Grand débat: la question qui fâche le Sénat

Grand débat: la question qui fâche le Sénat

"Le Sénat, c'est le poil à gratter de l'exécutif": les sénateurs ont très mal pris la question posée par Emmanuel Macron, dans sa...
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Par Véronique MARTINACHE

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"Le Sénat, c'est le poil à gratter de l'exécutif": les sénateurs ont très mal pris la question posée par Emmanuel Macron, dans sa lettre aux Français, d'une éventuelle transformation de la Haute assemblée, revendiquant leur rôle de représentants des territoires.

Dans cette adresse, le chef de l'Etat propose d'encadrer le grand débat national, lancé mardi, par une trentaine de questions précises, dont certaines plus polémiques que d'autres, comme sur la possibilité d'instituer des quotas migratoires ou encore de supprimer des services publics "dépassés ou trop chers".

Mais ce qui a suscité l'ire des sénateurs, de tous bords, ce sont les questions sur le rôle et l'avenir du Sénat, à majorité de droite, ressenties comme une attaque contre le bicamérisme, sujet hautement sensible au Palais du Luxembourg.

"Quel rôle nos assemblées, dont le Sénat et le Conseil économique, social et environnemental, doivent-ils jouer pour représenter nos territoires et la société civile ?", "Faut-il les transformer et comment?".

Pas question dans ces formulations de supprimer purement et simplement la Haute assemblée, comme le réclament certains "gilets jaunes". Mais les esprits ne s'en sont pas moins échauffés.

"Emmanuel Macron s'en prend au Sénat. Il a raison. Pas de Sénat, pas de commission d'enquête, pas d'affaire Benalla, personne pour révéler l'amateurisme, l'arbitraire et les copinages qui semblent être la règle à l'Elysée", ironise la sénatrice écologiste Esther Benbassa sur son compte Twitter.

"Emmanuel Macron pose la question du rôle du Sénat mais c'est le rôle de tout le Parlement y compris l'Assemblée Nationale qui est en question: le Parlement n'est pas assez puissant, les contrepouvoirs pas assez forts, le contrôle sur le gouvernement insuffisant", contre-attaque aussi Philippe Bas, président LR de la commission des Lois.

"Est-ce qu'il n'y a pas un déséquilibre des pouvoirs dans notre pays ? C'est ça la bonne question qu'Emmanuel Macron devrait poser et non pas jeter en pâture le CESE et le Sénat, sans même citer l'Assemblée nationale", s'insurge Patrick Kanner, président du groupe PS, auprès de l'AFP.

- "Tir au pigeon" -

Jeter l'avenir du Sénat dans le grand débat serait-il un avertissement sans frais dans la perspective de la révision institutionnelle, toujours en panne ? Voulue par Emmanuel Macron, elle prévoit notamment une dose de proportionnelle aux législatives et la réduction d'un tiers du nombre de parlementaires.

"Depuis le début de la Ve République, le Sénat c'est le poil à gratter de l'exécutif et de l'administration centrale", analysait le sénateur LR François Grosdidier mardi sur Public Sénat. "Un ministre sait toujours comment son texte va ressortir de l'Assemblée puisque l'Assemblée vote comme le gouvernement. Un ministre ne sait jamais comment son texte va ressortir du Sénat (...), donc c'est vachement insécurisant."

Pour le sénateur de la Moselle, "ce qui est grave, c'est qu'avec un peu de démagogie populiste", Emmanuel Macron "semble vouloir reléguer le Sénat au rang d'une assemblée consultative".

"Le grand débat sera l'occasion d'expliquer ce qu'apporte le bicamérisme", temporise la ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault. "C'est un des moyens d'équilibre des pouvoirs. C'est une protection efficace de la démocratie", affirme-t-elle dans un entretien au Monde.

"C'est le Sénat qui porte la voix des territoires", martèle de son côté le président du groupe LR Bruno Retailleau. Et de rappeler dans un sourire à ceux des +gilets jaunes+ qui souhaiteraient sa disparition que le Sénat s'était opposé à la hausse de la taxe carburants.

Les sénateurs ont reçu le soutien du secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, pour qui "ce début de débat qui consisterait à faire du tir aux pigeons sur nos institutions serait une folie totale".

"A ce moment où la démocratie est en danger (...) les acteurs qui peuvent être garants d'un certain nombre de valeurs républicaines et de nos institutions, j'en vois un, par exemple, qui est le président du Sénat", Gérard Larcher, a-t-il déclaré lundi sur le plateau d'"Audition publique" LCP-Public-Sénat-AFP-Le Figaro.

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