Début 2018, la croissance maintient son rythme mais les impôts augmentent

Début 2018, la croissance maintient son rythme mais les impôts augmentent

L’Insee a encore relevé son estimation de croissance du PIB pour 2017 et prévoit une poursuite du rythme pour 2018. Mais l’Institut anticipe également une hausse des prélèvements obligatoires et un maintien du chômage à un niveau élevé.
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Par Guillaume Jacquot (Sujet vidéo : Cécile Sixou)

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L’embellie économique en France se poursuit. Les bons chiffres de la croissance pour 2017 se renforcent et devraient se prolonger au moins pendant les premiers mois de 2018. Mardi, l’Insee a relevé, pour la deuxième fois en six mois, sa prévision de progression du produit intérieur brut français à 1,9%, un niveau jamais atteint depuis 2011 (2,1% atteints).

La prévision de l’Insee se révèle même être plus optimiste que celle du ministère de l’Économie, qui s’attend à un chiffre « autour de 1,8% », ou d’autres institutions comme la Banque de France ou encore la Commission européenne.

L’économie française devrait même poursuivre sur cette lancée l’an prochain. La dernière note de conjoncture de l’Institut national s’attend à une hausse de 0,5% au premier trimestre, et de 0,4% au deuxième.

Le sujet est désormais de savoir « si le pays va maintenir cette cadence »

« C’est une croissance qui est essentiellement tirée par l’investissement : un peu l’investissement des ménages dans le logement, mais surtout l’investissement des entreprises », nous explique Alexandre Vincent, économiste à Coe-Rexecode, qui anticipe également un scénario d’un maintien du rythme de cette croissance pour le premier semestre 2018. « On table sur des perspectives de croissance qui resteront bien dynamiques, en partie grâce ce moteur-là ».

Même si la profitabilité des entreprises s’est améliorée ces dernières années, il se montre prudent sur l’ampleur de cette progression. « On observe quelques tensions en matière de trésorerie qui pourraient peut-être modérer un peu cette allure de l’investissement », relève Alexandre Vincent. « Le sujet n’est plus de savoir si la reprise est là, mais si le pays va maintenir la cadence ».

Reste que beaucoup de signaux sont au vert selon l’Insee en cette année 2017 : production en hausse dans l’industrie comme dans les services, remontée des exportations, reprise du tourisme, et surtout, le climat des affaires, au plus haut depuis début 2008.

Cette bonne conjoncture économique aura cependant des effets limités sur l’emploi. Le taux de chômage, qui était encore à 9,7% au 3e trimestre 2017, ne devrait reculer que légèrement, pour revenir à 9,4% à la mi-2018.

« Est-ce que le gouvernement fait en sorte que cette croissance puisse amener davantage d’emplois ? Je ne le crois pas du tout », a réagi le sénateur (PS) Rémi Féraud dans Sénat 360. « La suppression des emplois aidés est une mauvaise mesure […] Il faut profiter de cette croissance pour lutter contre le chômage », a-t-il ajouté.

« Il faut profiter de cette croissance pour lutter contre le chômage », déclare Rémi Féraud (PS)
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L’Insee note d’ailleurs que 38% des entreprises déclarent avoir des difficultés dans leurs recrutements, un niveau qui n’avait plus été observé depuis 10 ans. « Il y a sans doute un problème structurel sur lequel on bute : est-ce que la main d’œuvre a reçu les qualifications qui lui permet d’être en adéquation avec l’économie d’aujourd’hui ? C’est l’un des sujets un peu préoccupants », s’interroge l’économiste de Coe-Rexecode.

« L’effet calendrier » sur les impôts des ménages

Autre point d’inquiétude soulevé par cette note : l’impact des réformes fiscales sur le pouvoir d’achat des ménages. L’Insee indique qu’en moyenne sur l’année 2018, « les prélèvements obligatoires sur les ménages augmenteraient légèrement, notamment sous l’effet de la fiscalité indirecte ». L’Insee comptabilise 4,5 milliards d’euros d’impôts supplémentaires sur les ménages sur l’ensemble de l’année 2018 et explique ce chiffre notamment avec l’ « effet de calendrier » fiscal.

Concrètement, les mesures défavorables au pouvoir d’achat, comme la hausse de 1,7 point de la CSG et la hausse de la fiscalité sur le tabac et les carburants, interviendront majoritairement dès le début de l’année. Ce qui ne sera pas le cas de l’essentiel des mesures favorables au pouvoir d’achat. Les exonérations de cotisations pour l’assurance chômage des salariés du privé interviendront en deux temps (1,45 point au 1er janvier 2018 puis 0,95 point au 1er octobre).

Quant à la taxe d’habitation, censée profiter également à d’autres catégories que les salariés du privé, le premier tiers du dégrèvement ne sera visible qu’au mois de novembre, au moment du règlement de l’impôt. La plupart des foyers n’étant pas mensualisés.

L’opposition, à gauche comme à droite, n’a pas manqué de relever ces chiffres. « Comme quoi, il y a les discours… et la réalité », a tweeté le coordinateur national du Parti socialiste Rachid Temal.

Pour le rapporteur général du budget (LR), Albéric de Montgolfier, cette croissance « va sans doute amener un regain de recettes fiscales » mais « il ne faudrait pas » qu’elle ne conduise le gouvernement à « relâcher les efforts ». Le « taux de prélèvements obligatoires » est « encore élevé », rappelle le sénateur.

« Il ne faudrait pas relâcher les efforts » après les bons chiffres de la croissance, rappelle Pour Albéric de Montgolfier (LR)
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Les conclusions de la note n’ont pas été du goût d’Amélie de Montchalin, la référente (LREM) de la commission des Finances à l’Assemblée nationale, qui s’en est émue ce matin dans notre émission « Territoires d’Infos ». « Ce sont des chiffres qui sont hyper agrégés, qui ne parlent pas de ce que vivent les Français », a tempéré la députée de l’Essonne. « Ces chiffres ne prennent pas en compte le fait qu’on compense les fonctionnaires » sur la hausse de la CSG, selon elle.

« L’INSEE décrit un monde qui n’est pas celui dans lequel les Français vivent » pour Amélie de Montchalin
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Dans le même temps, l’Insee s’attend à un ralentissement de la consommation des ménages. Celle-ci ne devrait progresser que de  0,3 % par trimestre lors de la première moitié de 2018, alors qu’elle avait augmenté de 0,6 % au 3e trimestre 2017.

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