« Gilets jaunes »: le retour des députés-maires réclamé par certains élus
Les parlementaires, qui ne peuvent plus être en même temps maires, ont-ils été trop peu en prise avec le terrain et les "gilets jaunes"?...

« Gilets jaunes »: le retour des députés-maires réclamé par certains élus

Les parlementaires, qui ne peuvent plus être en même temps maires, ont-ils été trop peu en prise avec le terrain et les "gilets jaunes"?...
Public Sénat

Par Anne Pascale REBOUL

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Les parlementaires, qui ne peuvent plus être en même temps maires, ont-ils été trop peu en prise avec le terrain et les "gilets jaunes"? Certains élus s'appuient sur cette crise pour attaquer la règle du non-cumul des mandats.

La loi votée en 2014 sous François Hollande a interdit aux députés et sénateurs élus ou réélus en 2017 de cumuler ce mandat avec la fonction de maire (ou adjoint), ainsi que celle de président (ou vice-président) de conseils régionaux, départementaux ou intercommunaux.

"Dans un pays assez centralisé, cette expérience d'élu local manque à l'Assemblée, surtout chez LREM", juge Christian Jacob, patron des députés LR, qui a dû lui-même céder son siège de maire de Provins (Seine-et-Marne).

Ce "manque d'ancrage territorial" ressort particulièrement dans la crise en cours et "Emmanuel Macron redécouvre les élus", affirme-t-il à l'AFP, jugeant qu'il n'est "jamais trop tard pour prendre la bonne décision" et remettre la loi sur le non-cumul sur le métier.

Mardi lors du lancement du grand débat national dans l'Eure, le chef de l'Etat s'est montré ouvert: "Faut-il permettre de ré-avoir des mandats locaux, du moins dans certaines proportions, sans être dans des exécutifs de premier plan, peut-être? C’est à vous et aux parlementaires d’avoir ce débat", a-t-il dit aux maires normands.

Gérard Larcher, président (LR) du Sénat, qu'il définit comme "l'Assemblée des territoires", s'est engouffré dans la brèche, plaidant pour "re-réfléchir" à cette règle "en train de construire une déconnexion" des parlementaires.

- "Croiser des gens" -

Des députés de la majorité, dont d'anciens maires, vont dans le même sens. "La mission d'un parlementaire reste de faire la loi et du contrôle, mais c'est pas mal de croiser des gens aussi", lâchait récemment l'un d'eux, rapportant une "souffrance de certains parlementaires", snobés localement par élus et même préfets.

Car "avec le non-cumul, on perd de l'influence, le député devient le supplétif de l'exécutif", explique un autre. Il reconnaît toutefois des défauts au cumul: "cela crée des baronnies, des barrières à l'entrée" au Palais Bourbon.

Le député MoDem Erwan Balanant, en juillet 2017 à l'Assemblée nationale
Le député MoDem Erwan Balanant, en juillet 2017 à l'Assemblée nationale
AFP/Archives

A contrario, avec près des trois quarts des députés de 2017 qui n'avaient jamais eu un tel mandat, la plupart se sont investis pleinement au parlement, ce qui a changé quelque peu la fonction.

Les "marcheurs", notamment, se démultiplient en missions d'information, groupes de travail. Ils étaient particulièrement nombreux dans l'hémicycle au démarrage. Comparant le début de cette législature à celui de la précédente, le collectif Regards citoyens a aussi calculé qu'en commission, le nombre moyen de présents a augmenté de 29%.

"C'est un job a plein temps", 70 à 100 heures par semaine, affirme Erwan Balanant (MoDem). Les députés-maires "voyaient les gens mais n'avaient pas le temps d'être députés", relève-t-il, notant aussi que revenir sur le non-cumul n'est "pas une demande des +gilets jaunes+".

Avec les nouvelles règles, "chacun est à sa place", estime Cendra Motin (Isère).

Sur les 577 députés, plus de 400 sont cependant conseiller municipal, départemental ou régional. "L'ancrage existe" et "la situation qui permet d'être parlementaire et membre non exécutif d'une collectivité est une bonne chose", défend le président de l'Assemblée Richard Ferrand (LREM), issu des rangs socialistes.

Comment revenir en arrière, après une telle réforme portant le sceau du progressisme? Dans son projet de réforme des institutions, Emmanuel Macron a même inscrit le non-cumul des mandats dans le temps, pour une meilleure "respiration démocratique", avec une limitation à trois mandats identiques successifs.

Reste que certains pronostiquent une fuite de députés prenant le chemin des élections municipales en 2020, pour retrouver une fonction plus populaire, surtout à l'heure d'une vague de violences contre les élus de la majorité.

Auparavant, "des députés-maires étaient protégés par leur statut de maire, qui les sauvait un peu de la vindicte", relève aussi Olivier Rozenberg, enseignant à Sciences Po

parl-reb/chl/ib/ao

Partager cet article

Dans la même thématique

« Gilets jaunes »: le retour des députés-maires réclamé par certains élus
5min

Politique

Mobilisation du 18 septembre : « Soit une politique de rupture est menée, soit on continue à mettre la pression »

A l’appel de l’intersyndicale, des centaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue partout en France pour protester contre le projet de budget pour 2026. Dans le cortège parisien, les manifestants, pas convaincus par la nomination de Sébastien Lecornu à Matignon, sont déterminés à maintenir la pression sur l’exécutif. Reportage.

Le

SIPA_01229633_000009
1min

Politique

Info Public Sénat. Bataille audiovisuel public/médias Bolloré : une délégation de sénateurs LR reçue à Radio France le 30 septembre

Alors que le ton se durcit entre les dirigeants de l’audiovisuel public et la chaîne CNews de Vincent Bolloré, qualifiée « d’extrême droite » par Delphine Ernotte, une délégation de sénateurs LR sera reçue par la patronne de Radio France Sibyle Veil le 30 septembre. Le 1er octobre, le président de l’Arcom, Martin Ajdari sera, lui, auditionné par la commission de la culture et de la communication de la chambre haute.

Le

Paris: Politiques manifestation mouvement Bloquons Tout
4min

Politique

Grève du 18 septembre : « Bruno Retailleau a besoin de la violence, des poubelles qui brûlent, pour affirmer son rôle de sauveur », soutient Jean-Luc Mélenchon

Alors que les syndicats appellent à la mobilisation ce jeudi, le leader de La France Insoumise prévient déjà qu’« il y aura des prolongements syndicaux comme il y aura des prolongements politiques » à cette journée, qui « se présente d’ores et déjà comme un immense événement », selon Jean-Luc Mélenchon.

Le