En Alsace renaît l’espoir d’une région unie sur le modèle corse

En Alsace renaît l’espoir d’une région unie sur le modèle corse

Deux ans après la fusion très contestée de l'Alsace avec la Lorraine et Champagne-Ardenne, la "réflexion sur l'avenir" de l'Alsace lancée par...
Public Sénat

Par Laurent GESLIN

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Deux ans après la fusion très contestée de l'Alsace avec la Lorraine et Champagne-Ardenne, la "réflexion sur l'avenir" de l'Alsace lancée par Matignon ouvre un nouvel horizon pour ceux qui réclament une collectivité s'inspirant de la Corse.

La décision du Premier ministre Edouard Philippe, annoncée début février de missionner le préfet alsacien Jean-Luc Marx pour étudier l'éventualité d'une fusion du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, est perçue comme un premier signe positif dans cette région de près de 2 millions d'habitants ancrée à droite et qui continue d'afficher son vif désamour de la région "Grand Est".

Au lendemain de l'annonce de Matignon, 130 élus alsaciens LR, UDI, LREM et membres de la société civile ont signé une déclaration "Cap vers l'Alsace!" et lancé un appel pour "une collectivité territoriale d'Alsace à statut particulier", dotée de compétences d’Etat, notamment en matière d'enseignement linguistique, économie, tourisme, formation professionnelle, bilinguisme.

Le député Eric Straumann à Paris le 9 juillet 2014
Le député Eric Straumann à Paris le 9 juillet 2014
AFP/Archives

"La population n'a pas accepté ce Grand Est", rappelle le député LR de Colmar, Eric Straumann, interrogé par l'AFP, l'un des plus farouches opposants à la réforme Hollande. "J'entends régulièrement des gens qui me disent qu'ils sont insatisfaits de cette évolution institutionnelle qui s'est faite sans leur avis et de manière anti-démocratique", insiste l'élu haut-rhinois.

Le préfet, qui doit rendre un rapport au printemps, a été chargé de "mener des réflexions sur cette question" avec une condition: la mission devra plancher "sans remettre en cause la région Grand Est", écartant ainsi l'hypothèse d'une renaissance de la région Alsace.

- 'Un message gaullien' -

Alors que Manuel Valls affirmait de façon péremptoire en octobre 2014 à l'assemblée nationale "qu'il n'y a pas de peuple alsacien", Edouard Philippe a envoyé un "message de style gaullien: Je vous ai compris!. Reste à savoir ce qu'il y aura derrière", fait remarquer Eric Straumann, favorable "à une Alsace unie" rassemblant les départements et la Région.

Cette mission est un "premier coup de canif dans le sac du Grand Est" et "une prise de conscience au sommet de l'Etat, qu'il y a un problème alsacien", se félicite-t-il mais "si on ne fait rien, on va se réveiller en France un matin, comme on s'est réveillé après les dernières élections en Corse!".

Edouard Philippe à Matigon, Paris, le 9 février 2018
Edouard Philippe à Matigon, Paris, le 9 février 2018
AFP/Archives

Sur l'Ile de Beauté, les élections territoriales de décembre ont été largement remportées par la coalition des nationalistes qui a obtenu le contrôle de la nouvelle collectivité territoriale qui remplace les conseils départementaux et la région.

"Si la fusion des deux départements est possible, il faut la faire, d’autant qu’il y a une majorité pour cela", plaide le maire socialiste de Strasbourg Roland Ries cité dans le quotidien les DNA.

Chez les autonomistes alsaciens on se réjouit que "le problème alsacien soit pris en compte". "84% des Alsaciens sont mécontents de la fusion" rappelle la présidente du parti Unser Land, Andrée Munchenbach citant un sondage CSA.

Fort de ses 15% aux départementales de 2015, Unser Land continue de réclamer "une collectivité à statut particulier" avec des compétences de l'Etat en matière d'enseignement de l'allemand et de l'alsacien. "Les Corses demandent d'être une collectivité à statut particulier. Le même argument est valable pour l'Alsace au titre de notre singularité rhénane", souligne Mme Munchenbach.

- L'Alsace n'est pas la Catalogne -

Pour le politologue Richard Kleinschmager, ce nouvel épisode réveille "la revendication alsacienne, complexe et multiforme où s'expriment des courants et revendications séparatistes voire identitaires". Elles avaient échoué en avril 2013 lorsque la population consultée par référendum avait rejeté la fusion du "67" avec le "68".

Sur le papier, la marge de manoeuvre du préfet alsacien semble ténue: "On ne voit pas bien comment l'évolution vers une remise en place d'une région Alsace indépendante de plein exercice pourrait se faire." "La situation n'est pas comparable à la Corse, ni à la Catalogne. On est loin du compte", fait remarquer le politologue.

Dans la même thématique

Turin – Marifiori Automotive Park 2003, Italy – 10 Apr 2024
6min

Politique

Au Sénat, la rémunération de 36,5 millions d’euros de Carlos Tavares fait grincer des dents. La gauche veut légiférer.

Les actionnaires de Stellantis ont validé mardi 16 avril une rémunération annuelle à hauteur de 36,5 millions d’euros pour le directeur général de l’entreprise Carlos Tavares. Si les sénateurs de tous bords s’émeuvent d’un montant démesuré, la gauche souhaite légiférer pour limiter les écarts de salaires dans l’entreprise.

Le

Operation Wuambushu a Mayotte : Demolition en cours d’un vaste bidonville – Operation Wuambushu in Mayotte: Ongoing demolition of a vast slum
8min

Politique

« Mayotte place nette » : « La première opération était de la communication et la deuxième sera de la communication », dénonce le sénateur Saïd Omar Oili

Le gouvernement a annoncé ce mardi 16 avril le lancement du dispositif « Mayotte place nette », un an après le maigre bilan de l’opération baptisée « Wuambushu ». Saïd Omar Oili, sénateur de Mayotte, regrette le manque de communication du gouvernement avec les élus du département et met en doute l’efficacité de ce « Wuambushu 2 ».

Le

Paris : Question time to the Prime Minister Gabriel Attal
6min

Politique

100 jours à Matignon : « La stratégie Attal n’a pas tenu toutes ses promesses », analyse Benjamin Morel

Le Premier ministre marquera jeudi le passage de ces cent premiers jours au poste de chef du gouvernement. Si Gabriel Attal devait donner un nouveau souffle au deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron, sa stratégie n’est néanmoins pas payante car il « veut en faire trop sans s’investir fortement sur un sujet », selon Benjamin Morel, maître de conférences en droit public.

Le