Fraude fiscale: critiqué, le gouvernement veut montrer son engagement

Fraude fiscale: critiqué, le gouvernement veut montrer son engagement

Le gouvernement a voulu montrer lundi son engagement à prendre le problème de la fraude fiscale à bras le corps, après une...
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Par Jérémy MAROT, Marie HEUCLIN

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Le gouvernement a voulu montrer lundi son engagement à prendre le problème de la fraude fiscale à bras le corps, après une augmentation des sommes recouvrées en 2019 mais un diagnostic sévère de la Cour des comptes sur l'efficacité de l'action de l'Etat.

"La fraude fiscale c'est (...) ni plus ni moins la négation des principes aux fondations du pacte républicain", a affirmé le Premier ministre Edouard Philippe lors d'une conférence de presse à Bercy.

En 2019, l'administration fiscale a recouvré pour près de 10 milliards d'euros, dont 9 milliards récupérés via les contrôles fiscaux réalisés auprès des particuliers et des entreprises, en hausse de 16,3% par rapport à 2018.

"Aucun passe droit, aucune indulgence, juste la loi", a promis M. Philippe, en évoquant "des sommes tout à fait importantes, des dizaines de milliards, qui échappent au budget de l'Etat et de la Sécurité sociale".

Dans un rapport publié en décembre dernier, la Cour des comptes, mandatée par Matignon pour évaluer l'ampleur de la fraude, avait pointé le retard de la France en la matière et notamment une "modestie de l'impulsion interministérielle". Elle s'était dite aussi incapable de chiffrer l'ampleur du phénomène. Le gouvernement avait jugé le constat "très sévère", mais promis de remédier à ces lacunes.

Selon Edouard Philippe, il faut désormais une "coopération sans faille", une coopération "opérationnelle" entre les différents rouages de l'administration.

Le gouvernement va ainsi créer des groupes thématiques pour mieux faire travailler ensemble les différents services fiscaux, d'enquêtes et les juridictions financières. Ils concerneront notamment la TVA, le commerce en ligne, le travail illégal ou encore les sociétés éphémères frauduleuses.

Le Premier ministre a aussi demandé à l'Institut national de la statistique (Insee) de "prolonger" les travaux de la Cour des comptes sur l'évaluation de la fraude, promettant un point à l'automne.

- 9 milliards récupérés -

Accompagné du ministre des Comptes publics Gérald Darmanin et de la ministre de la Justice Nicole Belloubet, Edouard Philippe s'est félicité des bons résultats de la lutte contre la fraude fiscale l'an dernier.

"Nos efforts portent leurs fruits. Neuf milliards, c'est l'équivalent du budget du ministère de la Justice", a salué Edouard Philippe. "C'est un milliard de plus qu'en 2017 et 2018, donc un milliard de moins dans la poche de ceux qui ne respectent pas la loi."

530 millions sont également venus d'amendes pénales versées par le géant internet Google (500 millions) et la société d'investissement Carmignac Gestion (30 millions), via deux conventions judiciaires d'intérêt public (CJIP). Ce nouveau dispositif permet à une entreprise de négocier une amende sans procès et sans passer par une procédure de "plaider coupable".

Enfin, le service de traitement des déclarations rectificatives, qui gère notamment la régularisation des comptes à l'étranger, a encaissé 358 millions d'euros.

Pour expliquer ces résultats, les ministres ont mis en avant les mesures prises depuis le début du quinquennat, en particulier la loi anti-fraude votée en 2018, qui a par exemple élargi le mécanisme du "plaider coupable" au domaine fiscal ou instauré depuis l'été dernier une "police fiscale" chargée de lutter contre la délinquance fiscale.

La loi a surtout assoupli le "verrou de Bercy", un dispositif qui donnait à l'administration fiscale le monopole des poursuites en cas de fraude. Désormais, elle est obligée de transmettre à la justice les faits de fraudes supérieures à 100.000 euros.

Le gouvernement a aussi renforcé le contrôle des fraudes réalisées par des entreprises qui vendent des produits sur les plateformes en ligne. Et à partir de 2021, ces plateformes seront redevables de la TVA pour les vendeurs qui les utilisent, pour une partie des transactions.

Un projet controversé d'exploitation des données publiques des particuliers sur les réseaux sociaux est également sur les rails. Critiqué par la Cnil, gendarme français de la protection des données, et amendé par le Parlement, le procédé devrait être expérimenté, une fois validé par la Cnil et le Conseil d'Etat, d'ici la fin de l'année.

Par ailleurs, le déplafonnement des indemnisations attribuées aux aviseurs fiscaux qui dénoncent des faits de fraude pourrait inciter plus d'informateurs à se rapprocher du fisc.

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