Déconfinement : en Ile-de-France, ce sera «long et compliqué»

Déconfinement : en Ile-de-France, ce sera «long et compliqué»

Pour la région la plus peuplée de France, le chantier du déconfinement est colossal. Bon nombre d’élus franciliens regrettent un calendrier « intenable ».
Public Sénat

Par Sandra Cerqueira

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Avec l’Ile-de-France et Paris en zone rouge, le déconfinement s’annonce «  long et compliqué et la situation ne va pas s’améliorer de sitôt » constate André Gattolin, sénateur des Hauts-de-Seine. « Il y a encore 45 décès pour 100 000 habitants. Le Covid-19 y circule beaucoup. C’est nécessaire de déconfiner mais il nous faut des garanties. Je comprends les craintes des élus concernés. »

Un calendrier «  à marche forcée »

Ces craintes, 316 maires d’Ile-de-France les ont détaillées dans une lettre ouverte qui évoque les difficultés auxquelles sont confrontés les élus locaux : « La préparation du déconfinement se fait dans un calendrier à marche forcée, alors que nous n'avons pas encore toutes les informations pour préparer la population, et que les directives sont mouvantes », déclarent les signataires.

En déplacement aujourd’hui dans une école de Poissy, Emmanuel Macron plaide pour un retour en classe « progressif et concerté. » «  Il a fallu qu’on lui demande pour que le discours change. On attend désormais qu’il passe des paroles aux actes ! » constate Jacques JP Martin, le vice-président de l'AMIF (Association des maires d'Île-de-France). «  Tout ça ne s’improvise pas, nous sommes face à un manque de personnel. Le calendrier est intenable et irréaliste. »

La réouverture des écoles : « Une usine à gaz »

Signataire de la tribune, la maire de Chanteloup-les-Vignes, assure qu’« il fallait remettre les pendules à l’heure » face à l’impréparation de l’Etat concernant la réouverture des écoles. «  On nous a donné la date du 11 mai sans s’assurer que sur le terrain çà allait être possible, sans en discuter en amont avec les personnes concernées. On en apprend plus par la presse que par l’Etat ! » regrette la maire.

A moins d’une semaine du déconfinement, les incertitudes sont nombreuses. La mairie n’a pas encore idée du nombre d’enseignants disponibles, du nombre d'animateurs présents pour le périscolaire, ni même des effectifs des élèves à accueillir.  « On doit monter une usine à gaz dans le flou le plus total ! » s’insurge la maire qui dit avoir reçu le protocole sanitaire à appliquer lundi 5 mai à 14 heures. «  53 pages, et rien ne s’est fait en concertation ! Les délais sont trop courts ! »

A Chanteloup-les-Vignes, comme dans beaucoup d’autres villes, on veut que la réouverture des écoles profite aux élèves les plus en difficulté. «  On appelle le gouvernement à prioriser clairement les enfants qui devront reprendre le chemin de l'école en Île-de-France en tenant compte du contexte familial de chaque enfant. Si on loupe cette cible, on aura échoué…Pour l’instant ce n’est pourtant pas ce qui se profile » explique la maire. D’après les retours des enseignants de la ville, les parents des élèves les plus fragiles n’envisagent pourtant pas de remettre leurs enfants à l’école.

A Paris, seuls 15 % des élèves pourront être admis avec pas plus d’une dizaine d’élèves par classe. Anne Hidalgo avait, comme 328 autres élus d’Ile-de-France, « demandé à ce que la rentrée soit repoussée, pour éviter l’improvisation. L’Etat n’a accepté de la différer que jusqu’au 14 mai » explique Remi Féraud, sénateur de Paris.

« Plus de moyens là où c’est rouge »

« Différencier davantage les zones rouges et vertes aurait pourtant été nécessaire » assure Bernard Jomier, sénateur de Paris. A l’heure actuelle, « seule la date du 18 mai pour une réouverture des collèges et des parcs différencie les différentes zones, ce n’est pas raisonnable. » Le sénateur appelle l’Etat à mettre plus de moyens là où le virus circule davantage, en mettant en place des directives claires : « Avec un déconfinement plus progressif, un dépistage plus massif là où c’est rouge pour éviter un nombre de recontaminations trop important et une deuxième vague. »

Des moyens «  insuffisants qui ne permettent pas d’assurer la protection des Français » estime Rachid Temal.  A moins d’une semaine de la fin du confinement, le sénateur du Val-d’Oise s’interroge : « On est incapable de dire si tous les Français pourront être dotés de masques et on ne sait pas où se trouvent les 700 000 tests annoncés par le gouvernement. »

Faciliter les déplacements à vélo

L’autre point noir du déconfinement en Ile-de-France, c’est l’usage des transports en commun. Comment faire en sorte que la promiscuité n’engendre pas de risques de contamination ?  Pour éviter le retour massif des voitures, la Mairie de Paris veut faciliter les déplacements des vélos et des piétons, en réaménageant la voirie. « Cinquante kilomètres de voies, d’habitude réservées aux voitures, seront consacrées aux vélos » précise Rémi Féraud.

«  Il faut combiner télétravail et massification du vélo, étaler aussi les arrivées et les sorties des entreprises. Le nombre de places dans les parkings relais aux portes de Paris va être doublé. Une trentaine de rues supplémentaires seront réservées aux piétons.

Une charte en cours de négociation

La présidente de la région, Valérie Pécresse négocie actuellement une charte pour tenter de limiter et de lisser dans la journée l’usage des transports à partir du 11 mai. Elle réclame l’aide de 5000 personnes pour fluidifier et contrôler les accès. « Ce seront les forces de sécurité et les associations type Croix-Rouge qui seront sollicitées mais y aura-t-il assez de monde disponible ? Sachant qu’on ne sait toujours pas à quoi vont ressembler les brigades de dépistage. » s’interroge encore le sénateur Rachid Temal.

Pour Philippe Dominati, sénateur de Paris, si «  tout est plus compliqué » en Ile-de-France, c’est à cause de la multiplication des structures, le tout sous tutelle de l’Etat. «  On le voit avec les masques, tout le monde en a commandés, la Région, le Département, les communes. N’aurait-on pas pu en optimiser la gestion et la distribution ? 

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