Constitutionnalisation de l’IVG : « Pour toute révision de la Constitution, c’est l’article 89 », rappelle Laurent Fabius

Constitutionnalisation de l’IVG : « Pour toute révision de la Constitution, c’est l’article 89 », rappelle Laurent Fabius

Invité de notre matinale, Laurent Fabius est revenu sur les propositions de loi de constitutionnalisation du droit à l’avortement déposées au Parlement. Le président du Conseil constitutionnel a simplement rappelé que l’utilisation de l’article 11 était exclue, et qu’une révision constitutionnelle devait impérativement se faire par l’article 89, et nécessitait donc un accord des deux chambres du Parlement.
Louis Mollier-Sabet

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Difficile pour le Président du Conseil constitutionnel de prendre clairement position sur les affaires du moment, comme la mise en examen d’Éric Dupond-Moretti. Sur le recul des droits d’accès à l’IVG dans le monde, en revanche, Laurent Fabius se mouille un petit peu, notamment pour tirer des leçons du revirement de jurisprudence de la Cour Suprême américaine : « Sur la Cour Suprême américaine, la décision a pu choquer dans le monde. Cela montre que lorsque l’on nomme des juges pour des raisons idéologiques, et qu’on les nomme à vie, cela a un certain nombre de conséquences. » Dans le contexte français, plusieurs propositions de loi de constitutionnalisation du droit à l’avortement ont fleuri au Parlement, dont une au Sénat déposée par la sénatrice écologiste Mélanie Vogel.

« Si on veut réviser la Constitution, il y a une procédure qui s’appelle l’article 89, et pas une autre »

Sur le fond, Laurent Fabius ne semble pas porter d’opposition de principe, mais sur la forme, le président du Conseil constitutionnel rappelle un élément de procédure qui a son importance : « Dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel il y a une protection tout à fait légitime des droits de la femme. Si on veut réviser la Constitution, il y a une procédure qui s’appelle l’article 89, et pas une autre. » Si cette précision a cette importance, c’est que la procédure de révision constitutionnelle fait débat depuis l’utilisation de l’article 11 par le général de Gaulle pour déclencher un référendum sur l’élection du Président de la République au suffrage universel direct. D’autant plus que la question s’est invitée dans la campagne présidentielle, puisque l’utilisation de l’article 11 de la Constitution pour réformer la Constitution a été mise sur la table par Marine Le Pen.

La précision du président du Conseil constitutionnel est donc d’importance, parce que pour enclencher une révision par l’article 89, il faut que l’Assemblée nationale et le Sénat votent dans les mêmes termes un projet ou une proposition de loi constitutionnelle, puis le Président de la République décide si le texte doit être adopté par 3/5 du Parlement réuni en Congrès ou par référendum. À noter qu’en l’occurrence, une éventuelle proposition de loi constitutionnelle ne pourrait être adoptée que par référendum. L’article 11 permet en revanche au Président de la République de déclencher un référendum législatif sur « sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent. » La grande différence est qu’un accord entre les deux chambres n’est donc pas nécessaire. Laurent Fabius annonce donc clairement que le Conseil constitutionnel s’opposerait à toute utilisation de cet article 11 pour des réformes constitutionnelles, comme l’avait fait de Gaulle en 1962.

Lutte contre les violences sexistes et sexuelles et Etat de droit : « C’est très compliqué comme problème »

Garant de l’Etat de droit, Laurent Fabius a aussi été interrogé sur les polémiques récentes autour des cellules de lutte contre les violences sexistes et sexuelles mises en place par les partis politiques, et notamment autour de l’affaire Bayou. « C’est très compliqué comme problème », concède Laurent Fabius, qui s’est contenté de poser les données dudit « problème » : « Vous avez trois principes qui sont également respectables, mais difficiles à concilier. Il faut lutter contre les atteintes sexistes et sexuelles, la justice est rendue par les juges et la présomption d’innocence. Quand vous mettez tout ça ensemble, cela aboutit à l’embardée que l’on connaît aujourd’hui. »

Ce type de sujets pourra être discuté lors de la « Nuit du droit » organisée par le Conseil constitutionnel ce mardi soir dans plus de 150 lieux.

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