Elections départementales : les enjeux du scrutin par parti

Elections départementales : les enjeux du scrutin par parti

Pour les élections départementales, qui ont lieu en même temps que les régionales dimanche, la droite, qui avait raflé la mise en 2015, espère profiter de la prime aux sortants. Le PS compte se refaire une santé, quand LREM n’espère rien, tant son implantation locale est faible. Malgré ses scores importants aux élections nationales, le RN n’a que de maigres espoirs. Le PCF, lui, tente de garder son unique département.
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Les régionales concentrent l’attention, mais les Français sont aussi appelés les 20 et 27 juin à renouveler leurs assemblées départementales. Scrutin moins médiatique, les départements n’en ont pas moins des missions de proximité importantes : ils gèrent les collèges, les routes départementales. Sur le plan de la solidarité, c’est le RSA, le handicap, l’allocation personnalisée d’autonomie pour les personnes âgées, l’aide sociale à l’enfance et la question des mineurs étrangers isolés.

Au plan politique, être à la tête d’un département est synonyme d’une bonne implantation locale. Indispensable pour briller ensuite aux municipales puis aux sénatoriales, dont les grands électeurs sont composés des élus locaux.

LR mise sur la prime aux sortants pour conserver sa bonne implantation dans les départements

A droite, on semble aborder les départementales dans de meilleures conditions que les régionales, où une partie de LR s’est retrouvée en tenaille ou tiraillée entre LREM et le RN. La droite détient aujourd’hui la majorité des départements. Il faut dire que LR avait bénéficié d’une vague bleue en 2015, prenant 29 départements à la gauche. La droite dirige 62 des 101 départements, dont 32 rien que pour les LR, une dizaine pour l’UDI et le reste pour des divers droite. LR compte beaucoup sur la prime aux sortants, surtout dans une élection où la participation s’annonce faible.

« On peut perdre quelques départements, deux ou trois », comme nous l’expliquait le sénateur LR Jérôme Bascher, s’appuyant sur des projections réalisées au Sénat. Mais la droite a quelques espoirs de conquête, comme le Val-de-Marne, qu’elle espère prendre au Parti communiste, ou même la Seine-Saint-Denis avec le sénateur Philippe Dallier, même si la victoire s’annonce difficile.

La droite peut espérer aussi récupérer la Loire-Atlantique, qui n’est détenue par la gauche qu’avec deux sièges d’avance. En Haute-Saône, le sénateur LR Alain Joyandet tentera de ravir le département à Yves Krattinger, lui-même ancien sénateur PS, proche du camp macroniste.

Dans certains cas, la droite peut pâtir de ses divisions. Ainsi, si l’UDI est avec LR dans certains territoires, ce n’est pas partout l’union. Le président sortant de la Seine-et-Marne, l’UDI Patrick Septiers, est menacé par le député LR Jean-François Parigi, ancien bras droit de Jean-François Copé à la mairie de Meaux.

Le PS et la gauche partent à la reconquête des départements perdus en 2015

A gauche, le scrutin de 2015 avait marqué un recul. Après les conquêtes territoriales, qui avaient précédé la victoire de François Hollande en 2012, la gauche au pouvoir avait commencé à perdre des plumes aux départementales. Symboliquement, la Corrèze, département de l’ancien Président, avait été perdue.

De la même manière que les victoires des années 2000 avaient été les premières briques de celle de 2012, le PS veut faire de la « reconquête territoriale un élément déterminant de la reconstruction du PS », avait expliqué au Monde Pierre Jouvet, porte-parole du PS. Il ne s’agit plus ici de gagner mais de se refaire une santé. Pour y parvenir, rien de tel que l’union. Le PS, les écologistes et les communistes ont ainsi réussi à partir groupés dans 71 départements, dont 15 avec La France Insoumise également.

Dans la fourchette haute, les socialistes espèrent un gain de 10 départements. Mais il serait plus réaliste d’en viser « 4 ou 5 », nous expliquait Patrick Kanner, président du groupe PS du Sénat. Après avoir perdu le Nord en 2015, terre historiquement à gauche, le PS espère reprendre le département à la faveur d’une droite divisée. Le sortant ex-LR Jean-René Lecerf, qui s’était rapproché de LREM, ne se représente pas. Son dauphin fait face à la sénatrice UDI Valérie Létard, qui a le soutien de LR. Une situation dont la gauche espère tirer profit. Dans le collimateur également : récupérer les Bouches-du-Rhône, ainsi que la Seine-Maritime, ou encore les Côtes d’Armor, la Drôme, l’Allier ou la Charente et la Creuse, qui étaient passés à droite de peu.

LREM : un scrutin difficile, conséquence d’une implantation locale très faible

Pour le parti présidentiel, les départementales s’annoncent un peu comme un mauvais moment à passer. LREM a intégré depuis longtemps le fait qu’elle ne pourra pas briller dans cette élection, qui lui rappelle son manque cruel d’implantation locale. Dans ces conditions, pas de miracle, les perspectives de victoires s’annoncent faibles, voire nulles.

« Il faut jouer ces élections intermédiaires, sans se planquer », mais « humblement », expliquait à publicsenat.fr Stanislas Guerini, numéro 1 de LREM. Le parti a choisi de faire « de la dentelle, canton par canton », en assumant une stratégie d’alliance à « géométrie variable », tournée vers la droite mais aussi la gauche, selon les cantons.

LREM n’a aujourd’hui que deux départements, dont les présidents ont été élus sous une autre couleur politique. C’est le cas de Jean-Yves Gouttebel, dans le Puy-de-Dôme, élu à gauche et aujourd’hui LREM. Mais il ne se représente pas et la gauche pourrait reprendre la collectivité. Globalement, « l’objectif est d’avoir des élus et aussi de mettre le pied à l’étrier à des jeunes qui vont se présenter pour la première fois », nous expliquait Jean-Yves Gouttebel.

Le département des Pyrénées-Atlantiques, détenues Jean-Jacques Lasserre, membre du MoDem, parti allié de LREM, pourrait être conservé. En Seine-Maritime, Bertrand Bellanger, divers droite proche de LREM, espère garder son fauteuil de président, que la gauche aimerait récupérer.

Pour le RN, quelques victoires envisageables à la marge

Les élections locales n’ont jamais réussi – jusqu’ici – à l’extrême droite. Manque d’implantation, thématiques moins porteuses que les sujets nationaux, candidatures manquant parfois de sérieux… Les explications sont multiples. Mais petit à petit, on le voit aux municipales, le Rassemblement national gagne du terrain. Ses gros scores aux scrutins nationaux ne devraient cependant, une fois encore, difficilement se concrétiser pour ces départementales.

Le parti de Marine Le Pen caresse quand même quelques espoirs de conquêtes, notamment dans le Vaucluse, à l’image des chances de victoires de Thierry Mariani pour les régionales en PACA. Dans l’Aisne, le RN devrait là aussi affoler les compteurs dans certains cantons. En 2017, Marine Le Pen y a réalisé son plus gros score, avec 35,67 % des voix. Rebelote lors des Européennes de 2019, avec 39,87 %. Le Gard est à surveiller aussi, comme les Pyrénées-Orientales, où Louis Aliot avait remporté les législatives en 2017, puis les municipales à Perpignan. Reste à voir si le parti ne va pas se retrouver à nouveau confronté au « plafond de verre » qui l’empêche de l’emporter jusqu’ici. Mais le RN pourrait donner des sueurs froides à la direction de LR, si certains élus de droite sont tentés de briser les digues entre droite et extrême droite en vue du second tour.

Le PCF espère sauver le Val-de-Marne, son dernier département

C’est le dernier bastion départemental des communistes. Le Val-de-Marne. Tel le village gaulois, il résiste. Jusqu’à quand ? Les LR espèrent que le scrutin de 2021 sera le bon, surtout après les victoires aux municipales à Champigny-sur-Marne, Choisy-le-Roi, Valenton ou Villeneuve-Saint-Georges. Une prise de guerre qui serait historique. Le PCF, qui avait perdu l’Allier en 2015, déjà face à la droite, à deux sièges près, espère malgré tout conserver le département. A sa tête, Christian Favier, ancien sénateur, dirige le Val-de-Marne depuis 2001, soit vingt ans.

Les communistes mettent en avant leur « bouclier de protection » sociale et environnementale. « Le Val de Marne essaye de protéger les populations contre la politique nationale qui aggrave leurs conditions de vie. Par exemple, c’est un département qui est en pointe sur les crèches publiques. Il va y avoir un plan de création de 500 nouvelles places en crèche. Pareil sur la prévention bucco-dentaire. C’est le département où il y a le plus faible taux de caries », met en avant la sénatrice communiste du département, Laurence Cohen, interrogée par publicsenat.fr. Comme partout, tout dépendra de la mobilisation différentielle. Le camp qui gagnera sera aussi celui dont les électeurs iront aux urnes.

 

Sur le sujet, lire aussi notre article « Elections départementales 2021 : qui sont les sénateurs candidats ? »

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