Chasse : que proposent les prétendants à l’Elysée ?

Chasse : que proposent les prétendants à l’Elysée ?

Plusieurs candidats à la présidentielle étaient invités, ce mardi, devant le congrès national de la Fédération nationale des chasseurs pour un grand oral. Du fait de leurs positions anti chasse, Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon n’étaient pas conviés. D’autres n’ont pas répondu à l’invitation.
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Ces derniers mois plusieurs faits divers dramatiques ont fait entrer la question de la chasse dans la campagne présidentielle. Le succès d’une pétition en ligne sur la plateforme du Sénat, demandant l’interdiction de la chasse a même conduit la Haute assemblée à mettre en place une mission d’information sur la sécurisation de la pratique.

La sécurisation n’était pas au cœur du grand oral auquel certains candidats à la présidentielle étaient invités à passer devant le congrès de la Fédération nationale des chasseurs.

Jadot et Mélenchon « montent les Français les uns contre les autres », selon les chasseurs

Parmi les absents, Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon, n’ont tout simplement pas été invités en raison de leurs positions anti chasse. « Tout un chacun a le droit d’être critique vis-à-vis de la chasse […] Par contre, je refuse qu’on abîme la chasse et ses millions de pratiquants sous de faux prétextes électoralistes ou démagogiques, en omettant de rencontrer les principaux intéressés avant de demander la fin de la chasse dans les médias », a dénoncé Willy Schraen, le président de la Fédération nationale des chasseurs (FNC), accusant les deux candidats « de monter les Français les uns contre les autres ».

Pour Jadot et Mélenchon, interdiction de la chasse les week-ends et les vacances scolaires

Le candidat écologiste Jadot, « qualifié de principal opposant » par le président de la FNC, avait annoncé, à l’automne dernier, sa volonté d’interdire la chasse les week-ends et lors des vacances scolaires. Le candidat écologiste demande aussi l’interdiction de la chasse à courre, et autres « méthodes de chasse barbare », comme « la chasse à enclos ». S’il est élu Président, il mettra fin « à la délivrance du permis de chasse à vie » pour opter pour un renouvellement de ce permis tous les 5 ans.

Jean-Luc Mélenchon, également persona non grata à la fédération nationale des chasseurs, souhaite, lui aussi, la fin de la chasse les week-ends et pendant les vacances scolaires. Dans son programme « l’avenir en commun », le candidat LFI entend comme Yannick Jadot « interdire les pratiques de chasse de loisir cruelles pour les animaux (déterrage, chasses à courre, combats de coqs, spectacles incluant des animaux sauvages… ).

Anne Hidalgo refuse « le diktat de l’interdiction »

Il n’est pas fait mention de la chasse dans le programme de la candidate socialiste, Anne Hidalgo qui n’était pas présente, ni représentée devant la fédération des chasseurs. Néanmoins, selon Carole Delga la présidente de la région Occitanie, le PS se démarque de ses deux concurrents de gauche sur le sujet, en défendant « l’écologie du faire ». « Celle qui sait concilier économie et écologie, celle qui est dans l’accompagnement, et pas dans le diktat ou l’interdiction », avait expliqué en octobre dernier, Carole Delga sur France bleu.

La fin de l’interdiction des chasses dites traditionnelles est au cœur des préoccupations des chasseurs. Pour mémoire, par deux fois en 2021, le conseil d’Etat a suspendu des arrêtés du gouvernement autorisant la chasse aux grives, merles noirs, vanneaux, pluviers dorés, alouettes des champs, les jugeant contraire au droit européen.

Le RN défend les chasses traditionnelles

« Êtes-vous prêts à rétablir l’ensemble des chasses traditionnelles en France ? », demande Willy Schraen au premier intervenant de la journée, Paul-Henry Hansen-Catta, conseiller de Marine Le Pen sur les questions de ruralité. « Ça ne figurait pas dans la note qu’on m’a remise » confie le représentant de la candidate RN avant d’ajouter. « Si je suis là aujourd’hui, c’est parce que j’ai obtenu des garanties très fortes sur toutes les pratiques de chasse. Si l’une des pratiques de chasse faisait l’objet d’une prohibition au RN, je n’y aurais pas ma place ».

Paul-Henry Hansen-Catta a estimé que la prise en charge des dégâts de gibiers sur les cultures ne devait pas reposer uniquement sur les seuls chasseurs. « Des sources de financements peuvent s’imaginer via le second pilier de la PAC en concertation avec le monde agricole », a-t-il indiqué. Il ne s’est toutefois pas montré favorable à un grand ministère de la ruralité souhaité par les chasseurs, lui préférant une mission interministérielle.

Jean Lassalle veut faire de la campagne de France « une grande cause nationale »

Jean Lassalle est venu présenter « son expertise acquise d’un berger devenu député ». Une expérience qui lui fait dire qu’il ne veut pas d’ours, de lynx, de loups… dans nos pâturages ». Dans son projet, figure la défense « des traditions populaires et les pratiques ancestrales telles que la chasse et la pêche traditionnelles, qui font partie du patrimoine national ». S’il est élu président, il prendra « des libertés » avec les directives européennes qui réglementent la chasse et fera de « la campagne de France une grande cause nationale ».

Valérie Pécresse défend « toutes les chasses »

La candidate LR est venue accompagnée de « deux parrains » pour ce grand oral. Le président du Sénat, Gérard Larcher et le président du parti, Christian Jacob, deux fins connaisseurs du monde de la chasse. « Les trois quarts de l’Ile de France sont des terres agricoles, des espaces naturelles et des forêts », a rappelé la présidente de région.

Valérie Pécresse représentante « du parti de la transmission » a caressé les chasseurs dans le sens du poil, récoltant à plusieurs reprises des salves d’applaudissements de l’assistance. Parmi ces propositions, la création d’une « réserve écologique citoyenne » destinée à préserver la biodiversité dans les territoires, la prise en charge à 50 % par l’Etat des dégâts de gibiers, ou encore la préservation de tous les modes de chasse. « Pour moi défendre la chasse, c’est défendre toutes les chasses. Avec moi les savoir-faire ancestraux seront protégés. Je veux rendre leur dignité aux chasseurs », a-t-elle argué.

En ce sens, Valérie Pécresse entend « instaurer la reconnaissance du délit d’entrave ». « Avec moi, ce sera tolérance zéro pour les activistes qui se rendent coupables de dégradations ou de violation de propriété ». Comme le représentant du RN avant elle, la candidate LR a fustigé la suppression, sous le quinquennat du président sortant, de l’office national de la chasse et de la faune sauvage, remplacée en 2020 par l’office de la biodiversité. Valérie Pécresse présidente, la chasse sera sous la tutelle d’un grand ministère de la ruralité et de l’agriculture et les conflits entre écologistes et chasseurs seront arbitrés par le Premier ministre.

Éric Zemmour : « La chasse, une activité essentielle dans la gestion de notre espace rural »

Éric Zemmour a rappelé qu’il n’était « pas venu « pour emmerder les chasseurs ». Le candidat de Reconquête se classe parmi les défenseurs de la chasse « une richesse patrimoniale, culturelle, sociale et économique qui doit être préservée ». « C’est une activité essentielle dans la gestion de notre espace rural ».

Fustigeant « l’écologie d’extrême gauche », Éric Zemmour plaide pour la création d’un ministère de la ruralité, de l’agriculture, de l’environnement et de la chasse. Il demande, lui aussi, l’application ferme du délit d’entrave à la chasse ». « Le président sortant a connu bien des reniements. Emmanuel Macron a cédé aux association anti chasse », a-t-il pointé en référence aux interdictions, sous son mandat, des chasses traditionnelles. Comme Valérie Pécresse avant lui, la ligne directrice du projet d’Éric Zemmour consiste à « transmettre cet art de vivre », héritée de la Révolution française.

Fabien Roussel et la défense de « la chasse populaire »

Seul candidat de gauche présent à ce grand oral, Fabien Roussel entend se démarquer sur ce sujet. « Oui, il y a une gauche populaire qui fait le choix de défendre certaines valeurs ». Le candidat communiste a logiquement rappelé à son tour que la chasse faisait partie des acquis de la Révolution de 1789. « Parce qu’en abolissant le privilège seigneurial de la chasse, la Révolution française a posé les fondations d’une chasse populaire dans notre pays. Deux siècles et demi plus tard, nous voulons continuer à défendre une chasse populaire ».

Sur ce thème comme sur d’autres, Fabien Roussel n’hésite pas à égratigner ses camarades de gauche « aux propositions démagogiques qui veulent se payer les chasseurs à chaque accident dramatique ». Interdire, la chasse, les voitures, les sapins de noël… Bref interdire tout ce qui est populaire. Ils n’ont que ce mot-là à la bouche », a-t-il tancé provoquant une salve d’applaudissements dans la salle.

Soucieux de la sécurisation, le représentant du PCF souhaite quand même atteindre « l’objectif ambitieux, mais atteignable d’avoir zéro accident de chasse mortel ».

Sa proposition phare consiste à créer un « conseil national des usagers de la nature », « où chaque loisir, chaque pratique sportive sera représentée ». Il souhaite également encourager plus fortement le modèle associatif et fédéral de la chasse. Des mesures qui figureront dans un projet de loi pour une chasse durable et pour la protection de la biodiversité. Un texte que le ministère en charge de la ruralité, de la forêt de l’eau, de la biodiversité et des ressources naturelles, aura la charge de défendre.

En ce qui concerne la charge des dégâts des gros gibiers portée par les fédérations de chasseurs, Fabien Roussel propose un système public prenant en compte toutes les atteintes environnementales sur les productions agricoles, via un régime public d’assurance.

Marc Fesneau : « Nous ne sommes pas dans le camp des antispécistes »

Qui de mieux qu’un chasseur à l’arc pour venir défendre le bilan du président sortant ? Marc Fesneau, le ministre en charge des relations avec le Parlement et ancien président du groupe chasse à l’Assemblée nationale, s’en est chargé.

Mesure phare, du quinquennat Macron, la réduction de moitié du prix du permis de chasse, 200 euros par an au lieu de 400, destinée à la fois, à relever le défi démographique (un peu plus d’un million de chasseurs en France), et la défense d’une chasse populaire, a rappelé Marc Fesneau.

Devant les chasseurs, il a rappelé que son gouvernement faisait la distinction entre les hommes et les animaux. « Nous ne sommes pas dans le camp des antispécistes. Nous sommes dans le camp des humanistes.

La guerre en Ukraine a entraîné un surcoût pour les chasseurs dans la prise en charge des dégâts agricoles par les gibiers car le prix des denrées sert de barème d’indemnisation. « Depuis deux ans, le président a soutenu votre volonté de remettre à plat les négociations avec les organisations agricoles », a-t-il rappelé. L’évolution de l’indemnisation des dégâts de gibiers figure, à ce titre, dans le plan de résilience présenté par le Premier ministre, Jean Castex, la semaine dernière.

Marc Fesneau veut mettre un terme à « cette culture de cliquet qui consiste à ne plus toucher au statut d’une espèce quelle que soit sa dynamique » Pour ce faire, une négociation au niveau européen sera nécessaire. Pour rappel, l’UE fixe une liste d’espèces d’animaux protégés et ne devant donc pas être chassés.

Au sujet des chasses traditionnelles, « le président en est le défenseur ». « Elles sont conformes au droit et ne posent pas de problème au niveau de la biodiversité », a assuré le ministre. L’exécutif attend désormais le jugement sur le fond du Conseil d’Etat. « Dès qu’il sera connu. Nous reprendrons des arrêtés qui permettront de reprendre ces chasses dès la saison prochaine ». Marc Fesneau s’est opposé à l’idée de jour sans chasse, louant le principe « de la compréhension mutuelle » entre les usagers des forêts.

Parmi les autres candidats absents à ce grand oral devant les chasseurs. On notera que la candidate de Lutte Ouvrière, Nathalie Arthaud s’était prononcée en 2017 contre la chasse à courre, « un loisir cruel de riches oisifs en mal de distraction ». Quant à Philippe Poutou, le site « politique et animaux », relève que le candidat du NPA s’était prononcé en 2017 en faveur de l’instauration de dimanches sans chasse.

Enfin, le candidat de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan avait été interrogé, en octobre dernier, sur BFM TV au sujet de l’interdiction de la pratique de chasse le dimanche. « Les écolos nous emmerdent », avait-il répondu jugeant « leurs fixations obsessionnelles sur des sujets symboliques ».

 

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