Immigration : que proposent les candidats ?

Immigration : que proposent les candidats ?

Le 17 avril 2017, à l’occasion de son meeting au Zénith de Paris, Marine Le Pen a misé sur un discours anti-immigration, se recentrant sur ses fondamentaux. En pleine crise migratoire, les candidats à la présidentielle ont tous formulé des propositions à ce sujet. Suppression de l’aide médicale d’Etat, quotas, délais d’examen des demandes d’asile, réforme de Schengen… Retour sur le programme des candidats en matière d’immigration.
Public Sénat

Par Alice Bardo

Temps de lecture :

12 min

Publié le

Mis à jour le

Emmanuel Macron, le candidat de l’intégration

Le candidat du mouvement En Marche ! Emmanuel Macron, lors d'un meeting à Paris, le 17 avril 2017
Le candidat du mouvement En Marche ! Emmanuel Macron, lors d'un meeting à Paris, le 17 avril 2017
AFP

Le candidat d’ « En Marche ! » fait de l’intégration des personnes immigrées une priorité « absolue ». Et, comme il estime que cela passe avant tout par la maitrise de la langue, il propose que chaque étranger en situation régulière arrivant en France ait droit une formation linguistique lui permettant d’atteindre le niveau oral (B1), à savoir celui exigé pour l’accès à la nationalité française. Il souhaite aussi associer plus étroitement les communes à la politique d’intégration, notamment en leur confiant un rôle de suivi et de médiation.

Emmanuel Macron veut raccourcir les délais d’examen des demandes d’asile. Alors qu’il est actuellement de cinq mois en moyenne, il compte le faire passer à deux mois s’il est élu. Il assure vouloir que « la France assume sa part dans l’accueil des réfugiés tout en reconduisant à la frontière ceux qui ne sont pas acceptés ». A ce propos, il entend renforcer le contrôle aux frontières en augmentant de 5000 hommes le contingent chargé de leur surveillance. Il appuie également l’installation de points de contrôle dans les pays de départ et de transit des migrants.

Pour finir, il désire « promouvoir une immigration de la connaissance » en réduisant le délai d’obtention des visas « talents », en développant les visas de circulation pour les professionnels et en simplifiant les modalités d’accès au travail pour les étudiants titulaires d’un master en France.

François Fillon, pour une immigration réduite au « strict minimum »

François Fillon à Pérols, près de Montpellier, le 14 avril 2017
François Fillon à Pérols, près de Montpellier, le 14 avril 2017
AFP/Archives

En visite à Calais aujourd'hui, François Fillon assure qu'il ménera une lutte implacable contre l'immigration clandestine. En matière d'immigration légale, l’objectif affiché par le candidat de la droite et du centre est clair : il veut la réduire « au strict minimum » et faire en sorte que ce « ne soit plus une charge » pour l’Etat français.

Pour ce faire, il a exprimé son intention de mettre en place des quotas annuels fixés par la loi et compte inscrire ce principe dans la Constitution s’il accède à la plus haute fonction de l’Etat. Il a toutefois précisé que cette mesure ne concernerait pas les demandeurs d’asile.

Outre cette mesure, il prévoit de refuser le regroupement familial « en l’absence de perspective sérieuse d’intégration » et se dit prêt à renégocier les directives européennes pour « restaurer (la) souveraineté migratoire » de la France.

François Fillon fait partie des candidats qui se sont prononcés pour la suppression de l’aide médicale d’Etat (AME). Aussi, il conditionne le versement des allocations familiales et de l’aide au logement à deux ans de résidence régulière en France et souhaite augmenter « sensiblement » les frais de dossier, les taxes de titres de séjour ainsi que les frais d’octroi de la nationalité française pour que la politique migratoire soit financée « par les ressortissants étrangers plutôt que par le contribuable français ».

Pour « mettre un coup d’arrêt à l’immigration clandestine et au détournement du droit d’asile », il veut réduire le délai d’examen des demandes d’asile à quatre mois et restaurer le principe du placement en rétention. « L’éloignement des déboutés du droit d’asile doit être une priorité », ajoute le candidat.

S’il est élu, il prévoit de faire passer de 5 à 8 ans la durée minimale de résidence en France pour être naturalisé et de 4 à 5 ans la durée minimale de vie commune avant l’acquisition de la nationalité par les conjoints de Français. Il compte aussi renforcer les conditions d’acquisition de la nationalité française à la majorité.

Il  veut enfin refonder Schengen, notamment pour pouvoir exclure temporairement un Etat défaillant, ainsi que pour autoriser des contrôles ciblés.

Marine Le Pen veut mettre en place un moratoire sur toute l’immigration légale

La candidate du Front national à la présidentielle Marine Le Pen le 15 avril 2017 à Perpignan
La candidate du Front national à la présidentielle Marine Le Pen le 15 avril 2017 à Perpignan
AFP/Archives

Lors de son meeting au Zénith de Paris, hier soir, la candidate du Front national a promis « un moratoire immédiat sur toute l’immigration légale (…) avant de mettre en place de nouvelles règles et une nouvelle régulation, beaucoup plus drastique ». Elle a également rappelé qu’elle rétablirait les frontières « dès le lendemain de (sa) prise de fonctions » si elle est élue présidente de la République. Et pour renforcer leur contrôle, elle compte recruter 6000 agents des douanes supplémentaires pendant le quinquennat.

Marine le Pen prévoit donc de sortir de l’espace Schengen. Elle veut également supprimer l’aide médicale d’Etat.

Elle veut réduire l’immigration légale à un solde annuel de 10 000 (à titre de comparaison et selon les données de l’INSEE, il était de 67 000 en 2016). Un chiffre qu’elle compte atteindre notamment en supprimant le droit du sol, en mettant fin à « l’automaticité du regroupement et du rapprochement familiale » ainsi qu’à « l’acquisition automatique de la nationalité française par le mariage » et en rendant impossible la régularisation ou la naturalisation des étrangers en situation illégale.

Pour finir, elle dit vouloir revenir à « l’esprit initial du droit d’asile », ce qui signifie que la demande devra être déposée dans les ambassades et consulats français des pays d’origine ou limitrophes des personnes migrantes.

Benoît Hamon s’en remet à l’Union européenne

Le candidat socialiste à la présidentielle, Benoît Hamon, lors d'une réunion publique à Captieux, le 16 avril 2017
Le candidat socialiste à la présidentielle, Benoît Hamon, lors d'une réunion publique à Captieux, le 16 avril 2017
AFP

Le candidat PS à l’élection présidentielle plaide pour l’instauration d’un visa humanitaire à l’échelle européenne. Il serait destiné « aux personnes en situation de détresse humanitaire et leur garantirait un accueil et une protection temporaire ».

En 2015, la France consacrait 0,37% du Revenu national brut à l’Aide publique au développement. Pour « éviter l’immigration économique », Benoît Hamon veut la revaloriser de manière à ce qu’elle ne soit jamais inférieure à 0,7%.

Dernière mesure, il souhaite réviser le règlement de Dublin qui pose le principe selon lequel le pays dans lequel a été formulée la demande d'asile est celui qui est chargé de son instruction et de la décision finale. A ce principe, le candidat socialiste préfère une « solidarité entre les Etats de l’Union européenne ».

Benoît Hamon conserve l’AME.

Jean-Luc Mélenchon veut « éviter aux migrants de fuir leur pays »

Jean-Luc Mélenchon en meeting à Toulouse, le 16 avril 2017
Jean-Luc Mélenchon en meeting à Toulouse, le 16 avril 2017
AFP

C’est au niveau international que le leader de la France insoumise veut gérer les migrations. Il est notamment pour la création d’une Organisation mondiale des migrations, liée à l’ONU.

S’il est élu, Jean-Luc Mélenchon voudra avant tout « éviter aux migrants de fuir leur pays », en agissant contre le dérèglement climatique, en arrêtant les guerres « par une diplomatie au service de la paix », ou encore en mettant fin aux « accords commerciaux inégaux ». Il souhaite également que les personnes puissent retourner chez elles lorsque cela est possible et prévoit pour ce faire de mettre en place un programme pour l’aide au retour des réfugiés « qui le souhaitent lorsque la situation de leur pays de départ le permet ».

Au niveau interne, il plaide pour la construction de centres d’accueil conformes « aux normes internationales » et veut en finir avec le placement en centres de rétention d’enfants. Plus largement, il fixe comme objectif le respect de « la dignité humaine des migrants, leur droit fondamental à une vie de famille et l’accompagnement des mineurs isolés ». Il est favorable au maintien de l’AME.

Contrairement à sa rivale du Front national, il défend le droit du sol et veut régulariser les travailleurs sans-papiers.

Enfin, il veut rétablir la carte de séjour de dix ans comme titre de séjour de référence pour les étrangers.

Nicolas Dupont-Aignan ne souhaite pas l’immigration 0, mais presque

Le candidat du parti Debout la France à la présidentielle, Nicolas Dupont-Aignan, lors d'un meeting à Marly, dans l'est de la France, le 27 mars 2017
Le candidat du parti Debout la France à la présidentielle, Nicolas Dupont-Aignan, lors d'un meeting à Marly, dans l'est de la France, le 27 mars 2017
AFP/Archives

 « Il ne s‘agit pas de faire l’immigration 0, il s’agit de faire appel au bon sens, comme le font Theresa May et Donald Trump », affirmait le candidat de Debout la France sur France 5, le 17 janvier dernier.

Il souhaite la fin du système Schengen et, pour renforcer le contrôle aux frontières nationales, il prévoit de recruter 10 000 policiers supplémentaires.

Nicolas Dupont-Aignan veut également supprimer l’AME et, s’il est élu, il conditionnera l’accès aux aides sociales « à la volonté d’insertion dans la société » et instaurera un délai de carence d’une durée de cinq ans.

Il ne compte pas supprimer le droit du sol mais conditionne la demande du jeune majeur né de parents étrangers à dix ans de résidence en France. La même condition devra être remplie pour toute demande de naturalisation (contre 5 ans aujourd’hui). Quant au délai minimal pour le regroupement familial, il prévoit de la faire passer de 18 mois à 5 ans. Il propose également d’interdire les mariages avec des étrangers en situation irrégulière.

Sans vraiment parler de quotas comme le fait François Fillon, Nicolas Dupont-Aignan veut faire voter annuellement par le Parlement « un plafond d’immigration correspondant aux capacités d’accueil du pays ». Il parle toutefois de quotas concernant les étudiants étrangers. Il veut en instaurer « par filière et par pays » pour « stopper le pillage des cerveaux des pays en développement ».

Lui aussi veut réduire les délais d’examen de demande d’asile pour les ramener à deux mois. Il compte également de limiter ce droit aux individus le demandant aux frontières et, en cas de refus, il prévoit d’ « éloigner immédiatement » les demandeurs d’asile déboutés.

Philippe Poutou et Nathalie Arthaud, pour un « monde sans frontières »

Le candidat du Nouveau parti anticapitaliste, Philippe Poutou, prononce un discours à Montpellier, le 7 avril 2017
Le candidat du Nouveau parti anticapitaliste, Philippe Poutou, prononce un discours à Montpellier, le 7 avril 2017
AFP/Archives

« On est pour l’accueil de tous les migrants, on pense qu’il y a largement les moyens d’accueillir décemment les migrants que ce soit du logement ou même du boulot », assurait le candidat du NPA le 22 février dernier.

Il appelle à un « monde sans frontières » et réclame la liberté de circulation et d’installation, une citoyenneté de résidence et, plus largement, « l’égalité des droits complète dès que quelqu’un arrive sur le territoire ».  Des propositions identiques à celles de Nathalie Arthaud, favorable « à tout ce qui va dans le sens de la disparition des frontières » et prête à « accueillir les migrants à bras ouverts.

La candidate Lutte ouvrière à la présidentielle Nathalie Arthaud, lors d'une conférence de presse avant un meeting à Marseille, le 8 avril 2017
La candidate Lutte ouvrière à la présidentielle Nathalie Arthaud, lors d'une conférence de presse avant un meeting à Marseille, le 8 avril 2017
AFP/Archives

Jean Lassalle veut lutter contre l’immigration illégale

Le député centriste et candidat à la présidentielle Jean Lassalle (d), lors d'un déplacement de campagne à Marseille, le 12 avril 2017
Le député centriste et candidat à la présidentielle Jean Lassalle (d), lors d'un déplacement de campagne à Marseille, le 12 avril 2017
AFP

Le candidat n’a formulé qu’une seule proposition en matière d’immigration : « Renforcer les effectifs des douanes et les forces aux frontières où se concentre l’immigration illégale (Mayotte, Guyane…) »

François Asselineau prône un référendum sur l’immigration

Le candidat de l'UPR à l'élection présidentielle François Asselineau, lors d'un meeting de campagne à Lille, le 10 avril 2017
Le candidat de l'UPR à l'élection présidentielle François Asselineau, lors d'un meeting de campagne à Lille, le 10 avril 2017
AFP/Archives

Le candidat du Frexit conditionne toute mesure à ce sujet à un référendum sur l’immigration.

Jacques Cheminade est en faveur du co-développement

Le candidat du parti Solidarité et Progrès à l'élection présidentielle, Jacques Cheminade, lors du débat entre les 11 candidats, à La Plaine-Saint-Denis près de Paris, le 4 avril 2017
Le candidat du parti Solidarité et Progrès à l'élection présidentielle, Jacques Cheminade, lors du débat entre les 11 candidats, à La Plaine-Saint-Denis près de Paris, le 4 avril 2017
POOL/AFP/Archives

Pour le président du parti Solidarité et progrès, « la nécessaire régulation de l’immigration ne peut être réellement mise en place que de deux façons : en assurant le développement des pays du Sud (…) et en créant avec chacun de ces pays de vraies formules de co-développement et de partenariat ». Il entend ainsi  créer un ministère de la coopération, du co-développement et de l’intégration.

Le candidat prévoit toutefois d’accueillir les réfugiés politiques « au maximum des capacités d’accueil » de la France et souhaite leur offrir « les meilleurs conditions de vie possible ».

Il propose d’offrir 600 heures d’apprentissage du français ainsi que des « cours d’orientation et d’instruction civiques ».

Si Jacques Cheminade est élu, il maintiendra l’AME et réduira la durée maximale de détention des étrangers en situation irrégulière à 20 jours.

Enfin, il veut réduire la durée d’instruction des dossiers de demande d’asile à six mois.

Dans la même thématique

Deplacement du Premier Ministre a Viry-Chatillon
7min

Politique

Violence des mineurs : le détail des propositions de Gabriel Attal pour un « sursaut d’autorité »

En visite officielle à Viry-Châtillon ce jeudi 18 avril, le Premier ministre a énuméré plusieurs annonces pour « renouer avec les adolescents et juguler la violence ». Le chef du gouvernement a ainsi ouvert 8 semaines de « travail collectif » sur ces questions afin de réfléchir à des sanctions pour les parents, l’excuse de minorité ou l’addiction aux écrans.

Le

Turin – Marifiori Automotive Park 2003, Italy – 10 Apr 2024
6min

Politique

Au Sénat, la rémunération de 36,5 millions d’euros de Carlos Tavares fait grincer des dents. La gauche veut légiférer.

Les actionnaires de Stellantis ont validé mardi 16 avril une rémunération annuelle à hauteur de 36,5 millions d’euros pour le directeur général de l’entreprise Carlos Tavares. Si les sénateurs de tous bords s’émeuvent d’un montant démesuré, la gauche souhaite légiférer pour limiter les écarts de salaires dans l’entreprise.

Le

Operation Wuambushu a Mayotte : Demolition en cours d’un vaste bidonville – Operation Wuambushu in Mayotte: Ongoing demolition of a vast slum
8min

Politique

« Mayotte place nette » : « La première opération était de la communication et la deuxième sera de la communication », dénonce le sénateur Saïd Omar Oili

Le gouvernement a annoncé ce mardi 16 avril le lancement du dispositif « Mayotte place nette », un an après le maigre bilan de l’opération baptisée « Wuambushu ». Saïd Omar Oili, sénateur de Mayotte, regrette le manque de communication du gouvernement avec les élus du département et met en doute l’efficacité de ce « Wuambushu 2 ».

Le