Ce que contient (et ne contient pas) la loi sur les mobilités

Ce que contient (et ne contient pas) la loi sur les mobilités

Le projet de loi d’orientation des mobilités va du développement du covoiturage au plan vélo, en passant par les grandes infrastructures, notamment le rail. Le gouvernement recule en revanche sur les péages urbains et temporise sur la vignette poids lourds.
Public Sénat

Par F.V. (avec AFP)

Temps de lecture :

6 min

Publié le

Mis à jour le

Il était attendu pour le printemps dernier. Le projet de loi d’orientation des mobilités (LOM) a finalement été présenté ce lundi en Conseil des ministres, un plein milieu du mouvement des gilets jaunes. Dans sa communication, le gouvernement en fait ainsi une réponse au malaise « des territoires qui se sentent abandonnés », a assuré la ministre des Transports, Elisabeth Borne, qui porte le texte.

Avec cette loi LOM, il s’agit « de revoir en profondeur notre politique de mobilité en donnant la priorité aux transports du quotidien », a expliqué Elisabeth Borne ce lundi, après le Conseil des ministres (voir la vidéo). L’exécutif part du « constat d’une France à deux vitesses, avec beaucoup de focalisation sur les TGV, qui ont concentré l’attention et les moyens pendant que les réseaux ferroviaires et routiers du quotidien ont été sacrifiés, et des millions de nos concitoyens abandonnés au tout voiture ». Une stratégie qui « fracture les territoires » regrette la ministre.

Elisabeth Borne veut donner « la priorité aux transports du quotidien »
01:27

Le projet de loi sera examiné au Parlement à partir de février et rassemble de nombreuses mesures. Si le texte porte une ambition écologique, le gouvernement est cependant allé moins loin que prévu, dans l’ambiance actuelle, très électrique.

Reculade sur les péages urbains

Dans ce contexte de fronde des gilets jaunes, ce que ne comporte pas le texte est instructif. Ce projet de loi est marqué par une reculade, voire deux. L’exécutif ne souhaite visiblement pas rajouter d’huile sur le feu.

Le gouvernement a ainsi décidé d’exclure les péages urbains du projet de loi pour ne pas « accentuer les fractures entre territoires », a indiqué dimanche le ministère des Transports. Autre raison : peu de ville était candidate, notamment Paris, qui n’en voulait pas. La mesure était censée autoriser les grandes villes qui le souhaitaient d’instaurer un péage urbain, comme cela se pratique dans d’autres villes européennes. Un moyen de lutter contre la pollution.

Le tarif avait été fixé à 5 euros dans les grandes villes de plus de 500.000 habitants et à 2,50 euros pour celle de plus de 100.000 habitants.

Vignette poids lourds : le gouvernement gagne du temps

Pour le moment, ce n’est pas tout à fait une reculade, mais un ajournement. La vignette poids lourds n’est pas dans le projet de loi. Rien n’est encore totalement acté, mais le gouvernement semble au moins gagner du temps.

« Aucune décision n'est prise », a assuré Elisabeth Borne dans le JDD. « C'est un sujet sensible sur lequel il est utile de prendre le temps », dit-elle, évoquant l’idée « que les poids lourds étrangers contribuent à l'entretien des routes qu'ils empruntent, cela reste une bonne piste de travail ». Les particuliers seront eux clairement exclus de la mesure.

Censé remplacer l’écotaxe, mesuré enterrée sous François Hollande, l’objectif de cette vignette poids lourds est de rapporter environ 500 millions d’euros afin de financer les travaux sur les infrastructures. Mais en repoussant la prise de décision, le gouvernement s’évite de s’ajouter un blocage des routes par les chauffeurs routiers.

Soutien au covoiturage, encadrement des vélos et trottinettes en location

La loi entend soutenir le développement du covoiturage et la mise à disposition de véhicules en autopartage. Des voies pourraient être réservées aux covoitureurs. Le texte prévoit que les salariés pourront bénéficier d’un remboursement partiel des trajets par leur entreprise.

Le projet de loi prévoit aussi d’encadrer les mobilités en libre-service, comme les vélos, trottinettes ou scooters en location de courte durée. La loi mobilité autorise les collectivités à instaurer un cahier des charges fixant aux opérateurs des critères à respecter, comme « l'information aux usagers sur les règles de stationnement », le « respect des piétons ».

Ce texte fourre-tout vise également le développement des véhicules électriques ou biogaz et se penche sur l’arrivée des véhicules autonomes. La loi autorisera à partir de 2020 la circulation de navettes autonomes.

Baisse du prix du permis de conduire

Le texte reprend une annonce faite par Emmanuel Macron le 9 novembre dernier. Le permis de conduire verra son coût réduit « drastiquement ». Mais le détail n’est pas encore connu. Le chef de l’Etat expliquait vouloir aider à « avoir le permis plus vite et moins cher ». Il avait également annoncé que le Code de la route serait « intégré à la partie scolaire ».

Le plan vélo

Le texte inclut le plan vélo, présenté déjà en septembre. Sur le modèle de l’indemnité pour les transports en commun, il prévoit la création d’une indemnité vélo prise en charge par l’employeur. Ce « forfait mobilité » pourra atteindre 400 euros par an. Un fonds de 350 millions d’euros sur 7 ans va être créé. Il aidera les collectivités à financer les pistes cyclables.

Fin des ventes de voitures à moteur thermique en 2040

Le principe avait été annoncé par Nicolas Hulot en juillet 2107, quand il était encore ministre. « L’arrêt des ventes de véhicules émettant des gaz à effet de serre en 2040 » figure dans l’exposé des motifs du projet de loi, a expliqué Elisabeth Borne ce lundi, ainsi que « la neutralité carbone en 2050 ». Il s’agit donc d’un objectif qui n’est pas formellement inscrit dans un article du projet de loi.

Grandes infrastructures

Côté programmation des infrastructures des transports, la priorité sera la rénovation des réseaux existants, la désaturation des grands noeuds ferroviaires, l'achèvement d'une vingtaine d'axes routiers et un effort sur le fret ferroviaire. Le plus important projet du quinquennat sera la rénovation de l'axe classique Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Au total, l’Etat s’engage à investir au total 13,4 milliards d’euros.

Les efforts sont surtout consentis sur les trains de proximité. Les grands projets sont réduits à la portion congrue, avec seulement les amorces des lignes nouvelles (pour la grande vitesse) Bordeaux-Toulouse, Montpellier-Perpignan, Paris-Normandie et Marseille-Toulon-Nice, et aussi la mise à l'étude de Rennes-Redon, en Bretagne. S'ajoutent quelques autoroutes, comme le contournement de Rouen, l'axe Rouen-Orléans, Toulouse-Castres, la Route Centre Europe Atlantique (RCEA), le contournement d'Arles et une désaturation de l'A31 en Lorraine.

Une « autorité organisatrice de la mobilité »

Dans son volet institutionnel, la LOM instaure une « autorité organisatrice de la mobilité », nouveau nom pour les autorités organisatrices des transports. Les intercommunalités seront invitées à se saisir du sujet d'ici à la fin 2020, remplacées au besoin par les régions dont le rôle de coordination sera renforcé.

Dans la même thématique

Turin – Marifiori Automotive Park 2003, Italy – 10 Apr 2024
6min

Politique

Au Sénat, la rémunération de 36,5 millions d’euros de Carlos Tavares fait grincer des dents. La gauche veut légiférer.

Les actionnaires de Stellantis ont validé mardi 16 avril une rémunération annuelle à hauteur de 36,5 millions d’euros pour le directeur général de l’entreprise Carlos Tavares. Si les sénateurs de tous bords s’émeuvent d’un montant démesuré, la gauche souhaite légiférer pour limiter les écarts de salaires dans l’entreprise.

Le

Operation Wuambushu a Mayotte : Demolition en cours d’un vaste bidonville – Operation Wuambushu in Mayotte: Ongoing demolition of a vast slum
8min

Politique

« Mayotte place nette » : « La première opération était de la communication et la deuxième sera de la communication », dénonce le sénateur Saïd Omar Oili

Le gouvernement a annoncé ce mardi 16 avril le lancement du dispositif « Mayotte place nette », un an après le maigre bilan de l’opération baptisée « Wuambushu ». Saïd Omar Oili, sénateur de Mayotte, regrette le manque de communication du gouvernement avec les élus du département et met en doute l’efficacité de ce « Wuambushu 2 ».

Le

Paris : Question time to the Prime Minister Gabriel Attal
6min

Politique

100 jours à Matignon : « La stratégie Attal n’a pas tenu toutes ses promesses », analyse Benjamin Morel

Le Premier ministre marquera jeudi le passage de ces cent premiers jours au poste de chef du gouvernement. Si Gabriel Attal devait donner un nouveau souffle au deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron, sa stratégie n’est néanmoins pas payante car il « veut en faire trop sans s’investir fortement sur un sujet », selon Benjamin Morel, maître de conférences en droit public.

Le