Baroin jette l’éponge : « Celui qui en veut le plus, c’est Xavier Bertrand » selon le sénateur Jérôme Bascher

Baroin jette l’éponge : « Celui qui en veut le plus, c’est Xavier Bertrand » selon le sénateur Jérôme Bascher

On s’y attendait, François Baroin n’entend pas se lancer dans la course à la présidentielle. Un choix qui laisse le champ libre à Xavier Bertrand ou Bruno Retailleau. Ce dernier veut une primaire à droite, mais beaucoup n’en veulent pas. Le parti a repoussé toute décision après les régionales, où Xavier Bertrand est candidat…
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« Quelle surprise ! » A l’annonce du sujet, le sénateur LR de l’Oise, Jérôme Bascher, tente de montrer ses talents d’acteur. François Baroin ne se lancera pas dans la course à la présidentielle de 2022. On s’y attendait depuis la fin de l’été, mais selon L’Opinion et France Info, c’est décidé. Le maire LR de Troyes, président de l’Association des maires de France, ne s’y voit pas. « Je n’en ai pas envie. Je suis très heureux dans ce que je suis, dans ce que je fais aujourd’hui » a dit, selon France Info, François Baroin, qui n’entend pas entrer dans la bataille. La guerre de Troyes n’aura pas lieu.

A tour de rôle, il s’entretient avec les chapeaux à plume des LR pour leur annoncer. François Baroin verra notamment Bruno Retailleau « la semaine prochaine pour prendre un café ensemble »,  a expliqué ce matin sur France Inter le président du groupe LR du Sénat, qui vient d’être reconduit à la tête des sénateurs LR.

La méthode fait en revanche tiquer le sénateur (apparenté LR) de Paris, Philippe Dominati : « Est-ce officiel ? (…) Ce qui serait pas mal, pour un leader politique de cette importance (…) qui a bénéficié de la confiance du parti LR depuis plus d’un an – car en réalité, Christian Jacob "roule" pour François Baroin – ce serait d’avoir une prise de position officielle. Car dire par ouï-dire, mon copain, ma cousine, la grand-mère dit qu’il ne serait pas candidat… (…) Je préférerais un communiqué, même de trois lignes » a-t-il estimé sur Public Sénat. Regardez :

« Sa vie personnelle et professionnelle, c’est le plus important pour lui »

« C’était totalement attendu. Tous les gens proches de Baroin savaient qu’il avait peu d’appétence » souligne Jérôme Bascher, qui rappelle un événement, qui paraît rétrospectivement instructif : « Il faut se souvenir que le lendemain du Trocadéro, pendant la campagne de 2017, il y a un petit groupe qui se réunit autour de Nicolas Sarkozy, dont François Baroin. Il lui dit, "c’est à toi d’y aller " à la place de Fillon. Et Baroin répond "non, je n’y vais pas". Donc il continue de dire non ».

Cette décision, c’est un peu la chronique d’un retrait annoncé. « Ce n’était pas une surprise. Je m’y préparais, même si je le regrette sur le plan politique. Il le fait en son âme et conscience. Je pense que sa vie personnelle et professionnelle, c’est le plus important pour lui. Etre candidat, c’est faire beaucoup de sacrifices » réagit Laure Darcos, sénatrice de l’Essonne, pour qui « François Baroin est un ami personnel depuis très longtemps ». Elle dine parfois avec lui et « son épouse Michèle Laroque ». Cette dernière, actrice, aurait-elle pu jouer un rôle pour le dissuader de se lancer ? Réponse de Laure Darcos :

Peut-être que Michèle Laroque n’aurait pas eu envie de tirer un trait sur sa carrière comme Carla Bruni a dû le faire quand Nicolas Sarkozy était Président. 

Sophie Primas, présidente LR de la commission des affaires économiques du Sénat, ne croit « pas que ce soit une question d’envie personnelle, mais de contexte personnel, c’est un peu différent. Il savait que tant qu’il n’était pas candidat, il était encensé par tout le monde. Et à partir du moment où il se serait déclaré candidat, il allait devenir la cible de tout le monde en interne, en externe. La presse, tout le monde, allait s’occuper de lui. Et je pense qu’il n’avait pas très envie de ça ». Regardez (vidéo de Béatrice Fainzang) :

Sophie Primas, sénatrice LR, au sujet de la décision de Baroin de ne pas se lancer pour 2022
01:41

Pour se lancer dans la mère de toutes les batailles politiques, il faut en vouloir. Y penser le matin en se rasant, et pas seulement. Et François Baroin a peut-être d’autres perspectives et idées en tête. C’est ce que souligne, de l’autre côté du spectre politique, le sénateur PCF Eric Bocquet. « Il était en septembre dernier, en discussion avec la banque Morgan Stanley pour succéder à René Proglio comme directeur général de sa filiale française... y aurait-il une relation de cause à effet ? A suivre, de près... » réagit sur Twitter le sénateur du Nord.

« Certains ne veulent pas de primaire car personne ne fait le poids face à Bruno »

Pour l’envie d’avoir envie, d’autres montrent plus de signes que le président de l’AMF. « Et comme dit Rachida Dati, celui qui en veut le plus, qui est le plus bandant, c’est Xavier Bertrand » lâche Jérôme Bascher. Sans oublier bien sûr le président du groupe LR du Sénat, Bruno Retailleau. Il l’a redit clairement, ce matin, sur France Inter. « S’il faut être candidat, je le serais. Malheureusement, je vois bien que mon propre parti fait tout pour tuer la primaire. C’est une absurdité totale, ils veulent se passer des militants, des sympathisants » dénonce Bruno Retailleau (voir ci-dessous). Comme il l’avait déjà exprimé sur Public Sénat, il veut « être le porte-voix de la droite d’en bas, car il y en a marre des petits arrangements, des petits accommodements de la droite d’en haut ».

Mais certains caciques de la droite pourraient craindre que la ligne de droite ferme et conservatrice de Bruno Retailleau soit la formule gagnante auprès des militants, de la base des LR. « Sans doute que certains ne veulent pas de primaire car personne ne fait le poids face à Bruno en cas de primaire. Au parti LR, le niveau intellectuel, de conviction et d’expérience de Bruno Retailleau est au-dessus du lot » pense Jérôme Bascher. Quant à la « droite d’en bas », le sénateur de l’Oise y voit « un truc très subtil qui est de prendre le positionnement de Xavier Bertrand, qui est la droite populaire. Car tout le monde s’aperçoit qu’on a perdu le peuple ».

Du côté de Valérie Boyer, qui vient de quitter l’Assemblée et d’être élue sénatrice, on sent que la décision de François Baroin sera surmontable. « Nous ne manquons pas de talents dans ma famille politique. Je suis triste par rapport à François Baroin. Mais ce n’est pas le fond du sujet. Le fond du sujet, c’est le projet (…) et comment designer notre candidat » souligne la sénatrice des Bouches-du-Rhône. Elle ajoute : « Cette question-là doit être tranchée par le parti, car il n’est pas question d’y aller en ordre dispersé ». Regardez (vidéo de Béatrice Fainzang) :

Valérie Boyer, sénatrice LR, sur 2022 : "Le fond du sujet, c’est le projet et comment designer notre candidat"
01:29

« Les deux largement en tête des sondages de popularité à droite, c’est Sarkozy et Bertrand »

L’ancien ministre Alain Joyandet, conseiller politique des LR, fait partie de ceux qui ne sont pas chauds pour une primaire. « Je n’ai jamais été un fan des primaires, y compris quand on les a organisées. Donc je reste très réservé » affirme le sénateur LR de la Haute-Saône. Il ajoute : « Mon espoir, c’est qu’un candidat ou candidate "naturel" se dessine. Je suis de ceux qui croient aux sondages. On peut les critiquer beaucoup, mais globalement, ils dégagent quand même des tendances lourdes. Donc il faut peut-être attendre encore un peu », notamment jusqu’aux « régionales et départementales. Il se peut même d’ailleurs que dans nos candidats potentiels, il y ait des candidats aux régionales… »

On pense bien sûr à Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France, qui se trouve justement bien placé dans les sondages. Mais ce n’est pas le seul, fait remarquer Alain Joyandet : « Les deux largement en tête, au sein des personnalités de droite, c’est Nicolas Sarkozy et Xavier Bertrand ». Le sénateur s’empresse de préciser qu’il ne fait que citer les sondages de popularité. Mais « comme dans ce monde politique un peu fou, tout devient possible, je fais un inventaire sans contrainte »…

Laure Darcos n’est pas plus emballée par une consultation. « Je suis très partagée par la primaire. Surtout par des primaires fermées au seul parti, bien évidemment. Et des primaires ouvertes, on a vu que n’importe qui peut venir pour influencer les résultats » met en garde la sénatrice, selon qui « il est temps, surtout, de ne pas se bousculer. Il faudra voir après les régionales ». Aujourd’hui, Laure Darcos se dit « très proche de Xavier Bertrand et de Valérie Pécresse ». Elle est porte-parole de Libre !, le mouvement de Valérie Pécresse, qui a aussi des ambitions, et « membre » de La manufacture, le club de réflexion de l’ancien ministre de la Santé. Laure Darcos espère que les choses se décanteront « l’été prochain, que l’un ou l’une se démarquera par rapport aux autres, en termes de popularité et de projet. Il faut que la mayonnaise prenne ». Bref, c’est là encore les sondages qui pourraient départager les postulants.

« La droite doit s’inspirer du Sénat pour gagner la présidentielle »

Primaire ? Sondage ? Jérôme Bascher croit pour sa part à « un système de départage. Sur ça, je suis très Larcher » dit le sénateur de l’Oise. L’expression employée par le président du Sénat est suffisamment large – et floue – pour intégrer en réalité plusieurs options. Pour l’heure, les LR ont décidé de repousser les choses à plus tard, au grand dam de Bruno Retailleau. « Attendons les régionales. C’est ça qui a été décidé par le parti, lors du comité stratégique, la semaine dernière. C’est ce qu’a dit Christian Jacob (président des Républicains, ndlr) » selon Jérôme Bascher. D’autant que pour l’heure, « les Français ne sont pas à la présidentielle, mais dans le Covid, avec des soucis de santé et d’emploi ».

Pour Jérôme Bascher, la voie du salut pour la droite serrait à chercher du côté de la Haute assemblée.  « La droite doit s’inspirer du Sénat pour gagner la présidentielle, dans le rassemblement » selon le sénateur de l’Oise. La majorité sénatoriale de Gérard Larcher est composée des LR et des centristes, et même au-delà. Jérôme Bascher, qui connaît le président des Hauts-de-France « depuis 17 ans », a son idée pour incarner le mieux cette union gagnante : « Je défends un très beau tandem, Bertrand/Retailleau, qui couvre politiquement tout le spectre de la droite. Ça va du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers au Modem. Il y a quelque chose. On est plusieurs à leur dire ». Si le ticket peut faire sens politiquement, sa mise en pratique pourrait être difficile. Elle ferait faire face à la réalité, celle la Ve République. Un seul homme, ou une seule femme, sera élu(e) à la fin.

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