Baisse des dotations: l’inquiétude des élus locaux

Baisse des dotations: l’inquiétude des élus locaux

Réduction du nombre d’emplois aidés, annulation de 300 millions de crédits destinés aux collectivités, l’été a été chaud entre l’exécutif et les élus locaux. Une crispation qui pourrait avoir son influence sur le résultat des prochaines élections sénatoriales.
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Le 17 juillet dernier au Sénat, lors de la première conférence nationale des territoires de son mandat Emmanuel Macron exposait longuement aux élus locaux sa stratégie quinquennale destinée « à baisser de trois points de PIB  la dépense publique ». Des économies substantielles chiffrées à 13 milliards d’euros pour les collectivités territoriales, mais, tempérait le chef de l’État, « nous ne procéderons pas à des baisses brutales des dotations », tout en insistant sur la « confiance  mutuelle » nécessaire entre l’État et les collectivités. Quelques jours plus tard, ce pacte de confiance est entamé avec la publication  d’un décret annulant près de 300 millions d’euros de crédits destinés aux collectivités locales. « C’est d’autant plus choquant que ces crédits sont pour la plupart destinés à des dépenses d’investissement » réagissait, auprès de Libération, André Laignel, vice-président PS de l'Association des maires de France (AMF).

Dimanche, le Premier ministre, Édouard Philippe annonce qu’il y aura «nettement moins de contrats aidés ». « Ces contrats précaires subventionnés par l’État, donc le contribuable » selon la définition de l’exécutif passeront au nombre de 320 000 à la fin de l’année contre 460 000 en 2016.  Une annonce qui crispe un peu plus les élus locaux en cette période de rentrée. Car ces emplois aidés sont utilisés notamment dans les cantines ou encore les études surveillées. Symptomatique des conséquences mal maîtrisées de cette réduction des emplois aidés, l’association des Restos du Cœur de Grenoble déclare qu’elle ne pourra plus servir de repas chauds. Trois secteurs prioritaires sont alors définis pour le recours aux contrats aidés : l’accompagnement des enfants handicapés, l’Outre-mer et les secteurs d’urgence sanitaire et sociale.

« Le Président et le gouvernement ont raté le rendez-vous de confiance avec les élus locaux »

Peut-on dès lors parler de fracture entre l'’exécutif et les élus locaux ? Interrogé par le Figaro ce lundi, le président du Sénat Gérard Larcher considère que « le Président et le gouvernement ont raté le rendez-vous de confiance avec les élus locaux ». « La réalité aujourd'hui, c'est l'autonomie financière des collectivités locales qui est menacée » poursuit-il, évoquant : « la quasi-suppression à terme de la taxe d'habitation » (…) « 13 milliards de dotations réelles en baisse sur le quinquennat » (…) « la diminution annoncée du nombre d'élus locaux » et la réduction du nombre d’emplois aidés.

« Emmanuel Macron a pris les élus pour des enfants de maternelle »

Au Sénat en effet, chambre représentant les territoires, c’est peu dire que ces premières décisions du gouvernement passent mal ». « Lors de la conférence des territoires, Emmanuel Macron a pris les élus pour des enfants de maternelle en agitant la menace d’une réduction des dotations pour les maires qui ne réaliseraient pas les économies » se souvient Éric Doligé, sénateur LR du Loiret et membre de la délégation aux collectivités territoriales. « Les élus locaux vont de déception en déception : déception après l’annonce du prélèvement de 13 milliards sur 5 ans, déception après l’annonce démagogique de réduction du nombre de conseillers municipaux pourtant bénévoles... Je ne comprends pas très bien pourquoi le gouvernement fait autant d’erreurs à quelques semaines des sénatoriales. On dirait un éléphant dans un magasin de porcelaine » ajoute Éric Doligé.

« Le gouvernement considère les collectivités locales comme une contrainte et non  comme une chance »

Son collègue socialiste, Alain Anziani sénateur de la Gironde et membre du bureau de l’association des maires de France (AMF), a lui sa petite idée sur l’origine des choix du gouvernement. « Emmanuel Macron n’a jamais été un élu local. Il a une vision jacobine et centralisatrice. Je ne suis donc pas étonné que le gouvernement considère les collectivités locales comme une contrainte et non  comme une chance. Le gouvernement va pourtant avoir besoin des élus locaux pour réduire le chômage. Mais les élus locaux n’ont plus confiance et s’ils n‘ont pas confiance. Ils ne vont pas investir ».

Jean-Marie Bockel, sénateur centriste et président de la délégation aux collectivités territoriales, indique être dans « une démarche constructive » mais demande au gouvernement « de faire part de discernement » dans les efforts qu’il demande aux collectivités.

Cette défiance des élus locaux vis-à-vis de l’exécutif pourrait avoir rapidement des conséquences dans les urnes à l’occasion des prochaines élections sénatoriales, le 24 septembre. Le collège électoral, composé en grande partie de conseillers municipaux, risque de rappeler sévèrement à la majorité présidentielle son inquiétude.

« Les élections sénatoriales reposent sur les scrutins d’avant. Or comme la droite a à peu près tout gagné, ça ne peut pas être une formidable embellie pour La République En Marche. Il faut regarder la réalité, il ne faut pas s’attendre à des miracles » a estimé sur Public Sénat, ce lundi, le ministre de l’Intérieur et ancien sénateur, Gérard Collomb.

(Sujet vidéo: Audrey Vuétaz)

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