Comment va s’organiser la majorité de Macron au Sénat

Comment va s’organiser la majorité de Macron au Sénat

Le sénateur François Patriat souhaite la création d’« un groupe de la majorité présidentielle » au Sénat, « une formule intelligente » qui respecterait l’identité de chacun. Mais les soutiens de Macron aux groupes RDSE et PS n’imaginent pas, pour l’essentiel, se fondre dans un nouveau groupe dans l’immédiat.
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Au Sénat, les soutiens d’Emmanuel Macron sont pour le moment éparpillés dans plusieurs groupes. Verra-t-on l’arrivée d’un nouveau groupe « République en marche » à la Haute assemblée ? Peut-être, mais pas tout de suite… C’est le sénateur François Patriat, l’un des premiers soutiens du nouveau Président au Sénat, qui a avancé cette idée hier soir sur BFM-TV : « Nous pouvons envisager, dans l’avenir, pas dans l’immédiat mais soit à la rentrée parlementaire, soit après les élections, d’organiser une force au Sénat ou un groupe au Sénat, ou un intergroupe au Sénat qui regrouperait l’ensemble des marcheurs, qu’ils soient socialistes, centristes, ou Républicains ». Nous évoquions l’hypothèse la semaine dernière, alors que le parti lancé par Emmanuel Macron devrait présenter des candidats partout aux sénatoriales.

Seuls 10 sénateurs suffisent pour constituer un groupe. Sur le papier, les forces sont là. Mais la réalité de la Haute assemblée complique pour le moment la création d’un tel groupe. Interrogé ce mercredi par Public Sénat, François Patriat semble un peu plus prudent. « Un groupe En marche, je ne pense pas. Mais un groupe de la majorité présidentielle, je le pense » affirme le sénateur de Côte-d’Or. « Aujourd’hui, il y a des marcheurs dans les tous les groupes, au PS, au groupe RDSE, chez les centristes, quelques-uns au groupe LR. Il est illusoire aujourd’hui de penser, dans le contexte d’avant législatives, de créer un groupe. Mais ce que nous avons proposé c’est de nous parler, de voir comment à l’avenir, organiser, après la rentrée parlementaire, après les élections de septembre – si elles ont lieu en septembre – une expression commune, une unité commune dans le soutien que nous allons apporter au gouvernement. Il ne s’agit pas de faire des mini-groupes » explique-t-il (voir la première vidéo, images de Cécile Sixou).

« On n’a pas défini la formule. Nous cherchons une maison commune »

« Le Sénat, ce n’est pas l’Assemblée nationale. Ici, il y a des sensibilités différentes, multiples, historiques. Le groupe RDSE est le groupe le plus vieux du Sénat, (…) on ne peut pas penser demain les noyer dans un groupe unique. Il faut trouver une formule intelligente pour soutenir le gouvernement », ajoute François Patriat, qui écarte aujourd’hui l’idée d’un intergroupe. « On n’a pas défini la formule. Nous cherchons une maison commune ».

Une prudence qui s’explique d’autant plus que Jacques Mézard, président du groupe RDSE (à majorité PRG), préférerait conserver son groupe. Le sénateur du Cantal soutient Emmanuel Macron, comme « 13 à 15 sénateurs sur les 17 que compte le groupe », selon un de ses membres. « Il y a deux options » selon le sénateur du groupe, Michel Amiel : « Ou le groupe RDSE, qui est le plus homogène dans son soutien à Macron, constitue un réceptacle pour tous ceux qui veulent s’associer à En marche, et pas seulement, en étant dans la continuité d’aujourd’hui, avec une grande liberté de ton. Deuxième option : que tous ceux qui seraient En marche se fondent dans un groupe La République en marche. Mais la première idée me paraîtrait pas mal ».

Didier Guillaume : « Pour l’instant, les membres du groupe PS ont décidé de rester ensemble »

Au groupe PS du Sénat, dont la majorité semble pourrait soutenir les textes d’Emmanuel Macron, tous ne sont pas prêts à laisser tomber la vieille maison socialiste. « Les socialistes qui sont membres d’En Marche prendront leur décision. Pour l’instant, les membres du groupe PS ont décidé de rester ensemble jusqu’aux législatives et nous verrons après » affirme au micron de Public Sénat le président du groupe PS, Didier Guillaume. Cependant, il « souhaite faire partie de cette majorité présidentielle. Il y a énormément de sénateurs dans ce cas-là ». Didier Guillaume appellera à ce titre « les sénateurs PS à voter pour » la déclaration de politique générale du futur premier ministre. Regardez :

Didier Guillaume : « Je souhaite faire partie de la majorité présidentielle ».
01:53

« Une majorité peut-être constituée à partir de plusieurs composantes »

Jean-Pierre Sueur fait partie de ces sénateurs PS Macron-compatibles. « Je partage beaucoup des idées d’Emmanuel Macron. (…) Il faut qu’il y ait une majorité qui soutienne Emmanuel Macron à l’Assemblée nationale et au Sénat ».

Jean-Pierre Sueur : « Une majorité peut-être constituée à partir de plusieurs composantes »
01:03

Mais « une majorité peut-être constituée à partir de plusieurs composantes. On a toujours vu ça dans l’histoire. C’est le cas dans plusieurs pays européens » ajoute le sénateur du Loiret, qui souligne que « les socialistes (du Sénat) sont pour l’essentiel tout à fait prêts à faire partie de la majorité présidentielle ».

Le sénateur PS Alain Richard va rejoindre En marche !

« A la base, 25-30 sénateurs PS sont derrière Emmanuel Macron. Mais ça grossit de jour au jour » selon le sénateur du groupe PS Yves Rome, qui a déjà rejoint En marche. Il pense qu’à terme « les deux tiers du groupe sinon les trois quart pourraient soutenir le Président ».

En attendant de plus grands ralliements, le nouveau parti présidentiel va connaître une nouvelle recrue. Le sénateur PS Alain Richard, ancien ministre de la Défense, compte rejoindre En Marche. Il avait soutenu Manuel Valls lors de la primaire.

A droite, on ne se presse pas non plus

A droite, on ne se presse pas pour rejoindre un potentiel groupe de la majorité présidentielle. 10 des 42 sénateurs du groupe UDI-UC avaient signé une tribune de soutien à Emmanuel Macron. On y trouve des UDI et des Modem. Le Modem de François Bayrou a de son côté passé un accord pour une alliance avec Macron. Autrement dit, le Modem ne se fond pas dans En marche. Il y aura donc un groupe Modem à l’Assemblée. Reste à savoir si au Sénat le groupe UDI sera coupé en deux. Car la formation de Jean-Christophe Lagarde a passé un accord avec les LR pour les législatives.

Au groupe LR, le premier – et le seul parlementaire pour le moment – à avoir rejoint Macron est l’ancien juppéiste Jean-Baptiste Lemoyne. Après le premier tour, la sénatrice LR Fabienne Keller, autre juppéiste, s’est dite ouverte à une coalition ou des majorités au cas par cas. « Nous avons discuté avec des collègues au sein du groupe LR sur notre approche. Comme toujours au Sénat, on sera très pragmatique avec une volonté de construire très partagée » explique la sénatrice du Bas-Rhin. Mais « un groupe n’a pas du tout été envisagé, nous souhaitons en tout cas nous inscrire dans une démarche constructive pour permettre l’adoption rapide de textes » explique Fabienne Keller, évoquant « l’emploi » et « les ordonnances qui permettront de simplifier le code du travail ».

« En marche, mais au pas de chacun »

Le sénateur LR Jean-Pierre Grand, qui avait été l’un des plus véhéments contre François Fillon lors des affaires, est dans le même état d’esprit. « Quand des textes viendront en discussion, je ne ferai pas partie des sénateurs qui auront un  comportement dogmatique. On aura le devoir d’avoir un comportement ouvert au seul intérêt général » soutient-il. D’ici là, il est urgent d’attendre. « On va laisser passer les législatives. On n’y voit pas très clair » constate le sénateur de l’Hérault. Jean-Pierre Grand ajoute :

« Je déteste qu’on me fasse marcher à un pas qui n’est pas le mien. En marche, mais au pas de chacun »…

« On est dans une période d’attente » résume Yves Rome, « tout le monde attend la nomination du premier ministre, des candidats aux législatives. Tout le monde est sur le mode pause. Mais on travaille activement à ce qu’il ait le maximum de soutiens ici au Sénat ».

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