Géographie du vote : une France éclatée en trois
Au lendemain du premier tour de la présidentielle, la France apparaît divisée entre trois forces politiques incarnées par Emmanuel Macron en tête dans 52 départements, Marine Le Pen dans 42 et Jean-Luc Mélenchon dans 12. Sur les décombres des partis traditionnels de la Ve République, la majorité présidentielle renforce son assise tout comme l’extrême-droite. La France insoumise s’installe dans les grandes villes, les quartiers populaires et les Antilles.

Géographie du vote : une France éclatée en trois

Au lendemain du premier tour de la présidentielle, la France apparaît divisée entre trois forces politiques incarnées par Emmanuel Macron en tête dans 52 départements, Marine Le Pen dans 42 et Jean-Luc Mélenchon dans 12. Sur les décombres des partis traditionnels de la Ve République, la majorité présidentielle renforce son assise tout comme l’extrême-droite. La France insoumise s’installe dans les grandes villes, les quartiers populaires et les Antilles.
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Par Héléna Berkaoui

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Fractures. Après une campagne présidentielle atone, la France se découvre à la couleur des résultats du premier tour. Un pays divisé entre trois blocs politiques. Le président sortant est arrivé en tête dans 52 départements, Marine Le Pen dans 42 et Jean-Luc Mélenchon dans 12. Une frontière se confirme entre l’est et l’ouest du territoire. La première penchant vers Emmanuel Macron quand la seconde vers Marine Le Pen.

Le décrochage du parti socialiste déjà largement entamé en 2017 se confirme. Anne Hidalgo récolte seulement 2 % des voix dans sa propre ville, Paris. Mais l’effondrement le plus spectaculaire reste celui des Républicains qui n’atteint même pas les 5 %.

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Les Républicains s’effondrent y compris dans leurs fiefs

En 2017, François Fillon était parvenu à se maintenir à la troisième place avec 19,94 % des suffrages exprimés. LR restait en tête dans le département de leur candidat, la Sarthe ainsi que dans les départements alentour et réalisait des scores honorables dans les fiefs de la droite.

La déroute des Républicains s’illustre très nettement, aucun département ne place Valérie Pécresse en tête. Même sur sa terre où elle avait un solide socle, à Versailles, le revers est brutal. La candidate LR arrive en 4e position avec 14,04 %, derrière… Jean-Luc Mélenchon (14,07 %), Éric Zemmour (18,48 %) et Emmanuel Macron (33,05 %). A l’échelle du département des Yvelines comme de sa région, le constat est encore plus cinglant. Valérie Pécresse se place en 5e position derrière Éric Zemmour et Marine Le Pen.

carte 2022 corrigée

Dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Valérie Pécresse se place également en 5e position avec (4,38 %). A titre de comparaison, en 2017, François Fillon arrivait en 2e position derrière Marine Le Pen avec 22,37 % des voix.

« Il y a une forme de radicalisation de la bourgeoisie », observe Jean Rivière

« Concernant l’effondrement de LR, on peut émettre l’hypothèse qu’une partie de leur électorat a voté pour Emmanuel Macron qui a mené des politiques de droite avec des ministres de droite », analyse Jean Rivière, maître de conférences en géographie à l’Institut de Géographie et d’Aménagement Régional de l’Université de Nantes (IGARUN).

« Lorsqu’on regarde certains fiefs emblématiques tels que le Touquet, Neuilly-sur-Seine ou l’ouest parisien comme le 16e arrondissement, on constate qu’Éric Zemmour fait des scores importants. Il y a une forme de radicalisation de la bourgeoisie », observe Jean Rivière. Dans l’Ouest parisien généralement acquis à la droite, Éric Zemmour se place derrière Emmanuel Macron dans les 16e, 7e et 8e arrondissements. Jamais l’extrême-droite n’avait atteint un tel niveau dans la capitale.

Si l’on dézoome, on observe que le Président sortant renforce nettement son ancrage dans l’ouest de la France. Il arrive en tête en Bretagne (32,79 %), en Nouvelle-Aquitaine (27,63 %), dans les Pays-de-Loire (33,28 %), mais aussi en Auvergne-Rhône-Alpes (27,75 %). Alors que Marine Le Pen le devançait en Normandie et dans le Centre-Val de Loire en 2017, Emmanuel Macron se place également en tête dans ces départements.

De bons scores qui s’expliquent dans l’ouest de la France par la présence d’un électorat de « droite démocrate chrétienne », selon Jean Rivière. La même qui plébiscitait François Bayrou.

Jean-Luc Mélenchon perce dans les grandes villes et en Outre-mer

Président du 93. Jean-Luc Mélenchon réalise des scores (presque) soviétiques en petite couronne. Le département le plus jeune de France lui offre 49,09 % de ses voix devant Emmanuel Macron (20,27 %). Le candidat de la France insoumise se place également en tête dans le Val d’Oise (33,17 %), dans le Val-de-Marne (32,67 %) et en Essonne (28,12 %).

Jean-Luc Mélenchon a bénéficié d’une forte dynamique aux derniers jours de la présidentielle s’imposant comme la principale force de gauche face à Emmanuel Macron et à l’extrême-droite.

« Jean-Luc Mélenchon est également très haut dans certains départements d’Outre-mer », souligne Jean Rivière. En effet, le candidat de la LFI se place en tête en Guadeloupe (56,16 %), en Martinique (53,10 %) ou en Guyane (50,59 %). « Il est l’un des seuls candidats à avoir tenu un discours sur les violences policières, la résistance au passe sanitaire ou sur les contaminations à la chlordécone », explique Jean Rivière.

Lire aussi. Présidentielle : Age, profession, lieu de résidence… quel est le profil des électeurs ?

Jean-Luc Mélenchon opère également une percée dans les grandes villes, « celles conquises par des coalitions de gauche souvent menées par les Verts lors des municipales ». C’est le cas à Paris où le candidat LFI arrive 2e avec 30,09 %, à Lyon où il côtoie Emmanuel Macron en tête des suffrages avec 31,06 %. A Marseille, la ville où il a été élu député, c’est carton plein. Jean-Luc Mélenchon arrive en tête devançant le président candidat de 8 points.

De son côté, la candidate du Rassemblement national consolide son assise. Dans les Hauts-de-France, elle gagne 2 points par rapport à 2017. Dans le Grand Est et en Bourgogne Franche-Comté ses scores s’améliorent également. Un renforcement qui se vérifie également en Occitanie, en Corse et en Provence-Alpes-Côte-d’Azur. De quoi dessiner un nouveau paysage politique plus polarisé que jamais.

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