La tension monte encore à l'approche de l'audition d'Alexandre Benalla : le chef du parti présidentiel Christophe Castaner a menacé la commission d'enquête, au cas où elle voudrait "s'arroger un pouvoir de destitution" du président, tandis que l'avocat de l'ex-chargé de mission envisage des recours.
Alexandre Benalla, ex-collaborateur du président Emmanuel Macron, mis en examen pour violences sur un manifestant le 1er mai, doit être auditionné le 19 septembre devant la commission d'enquête du Sénat qui cherche à établir quelles étaient réellement ses fonctions à la présidence.
Son avocat, Laurent-Franck Liénard, a dit jeudi, sur BFMTV, étudier "les recours possibles" et "les contestations" envisageables contre la commission d'enquête.
Selon lui, Alexandre Benalla n'écarte pas non plus l'éventualité de demander un huis clos, estimant que "beaucoup de gens ont utilisé aujourd'hui Alexandre Benalla comme étant la torpille à balancer à Emmanuel Macron".
Même ton de Christophe Castaner, secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, lors d'une conférence de presse à Paris : "Si certains pensent qu'ils peuvent s'arroger un pouvoir de destitution du président de la République, ils sont eux-mêmes des menaces pour la République".
Une commission d'enquête qui penserait "qu'elle peut jouer de ses fonctions de contrôle du gouvernement pour faire tomber un président de la République commettrait une faute constitutionnelle", a-t-il insisté.
Une charge particulièrement virulente alors que l'opposition sénatoriale s'est insurgée ces derniers jours contre les critiques de l'exécutif, notamment de la ministre de la Justice Nicole Belloubet et du porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, sur son travail.
- "Propos extravagants" -
"Des propos extravagants", a jugé jeudi l'entourage du président du Sénat.
Le délégué général de La République en marche (LREM) Christophe Castaner durant sa conférence de presse le 14 septembre 2018 à Paris.
AFP
"On ne comprend pas ces propos. Le Sénat est dans son rôle, ni plus ni moins, dans le périmètre qui lui a été accordé. On ne cherche à destituer personne, comme le laissent entendre les propos extravagants de M. Castaner. C'est méconnaître la constitution", s'est insurgé cette source.
Interrogé sur le coup de fil très inhabituel d'Emmanuel Macron au président du Sénat Gérard Larcher, qui a lui aussi provoqué la colère des sénateurs, M. Castaner a expliqué mercredi qu'il s'agissait de rappeler la séparation des pouvoirs, "l'essence même de la Ve République".
"Il y a aujourd'hui - et c'était le sens de l'échange entre le président du Sénat et le président de la République - certaines personnes qui confondent la mission du Parlement qui est de contrôler le gouvernement, avec une mission, que le Parlement s'auto-attribuerait - de contrôler l'exécutif et la présidence de la République", a souligné M. Castaner, qui avait été lui-même entendu par les sénateurs en juillet en tant que patron de LREM.
Même le président du MoDem, François Bayrou, dans la majorité présidentielle, a dit ne pas approuver "les attaques contre le Sénat" qui "exerce sa mission de contrôle vis-à-vis de l'exécutif".
Dans l'opposition, le chef de la France insoumise Jean-Luc Melenchon a lui fustigé "l'escalade sans précédent". "Le bras de fer de Macron, Castaner et Benalla avec le Sénat est du jamais vu", a-t-il réagi sur Facebook.
"Ils ont peur de quelque chose, mais quoi? Qu'est-ce qu'ils craignent?", a-t-il relevé. Selon lui, "quand monsieur Castaner prend le risque de parler sur un tel ton au Sénat, on sent qu'il y a comme une sorte de panique dans l'exécutif".
"Que se passe-t-il au sommet de l’Etat ? Pourquoi ces inquiétudes ? Y-a-t-il qq chose à cacher ?", a aussi interrogé le président du groupe socialiste au Sénat Patrick Kanner sur Twitter.
Alexandre Benalla sera entendu avec l'ex-salarié LREM Vincent Crase, chef d'escadron dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale, filmé aux côtés de M. Benalla qui était en train de frapper un manifestant le 1er mai à Paris alors qu'il était censé n'être qu'un observateur.
Le gouvernement et la majorité sénatoriale se renvoient la responsabilité de l’échec de la commission mixte paritaire (CMP) sur le projet de loi de finances 2026. Gérard Larcher répond à Sébastien Lecornu en défendant la position du Sénat pendant l’examen du budget et en dénonçant « le manque de considération » et « les mots excessifs » du Premier ministre.
Face à l’incapacité des députés et sénateurs à trouver un accord en commission mixte paritaire, le gouvernement fait porter l’échec sur le dos de la droite sénatoriale. Le PS lui emboîte le pas et dénonce le « dogmatisme » de LR. « Pitoyable », rétorque-t-on à droite, où on accuse le gouvernement d’avoir voulu provoquer « l’échec de la CMP ».
C’était attendu, députés et sénateurs ne sont pas parvenus à un accord en commission mixte paritaire sur le budget de l’État. A la sortie, le rapporteur LR du Sénat a insisté sur la responsabilité du gouvernement dans cet échec alors que depuis quelques jours, l’exécutif pointait « la radicalité » de la droite sénatoriale.