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Féminicide de Mérignac : « Est-ce que le ministre de l’Intérieur a les noms des policiers auteurs de violences contre les femmes ? » interroge Laurence Rossignol
Par Steve Jourdin
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« Aucune surprise », pour Laurence Rossignol. Le fait que le policier qui avait recueilli la plainte de Chahinez Daoud venait d’être condamné pour violences intrafamiliales n’étonne pas l’ancienne ministre des Droits des femmes. « Les révélations du Canard témoignent de ce qui est pour moi une évidence : il y a le même pourcentage d’hommes violents dans la police que dans le reste de la population et dans d’autres professions. C’est un phénomène qui existe dans tous les milieux sociaux. Aucun métier n’est épargné. Ce qui est vrai cependant, c’est que dans la police, l’omerta est plus forte que dans d’autres professions. »
Un rapport d’enquête « édulcoré »
Chahinez Daoud, 31 ans, mère de trois enfants, est morte le 4 mai, après avoir été blessée par balles par son mari violent récidiviste dont elle était séparée, qui l’avait ensuite immolée par le feu dans la rue. Le drame avait suscité une vague d’indignations. En réaction, le gouvernement avait lancé une mission conjointe de l’inspection générale de l’administration et de l’inspection générale de la justice. Objectif ? Faire toute la lumière sur les circonstances du crime.
Problème : dans le rapport remis le 10 juin à Jean Castex, la situation judiciaire du policier ayant recueilli la plainte de Chahinez Daoud, n’est pas mentionnée. Le tribunal correctionnel de Bordeaux l’avait pourtant condamné le 10 février à 8 mois de prison avec sursis pour violences conjugales. « C’est absolument révoltant. Une mission d’enquête est diligentée par le gouvernement, et l’enquête ne fait pas apparaître ce fait gravissime et capital. L’exécutif prétend que la cause des femmes est la grande cause du quinquennat, comment peut-on en arriver à un tel niveau d’amateurisme ? » fulmine la centriste Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat.
Laurence Rossignol (PS) pointe du doigt la responsabilité de la hiérarchie policière. « Il y a une double défaillance dans cette affaire. Il y a d’abord défaillance de l’institution policière, qui place au recueil des plaintes un auteur de violences conjugales. Ce n’est pas normal. Il y a ensuite la défaillance du rapport de l’inspection, qui édulcore le fait que le policier en question avait été condamné pour violences intrafamiliales. »
Un deuxième rapport demandé par Gérald Darmanin
Ce jeudi 22 juillet, en réaction aux révélations du Canard enchaîné, Gérald Darmanin a indiqué qu’un deuxième rapport d’inspection sur le drame de Mérignac « sera transmis la semaine prochaine au Premier ministre ». Le ministre de l’Intérieur a aussi précisé que des sanctions seront prises, notamment si des « fonctionnaires de police ont menti ou n’ont pas tout dit à l’inspection générale ».
Une réponse insuffisante pour Laurence Rossignol, qui demande à Gérald Darmanin un état des lieux complet sur le sujet. « Est-ce que le ministre de l’Intérieur a les noms des fonctionnaires auteurs de violences faites aux femmes ? Et s’il les a, comment ces fonctionnaires sont-ils traités par la hiérarchie ? ». La sénatrice socialiste de l’Oise souhaite que cet inventaire porte non seulement sur les policiers condamnés par la justice, mais aussi sur les agents « signalés » pour de tels faits à leur hiérarchie.
Une demande partagée par Annick Billon (UC). « Nous avons créé des fichiers pour moins que ça. Toutes les personnes qui sont là pour nous protéger doivent être irréprochables dans la vie de tous les jours. Comment imaginer qu’un agresseur d’enfants puisse recueillir la plainte d’un mineur violé ? La même chose doit s’appliquer aux cas de violences conjugales. ». La présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat réitère son appel à la mise en place dans chaque commissariat d’un « référent » spécialisé, chargé de recueillir les plaintes pour violences intrafamiliales. Autre proposition de la délégation, la création d’un parquet spécialisé dans le traitement des faits de violences conjugales, à l’image de ce qui existe en matière antiterroriste, est pour l’heure fermement rejetée par le gouvernement.