thérapeutique, parce que je suis médecin ». « S’il avait été mis en examen un mois avant, il aurait pu dire je me retire. Mais là, dire qu’il sera mis en examen deux jours avant la date limite de dépôt des signatures… » s’étonne le chirurgien. Il ajoute : « Et pour mettre qui à sa place ? » La droite manque en effet d’un plan B qui fasse l’unanimité ou suffisamment crédible pour reprendre le flambeau. Mais « divers point de vue » ont a été exprimés en petit comité avant la déclaration, selon un parlementaire…
Morano : « Je vis mal cette campagne »
Nadine Morano a fait aussi le déplacement. Celle qui soutenait Nicolas Sarkozy défend François Fillon. Mais sans la même abnégation que ses plus proches soutiens. Soutient-elle sa décision ? « C’est sa décision et il la prend en conscience. Il en mesure à la fois les risques, à la fois les chances et le devoir qui doit être le sien au service de la France » affirme Nadine Morano… Elle ajoute : « Il fera tout pour ne pas faire perdre notre famille politique. Il sait que l’enjeu est trop important. On est vraiment dans une opération inédite. C’est du jamais vu. C’est une campagne présidentielle que je n’aime pas. Je la vis mal, comme beaucoup. Comme les Français, les militants ». Regardez :
Un autre a l’air de ne pas bien vivre non plus la campagne. C’est Bruno Le Maire. Il lâche le candidat, au nom du « respect de la parole donnée ». Dehors, la sirène des pompiers a sonné, comme chaque premier mercredi du mois, à midi. Et comme il y un mois, lorsque François Fillon réunissait les parlementaires pour dénoncer « un coup d’Etat institutionnel » et continuer sa campagne. Un jour sans fin.