Au Vietnam, contrats et mémoire de la guerre d’Indochine pour Edouard Philippe

Au Vietnam, contrats et mémoire de la guerre d’Indochine pour Edouard Philippe

Édouard Philippe se rend de vendredi à dimanche au Vietnam pour un voyage alliant diplomatie économique, avec des "accords...
Public Sénat

Par Marc PRÉEL

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Édouard Philippe se rend de vendredi à dimanche au Vietnam pour un voyage alliant diplomatie économique, avec des "accords commerciaux" attendus, et la mémoire de la guerre d'Indochine, avec un rare passage du Premier ministre français à Dien Bien Phu.

Le dernier - et jusque-là seul - passage d'un haut responsable français sur les lieux de la lourde défaite de l'armée coloniale remonte à février 1993. Le président Mitterrand était alors venu se recueillir sur ce site symbole de l'acharnement des combats et de la victoire historique du Vietminh communiste en 1954.

Quand Emmanuel Macron s'est déjà à de nombreuses reprises saisi de la mémoire douloureuse de la guerre d'Algérie, Edouard Philippe, qui se rend à Dien Bien Phu samedi, a souhaité faire, selon son entourage, ce "geste important" venant d'une génération qui n'a pas connu les guerres de décolonisation.

"Pour aller ensemble avec un pays, il faut regarder le passé de manière confiante et être en paix avec ce passé, même s'il peut être douloureux", souligne Matignon.

Après 56 jours de combats sanglants, la bataille dans la funeste "cuvette" a pris fin le 7 mai 1954 par la chute du camp retranché, scellant la fin de la présence française en Indochine et l'émergence du Vietnam en tant que nation indépendante.

Plus de vingt ans de guerre et six décennies plus tard, le pays communiste est devenu une puissance émergente de 95 millions d'habitants, qui comme son grand voisin chinois affiche des taux de croissance de près de 7%. Un marché en fort développement qui borde ce qui s'annonce comme une des grandes zones de tensions du XXIe siècle, la mer de Chine méridionale.

"C'est un des pays dont on a fait notre priorité", souligne Matignon.

Avec une part de marché de moins d'1% des échanges commerciaux vietnamiens, la France veut davantage "positionner ses entreprises" au Vietnam. "Le but de cette visite sera de concrétiser des accords commerciaux", même s'ils ne seront pas tous "fermes", précise Matignon. Ils devraient porter sur l'aéronautique, les biens de consommation ou encore l'agroalimentaire.

Une cérémonie de signatures d'accords est prévue vendredi après-midi entre Édouard Philippe et son homologue vietnamien Nguyen Xuan Phuc, avant un entretien avec le président Nguyen Phu Trong.

- Tensions en mer de Chine -

Le contexte est favorable: s'ils n'excluent pas d'y revenir, les Etats-Unis de Donald Trump ont quitté le traité commercial transpacifique TPP. Le Vietnam, en discussions avancées avec l'Union européenne pour un accord de libre-échange, cherche de nouveaux partenaires.

Face aux revendications territoriales de Pékin en mer de Chine du Sud, et la souveraineté contestée des archipels Spratleys et Paracels, Hanoï est également dans une phase de rapprochement avec les puissances occidentales, même si la Chine communiste reste son partenaire incontournable.

La France, a fortiori depuis l'élection d'Emmanuel Macron, cherche elle à renforcer un axe "indo-pacifique", avec l'Inde, l'Australie ou encore le Japon.

Le dossier de la "mer de l'Est", comme elle s'appelle au Vietnam, "sera au menu des discussions", selon Matignon. La France "ne prend pas parti pour l'un ou pour l'autre mais veut le respect du droit, c'est-à-dire de la liberté de navigation et de circulation".

Avec la fin du quasi monopole russe, et sur fond de montée des tensions maritimes, Paris lorgne également depuis plusieurs années le marché de la défense au Vietnam.

"On est tout à fait prêts à aider le Vietnam dans ses besoins d'équipements pour mieux surveiller et contenir ses frontières. Il y a des discussions en cours mais elles sont assez longues" et ne devraient pas se concrétiser cette semaine, selon Paris.

Pour son déplacement, Edouard Philippe est accompagné des ministres Agnès Buzyn (Santé), Gérald Darmanin (Comptes Publics) et du secrétaire d'Etat Mounir Mahjoubi - et d'une délégation d'une quarantaine de personnalités de nombreux domaines.

Au terme de son voyage au Vietnam, le Premier ministre décollera lundi pour la Nouvelle-Calédonie, au lendemain du référendum d'indépendance, fruit du processus de décolonisation encadré par les accords de Matignon et Nouméa.

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