Confinement à Dunkerque ? Pour les sénateurs du Nord, « c’est déjà trop tard »

Confinement à Dunkerque ? Pour les sénateurs du Nord, « c’est déjà trop tard »

Après les Alpes-Maritimes, le littoral dunkerquois pourrait bien connaître aussi un confinement local. Jean Castex vient de réclamer des « mesures supplémentaires de freinage » du virus dans la région et Olivier Véran est attendu demain sur place. De même, la situation en Moselle et depuis quelques jours en Ile de France, inquiète au plus au point.
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Par Antoine Comte

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Un confinement local à la niçoise ? C’est bien ce que les 200 000 résidents du bassin dunkerquois, voire les 2,6 millions d’habitants du département du Nord, pourraient vivre pour la toute première fois dans les prochains jours. La faute à un taux d’incidence très inquiétant, le plus élevé de France, avec 901 cas relevés hier à Dunkerque et ses environs, pour 100 000 habitants, contre 202 pour la moyenne nationale.

Jean Castex : « Des mesures supplémentaires » pour freiner virus

Alerté depuis plusieurs jours par Patrice Vergriete, le maire divers gauche de Dunkerque, le gouvernement tente depuis 24 heures de réagir. Après la confirmation hier par le préfet des Alpes-Maritimes de l’entrée en vigueur d’un confinement local pour les deux prochains week-ends avec une interdiction de se déplacer sur tout le littoral niçois du vendredi 18 heures au lundi 6 heures, Jean Castex vient de demander la mise en place de « mesures supplémentaires de freinage » de l’épidémie pour la sous-préfecture du Nord.

Le ministre de la Santé et des Solidarités Olivier Véran qui a échangé hier soir par téléphone avec le maire de la ville se rendra également sur place demain pour constater par lui-même la gravité de la situation. 90 % des cas de covid-19 actuellement enregistrés dans la région, proviendraient en effet du variant anglais, selon les derniers chiffres communiqués aux élus locaux.

Mais pour les sénateurs du département, le gouvernement prend la mesure de la situation dunkerquoise beaucoup trop tardivement, et certains accusent l’exécutif de « privilégier en priorité leurs amis politiques ».

Nice préférée à Dunkerque ?

« Ces mesures territoriales ne peuvent pas être prises à partir de critères politiques ou sur la base de relations personnelles. J’espère en tout cas que ce n’est pas le cas », peste le sénateur centriste du Nord Olivier Henno en faisait référence, sans le citer, au maire de Nice, Christian Estrosi qui n’a jamais caché sa proximité politique avec l’exécutif. « Je ne crois pas à l’argument au doigt mouillé de ceux qui disent que le gouvernement s’est soucié d’abord de la Côte d’Azur parce qu’il y a beaucoup plus de touristes là-bas en ce moment que chez nous. Des décisions de confinement local doivent être prises en fonction de critères rationnels, chiffrés et transparents… », ajoute-t-il.

Même interrogation du côté de sa collègue Valérie Létard. « Qu’est-ce qui fait que dans un territoire, on agit vite comme à Nice alors que dans d’autres, on attend comme à Dunkerque ? Espérons que le temps perdu n’aura pas de trop lourdes conséquences notamment économiques dans un territoire qui n’a pas vraiment besoin de ça avec un Eurostar déjà à l’arrêt en raison du Brexit, et un port autonome qui doit continuer à tourner », lance la sénatrice du groupe Union centriste.

Pour le sénateur nordiste Patrick Kanner, « le gouvernement fait la politique de l’autruche depuis des semaines et a encore une fois un train de retard ». « A force de ne pas écouter les élus qui sont de véritables lanceurs d’alerte sur le terrain, on se retrouve dans des situations quasi irréversibles. Il aurait fallu que le gouvernement intervienne dès que le maire de Dunkerque l’a alerté il y a trois semaines. Maintenant, c’est presque trop tard, le variant anglais commence à toucher la métropole lilloise », s’inquiète le président du groupe socialiste au Sénat, après avoir vu ce week-end de nombreux badauds sur les plages ensoleillées du littoral.

Un sentiment que partage également Dany Wattebled. « Nous observons un manque de réactivité et de concertation. Je suis favorable à un confinement local du littoral, mais confiner pour confiner ne sert pas à grand-chose, il faut surtout immuniser », réclame le sénateur du groupe Indépendants - République et Territoires.

La vaccination justement, c’est avant tout ce qui pose problème selon les représentants de la Haute assemblée dans les Hauts de France, et plus particulièrement dans le Nord.

Patrick Kanner : « Des régions ont dû nous prêter des doses de vaccins »

« J’ai alerté Olivier Véran dans une lettre il y a plusieurs semaines pour lui signaler que nous manquions cruellement de vaccins dans le Nord, et je n’ai toujours pas eu de réponse. Face à la pénurie de dose que nous subissons dans la région, j’ai même appris récemment que d’autres régions françaises moins touchées nous ont prêté des vaccins, qu’il faudra donc leur rendre quand la situation sera rétablie. Vous vous rendez compte où nous en sommes ? », râle Patrick Kanner.

Une situation problématique qui fait également rager Olivier Henno, favorable lui aussi à la mise en place « des mêmes mesures qu’à Nice pour éviter que les hôpitaux soient submergés ». Pour lui, Dunkerque est aujourd’hui victime du jacobinisme à la française. « La centralisation depuis Paris des décisions, reste la marque de fabrique de la gestion de la crise sanitaire par ce gouvernement. Ce n’est pas possible que pour chaque décision touchant au local, nous soyons à chaque fois obligés de passer par un Conseil de défense et la visite d’un ministre sur place. Il faut déléguer les responsabilités aux préfets et aux élus locaux, sinon nous aurons à chaque fois ce retard très préjudiciable à l’allumage », tacle l’élu du Nord.

Confinements locaux ou reconfinement national ?

La région de Dunkerque pourrait donc bien se retrouver logée à la même enseigne que les Alpes Maritimes très prochainement.

Tout comme la Moselle qui inquiète toujours autant son voisin allemand (lire ici). Avec un taux d’incidence actuel de 315 cas pour 100 000 habitants, le département transfrontalier est sous la surveillance de Berlin qui n’a toujours pas pris de décision quant à une potentielle fermeture de ses frontières avec la France. Trois régions suivies de très près par le gouvernement et les autorités politiques et de santé locales auxquelles pourrait également s’ajouter l’Ile de France qui est en passe de dépasser les 300 cas dans l’ensemble de ses départements.

« Ce qui serait terrible, c’est qu'on arrive à un reconfinement général uniquement parce qu’on a tardé à prendre les bonnes mesures localement comme à Dunkerque », craint la sénatrice Valérie Létard.

« Une semaine de tous les dangers » donc, selon une source gouvernementale, durant laquelle l’exécutif va continuer à consulter à tout va, pour savoir s’il serait préférable d’opter pour des confinements locaux dans les zones les plus touchées, ou s’il devient inévitable de reconfiner tout le pays pour la troisième fois. Le Conseil de défense prévu demain devrait permettre au chef de l’Etat de trancher, avant des annonces officielles qui pourraient intervenir ce week-end.

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