Avant de s’avancer sur Ascoval, le gouvernement demande un avis indépendant

Avant de s’avancer sur Ascoval, le gouvernement demande un avis indépendant

Le gouvernement ne s'avance pas sur le dossier de l'aciérie d'Ascoval. Avant toute décision sur un éventuel soutien public, il veut un avis...
Public Sénat

Par Julien DURY

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Le gouvernement ne s'avance pas sur le dossier de l'aciérie d'Ascoval. Avant toute décision sur un éventuel soutien public, il veut un avis indépendant sur la situation économique du site, où presque 300 emplois sont menacés par un redressement judiciaire.

"On a (...) besoin déjà de mettre un petit peu de rationalité et d'aller au fond du dossier", a déclaré jeudi soir sur France Info la secrétaire d’État à l’Économie, Agnès Pannier-Runacher.

L'aciérie de Saint-Saulve (Nord), qui compte 281 employés, est menacée de disparition depuis la liquidation judiciaire en février de son principal actionnaire, Ascq Industries, et s'est vue accorder cette semaine un sursis de deux semaines par la justice.

Le groupe Altifort, basé dans la Somme, a fait une "offre ferme" de reprise, s'engageant à maintenir l'ensemble des emplois et en créer de nouveau, mais il demande au sidérurgiste français Vallourec, principal client désormais premier actionnaire, de maintenir pendant un an et demi son niveau actuel de commandes.

Or, Vallourec, spécialiste des tubes en acier sans soudures et dont l’État est actionnaire à 17%, a refusé en début de semaine cette demande, la jugeant "contraire à la préservation (de ses) intérêts" et suscitant la colère des syndicats et des élus locaux.

"Demain, je recevrai l'ensemble des acteurs", a annoncé Mme Pannier-Runacher. "On va prendre point par point ce dossier de reprise, (...) voir si Altifort peut aller jusqu'au bout du projet."

Dans ce contexte, la secrétaire d’État a annoncé que le gouvernement allait demander au cabinet Roland Berger d'effectuer une évaluation de la situation économique du site, promettant de lui faire "rebalayer" tout le dossier.

Selon une source proche du dossier, cette décision vise à donner au gouvernement un autre point de vue que les études présentées par les syndicats, dressant le portrait d'un site en bonne santé et crédibilisant donc le projet d'Altifort.

De leur côté, les syndicats ont jugé l'initiative du gouvernement bien trop tardive "à quelques jours de la mort d'un site", selon les mots de Bruno Kopczynski, porte-parole de l'intersyndicale, pour qui "le gouvernement réagit dans la panique".

- "un projet vivant, qui gagne" -

Mme Pannier-Runacher a plutôt mis l'accent sur la responsabilité d'Altifort, soulignant le peu de marge de manœuvre de Vallourec alors que les comptes de ce dernier sont dans le rouge (avec une perte nette de 307 millions d'euros sur le premier semestre pour un chiffre d'affaires de 1,09 md).

Le groupe Vallourec
Chiffres clés du groupe Vallourec, actionnaire à 40% de l'aciérie Ascoval
AFP

"On concentre la pression sur Vallourec alors que le sujet de reprise d'Altifort concerne la pérennité de l'activité", a-t-elle prévenu.

"Altifort aujourd'hui met 10 millions d'euros sur la table, demande 150 millions de financements pour l'ensemble du projet: c'est (...) ambitieux", a-t-elle prévenu.

La secrétaire d’État a réitéré son appel à être "responsable", formulé dans l'après-midi devant le Sénat, et a déclaré, dans la lignée de son ministre de tutelle Bruno Le Maire, que tout soutien de l’État ne se ferait qu'à condition de recueillir des financements équivalents de la part d'acteurs privés.

"Il ne suffit pas de signer un chèque d'argent public pour qu'une usine fonctionne", a-t-elle déclaré. "Derrière, il faut que l'aciérie soit un projet qui soit vivant, qui gagne."

La secrétaire d’État s'exprimait alors que divers membres de l'opposition appelaient à un soutien public, dans une plus ou moindre mesure à gauche comme à droite.

A l'extrême-droite, Marine Le Pen, chef du Rassemblement national (RN), a appelé à "recapitaliser" l'aciérie, tandis qu'à gauche de la gauche, le député insoumis Ugo Bernalicis a estimé que l’État "peut nationaliser", citant l'exemple des chantiers STX de Saint Nazaire. A droite, sans souhaiter une nationalisation, le sénateur républicain Bruno Retailleau, a jugé que l’État devait "tout faire pour éviter la fermeture".

Le président du conseil régional des Hauts-de-France, Xavier Bertrand (divers droite), qui fait depuis des semaines du sujet un cheval de bataille, a réitéré sa confiance dans l'offre d'Altifort, s'inquiétant au passage de la santé de Vallourec. "Avec toute cette façon que Vallourec a eu de torpiller le projet, il y a quelque chose derrière tout ça", a-t-il estimé auprès de l'AFP.

Dans la même thématique

Avant de s’avancer sur Ascoval, le gouvernement demande un avis indépendant
5min

Politique

Européennes 2024 : après le discours d’Emmanuel Macron, Olivier Faure veut saisir l’Arcom au nom de « l’équité » entre les candidats

Le Parti socialiste demande que le discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe, prononcé jeudi 25 avril à la Sorbonne, soit décompté des temps de parole et inscrit dans les comptes de campagne de la majorité présidentielle. Pour le patron du PS, invité de Public Sénat, le chef de l’Etat est devenu « candidat à cette élection européenne ».

Le

Paris : Speech of Emmanuel Macron at La Sorbonne
6min

Politique

Discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe : « Il se pose en sauveur de sa propre majorité, mais aussi en sauveur de l’Europe »

Le chef de l'Etat a prononcé jeudi 25 avril à la Sorbonne un long discours pour appeler les 27 à bâtir une « Europe puissance ». À l’approche des élections européennes, son intervention apparait aussi comme une manière de dynamiser une campagne électorale dans laquelle la majorité présidentielle peine à percer. Interrogés par Public Sénat, les communicants Philippe Moreau-Chevrolet et Emilie Zapalski décryptent la stratégie du chef de l’Etat.

Le

Paris : Speech of Emmanuel Macron at La Sorbonne
11min

Politique

Discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe : on vous résume les principales annonces

Sept ans après une allocution au même endroit, le président de la République était de retour à La Sorbonne, où il a prononcé ce jeudi 25 avril, un discours long d’1h45 sur l’Europe. Se faisant le garant d’une « Europe puissance et prospérité », le chef de l’Etat a également alerté sur le « risque immense » que le vieux continent soit « fragilisé, voire relégué », au regard de la situation internationale, marquée notamment par la guerre en Ukraine et la politique commerciale agressive des Etats-Unis et de la Chine.

Le

Police Aux Frontieres controle sur Autoroute
5min

Politique

Immigration : la Défenseure des droits alerte sur le non-respect du droit des étrangers à la frontière franco-italienne

Après la Cour de Justice de l’Union européenne et le Conseil d’Etat, c’est au tour de la Défenseure des droits d’appeler le gouvernement à faire cesser « les procédures et pratiques » qui contreviennent au droit européen et au droit national lors du contrôle et l’interpellation des étrangers en situation irrégulière à la frontière franco-italienne.

Le