L’interminable casse-tête de la désignation du candidat LR à la présidentielle

L’interminable casse-tête de la désignation du candidat LR à la présidentielle

Les militants ont entériné samedi dernier le principe d’un congrès réservé aux adhérents LR pour désigner leur candidat à la présidentielle. Pourtant rien ne semble acté. Les soutiens de Xavier Bertrand appellent ses concurrents à se ranger le plus rapidement possible derrière leur champion, alors que Michel Barnier a demandé un « grand débat » à Christian Jacob. En toile de fond, la pression de la future candidature Zemmour se fait aussi sentir.
Louis Mollier-Sabet

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« #Le25JeDécide. » Le hashtag choisi par Christian Jacob pour présenter le congrès électronique de samedi 25 septembre a déjà mal vieilli. Les militants ont en effet « décidé » que leur candidat à la présidentielle serait désigné le 4 décembre par un congrès auquel participeraient seulement les adhérents LR. On pourrait croire – naïvement – que l’affaire était close, mais ce serait mal connaître la droite française. Dès dimanche, Jean Leonetti a regretté dans le JDD le choix du congrès par son parti en estimant « qu’on ne gagne pas une présidentielle en se repliant sur soi. » On n’est pas tout à fait revenu au temps des duels fratricides à la Chirac-Balladur, les manœuvres sont encore feutrées, polies, voire techniques, mais en coulisse, le vote des adhérents n’a pas mis fin aux tractations, loin s’en faut.

« Une primaire fermée » ou « interne » pour les camps Pécresse et Barnier

On savait déjà samedi que les « modalités » du congrès restaient encore à définir, mais pour Christian Jacob, on « connaissait » désormais « les règles du jeu ». Trois jours plus tard, on n’en est plus si sûr. Michel Barnier a mis les pieds dans le plat dès lundi soir en adressant une lettre au président des LR. Le Figaro rapporte en effet que l’ex-chef opérationnel du Brexit a demandé à Christian Jacob d’ouvrir un « grand débat » entre les candidats et « d’acter » la date du scrutin au 4 décembre. L’enjeu pour Michel Barnier, en tant qu’outsider, est d’être certain que la procédure ira jusqu’au bout et que le fameux congrès du 4 décembre sera l’occasion d’une vraie confrontation avec ses principaux rivaux, histoire d’avoir une chance de renverser la dynamique au dernier moment, avec en tête la trajectoire de François Fillon en 2016.

Stéphane Piednoir, sénateur LR et soutien de Michel Barnier, l’affirme, les adhérents de LR « ont été clairs », ils veulent d’une « primaire fermée » et pas d’un « plébiscite » ou d’un choix « entre un candidat et ce même candidat. » De même pour Françoise Dumont, sénatrice LR et « oratrice de campagne » de Valérie Pécresse, le choix des adhérents LR de samedi est d’organiser une sorte de « primaire interne », pour laquelle la présidente de la région Île-de-France « fait déjà campagne dans les fédérations. » La sénatrice du Var « ne voit pas d’autre scénario à l’heure actuelle. »

Un « congrès d’adoubement » pour le camp Bertrand

C’est à se demander si l’on parle la même langue chez les LR. Dans le camp Bertrand, on refuse le terme de primaire et on veut faire du congrès du 4 décembre un congrès « d’adoubement » afin d’entériner immédiatement le choix de Xavier Bertrand. Pour éviter de faire traîner le véritable lancement de la campagne du futur candidat LR, déjà, mais aussi pour éviter « un congrès de débat et de défoulement », selon les mots de Jérôme Bascher, qui soutient le président de la région Hauts-de-France. Pour Olivier Paccaud, sénateur LR et porte-parole de Xavier Bertrand, celui-ci « a toujours été clairement contre la primaire ce n’est pas pour aujourd’hui organiser une autre forme de primaire ou un congrès qui finirait par y ressembler. »

Pour le sénateur de l’Oise, le temps presse : « Sincèrement plus tôt on pourra partir en campagne tous unis, mieux ce sera c’est certain. » L’affaire semble entendue pour le camp Bertrand, la question c’est le timing : « La date du 4 décembre est fixée par les statuts, donc on ne peut pas la bouger. D’ici là il est important que le rassemblement se fasse », explique par exemple Dominique Estrosi Sassone. La porte-parole de Xavier Bertrand en appelle même à la « responsabilité » des « personnalités importantes » de sa famille politique : « J’ai bon espoir que les candidats ou les personnalités importantes comme le président Bruno Retailleau se responsabilisent et se rangent derrière le candidat le mieux placé, qui est incontestablement Xavier Bertrand. »

Congrès du 4 décembre : « C’est vrai que ça fait loin »

Il faut dire que le temps joue contre les différents candidats des Républicains. Tous les candidats seront bientôt plus ou moins déclarés alors qu’en l’état actuel, on devrait attendre le 4 décembre pour connaître celui ou celle qui portera les couleurs de LR à l’élection présidentielle. « C’est vrai que ça fait loin, on pourrait le faire plus tôt » confie Françoise Dumont. C’est probablement la seule chose sur laquelle tout le monde est d’accord au sein des Républicains.

Parce qu’au-delà des atermoiements institutionnels, la « famille politique » LR paraît aussi bien divisée sur l’attitude à adopter par rapport à un certain Éric Zemmour. François-Xavier Bellamy assurait hier dans notre matinale « ne pas voir ce qui empêcherait » une potentielle candidature d’Éric Zemmour au congrès du 4 décembre. Une prise de position qui n’a pas manqué de faire réagir à droite, notamment à la réunion de groupe des députés LR à l’Assemblée nationale.

Du côté des soutiens sénatoriaux des principaux candidats LR putatifs en revanche, c’est une ligne rouge. Pour Françoise Dumont, « il existe une frontière infranchissable avec les idées de la droite extrême », alors qu’Olivier Paccaud voit dans Éric Zemmour « l’extrême droite chimiquement pure. »

Il n’en reste pas moins que les pérégrinations des LR sur le choix d’un candidat permettent au polémiste de continuer à mettre la pression sur le parti et de pousser pour une union des droites. « Il faut le prendre au sérieux, la nature a horreur du vide » s’inquiète Olivier Paccaud. Et, en l’état actuel de la procédure, le « vide » devrait durer encore deux mois chez les LR.

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