Européennes : le gouvernement s’oppose à la création d’une circonscription d’Outre-mer

Européennes : le gouvernement s’oppose à la création d’une circonscription d’Outre-mer

Le Sénat continue l’examen ce mercredi du projet de loi instaurant les listes nationales aux élections européennes. Les sénateurs d’Outre-mer ont déposé plusieurs amendements afin d’instaurer une circonscription distincte pour les territoires ultramarins.
Public Sénat

Par Jules Duribreu

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Alors que les prochaines élections des députés européens auront lieu en 2019 le gouvernement entend modifier les modalités du scrutin. Par un projet de loi débattu ce mercredi au Sénat, l'exécutif souhaite établir une circonscription unique et nationale, contre un découpage de 8 circonscriptions interrégionales auparavant. Les sénateurs d’Outre-mer ont tenté, sans succès, de faire adopter plusieurs amendements établissant une distinction entre une circonscription métropolitaine et une circonscription d’outre-mer.

La nécessité d’une représentation des territoires d’Outre-mer

« Ce projet de loi est un bouleversement. L'article premier remplace les huit circonscriptions, dont celle d'Outre-mer, par une seule circonscription. La circonscription Outre-mer permet à nos territoires d'être représentés par trois élus. Sa suppression est une mauvaise nouvelle. Les candidats ultramarins auront toutes les difficultés à se présenter en position éligible. Et les petits partis ne parviendront pas à avoir d'élus. » estime le sénateur socialiste de Martinique Maurice Anieste, qui souligne ici le risque d’une impossibilité de représenter tous les territoires avec un système de liste unique à l’échelle nationale.

Dans le même sens, pour Michel Magras, sénateur les Républicains de Saint-Barthélemy, il s’agit avant tout de prendre en compte les spécificités et les réalités de territoires d’Outre-mer : « Il est ironique que le gouvernement consacre le principe de la différenciation territoriale dans la Constitution et propose ici un mode de scrutin non différencié. L'outre-mer appartient à la République mais cette appartenance ne saurait avoir pour effet de gommer la réalité ultramarine. »

Michel Antiste « Les candidats ultramarins auront toutes les difficultés à se présenter en position éligible. »
02:37

Des circonscriptions dédiées aux territoires d’Outre-mer ?

De fait, le sénateur de Nouvelle-Calédonie Gérard Poadja, a déposé deux amendements afin de protéger ces spécificités d’Outre-mer. Le premier amendement déposé visait à instaurer 4 grandes circonscriptions. L’une pour l’hexagone, l’une pour l’Atlantique regroupant la Guadeloupe, la Guyane ou encore la Martinique, l’une pour l’océan Indien avec Mayotte et la Réunion, enfin une circonscription dédiée au Pacifique, avec la Nouvelle-Calédonie ou encore la Polynésie française. Le deuxième amendement, sensiblement identique, distingue plus simplement l’outre-mer de l’hexagone.

Pour Gérard Poadja « le retour à une circonscription unique, ne peut s’opérer au détriment de la représentation des outre-mer au sein de l’Union européenne. En rétablissant une circonscription unique, le présent projet de loi remplace la certitude pour les populations ultramarines d’être représentées au sein du Parlement européen, par une probabilité, soumise à la volonté des partis de positionner des candidats ultramarins à une place éligible sur leurs listes. Or, les Outre-mer doivent pouvoir défendre à Strasbourg ou à Bruxelles les enjeux qui leur sont propres. »

Un risque juridique et une responsabilité politique

Pour la ministre Jacqueline Gourault qui défendait la version du gouvernement à la Haute-assemblée, il y aurait un risque juridique à instaurer des circonscriptions ultramarines « Le gouvernement a identifié des risques juridiques importants dans la circonscription Outre-mer. Cela apporterait un décalage entre les deux logiques - territoriale et nationale - des représentations des deux circonscriptions, et donc un risque de rupture d'égalité devant les suffrages. Le découpage entre trois circonscriptions par océan serait très risqué, car le représentant du Pacifique représentait 570 000 citoyens, contre plus de un million pour la zone de l'océan Indien et celle de l'Atlantique. » En outre, la ministre pointe l’exemple d’autre pays européens ayant des territoires outre-mer « Le Danemark, l'Espagne, le Portugal et les Pays-Bas ont une circonscription unique. »

Enfin, Jacqueline Gourault estime que c’est avant tout aux partis politiques d’assurer la représentativité de tous les territoires sur les listes qu'ils présenteront pour les européennes. « Le gouvernement veut faire confiance aux partis politiques qui, en constituant leurs listes, tâchent d'intégrer des représentants de tous les territoires. La France est représentée au Parlement européen - tous les territoires ultramarins en font partie. C'est aux responsables politiques de les intégrer dans leurs listes. Ne pas le faire serait une erreur fondamentale. »

Jacqueline Gourault « Le gouvernement veut faire confiance aux partis politiques qui, en constituant leurs listes, tâchent d'intégrer des représentants de tous les territoires. »
05:41

Dans la même thématique

Paris : Speech of Emmanuel Macron at La Sorbonne
6min

Politique

Discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe : « Il se pose en sauveur de sa propre majorité, mais aussi en sauveur de l’Europe »

Le chef de l'Etat a prononcé jeudi 25 avril à la Sorbonne un long discours pour appeler les 27 à bâtir une « Europe puissance ». À l’approche des élections européennes, son intervention apparait aussi comme une manière de dynamiser une campagne électorale dans laquelle la majorité présidentielle peine à percer. Interrogés par Public Sénat, les communicants Philippe Moreau-Chevrolet et Emilie Zapalski décryptent la stratégie du chef de l’Etat.

Le

Paris : Speech of Emmanuel Macron at La Sorbonne
11min

Politique

Discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe : on vous résume les principales annonces

Sept ans après une allocution au même endroit, le président de la République était de retour à La Sorbonne, où il a prononcé ce jeudi 25 avril, un discours long d’1h45 sur l’Europe. Se faisant le garant d’une « Europe puissance et prospérité », le chef de l’Etat a également alerté sur le « risque immense » que le vieux continent soit « fragilisé, voire relégué », au regard de la situation internationale, marquée notamment par la guerre en Ukraine et la politique commerciale agressive des Etats-Unis et de la Chine.

Le

Police Aux Frontieres controle sur Autoroute
5min

Politique

Immigration : la Défenseure des droits alerte sur le non-respect du droit des étrangers à la frontière franco-italienne

Après la Cour de Justice de l’Union européenne et le Conseil d’Etat, c’est au tour de la Défenseure des droits d’appeler le gouvernement à faire cesser « les procédures et pratiques » qui contreviennent au droit européen et au droit national lors du contrôle et l’interpellation des étrangers en situation irrégulière à la frontière franco-italienne.

Le

Objets
4min

Politique

Elections européennes : quelles sont les règles en matière de temps de parole ?

Alors que le président de la République prononce un discours sur l’Europe à La Sorbonne, cinq ans après celui prononcé au même endroit lors de la campagne présidentielle de 2017, les oppositions ont fait feu de tout bois, pour que le propos du chef de l’Etat soit décompté du temps de parole de la campagne de Renaissance. Mais au fait, quelles sont les règles qui régissent la campagne européenne, en la matière ?

Le