La création d’un « tribunal criminel », annonce surprise de la réforme de la justice
Trois jours après les annonces d'Emmanuel Macron sur la réforme des peines, la garde des Sceaux Nicole Belloubet et le Premier...

La création d’un « tribunal criminel », annonce surprise de la réforme de la justice

Trois jours après les annonces d'Emmanuel Macron sur la réforme des peines, la garde des Sceaux Nicole Belloubet et le Premier...
Public Sénat

Par Caroline TAIX, Caroline TAIX et Marc PREEL

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Trois jours après les annonces d'Emmanuel Macron sur la réforme des peines, la garde des Sceaux Nicole Belloubet et le Premier ministre Édouard Philippe ont dévoilé vendredi les axes de la réforme de la justice, avec une annonce surprise: l'expérimentation d'un "tribunal criminel" à la place des assises.

Dans ce tribunal départemental seront jugés "les crimes qui se trouvent en bas de l'échelle", a déclaré Édouard Philippe, lors d'un déplacement au Palais de justice de Reims avec Nicole Belloubet. Cela concernera par exemple les viols, les coups mortels, les vols à main armée.

L’objectif est "de désengorger les cours d'assises et de limiter la détention provisoire". "C'est une manière de permettre au justiciable d'avoir des jugements plus rapidement", a dit la ministre.

Actuellement, le tribunal correctionnel (un juge et deux assesseurs) juge des délits passibles de 10 ans d'emprisonnement, alors que la cour d'assises (trois juges et six jurés populaires, des citoyens tirés au sort) sanctionne les crimes passibles de la réclusion criminelle à perpétuité.

"Les cours d'assises se concentreront sur les crimes les plus graves, notamment en récidive et sur l'appel", a déclaré le Premier ministre. Actuellement, de nombreux viols sont requalifiés en agressions sexuelles pour être jugés, plus rapidement, en correctionnelle.

La création de ce tribunal criminel est une demande des chefs de juridiction, selon le Premier ministre, mais aussi de l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire). "On pourra juger des crimes comme des crimes", s'est félicitée auprès de l'AFP Céline Parisot, secrétaire générale de ce syndicat.

Cette annonce surprise s’inscrit dans une réforme plus large de la justice, vivement contestée par les syndicats, qui doit être transmise au Conseil d’État mi-mars avant une présentation du projet de loi devant le Conseil des ministres le 11 avril. Elle comprend cinq volets: sens et efficacité des peines, simplification de la procédure civile, simplification de la procédure pénale, transformation numérique et adaptation du réseau des juridictions.

"L'objectif est simple: bâtir une justice efficace, rapide et accessible à tous sur l'ensemble du territoire", a résumé le Premier ministre.

Il n'y aura "pas de grand soir de la carte judiciaire", a-t-il dit, à propos du chantier le plus sensible, qui provoque depuis plusieurs mois une forte mobilisation à travers la France. "Nous faisons le pari d’une réforme managériale qui part du terrain" car "tout ne se joue pas à Paris". Les chefs de juridictions auront "la possibilité de présenter des propositions d’organisation, territoire par territoire".

"L’intégralité des sites géographiques existants" sera "préservée". En revanche, les tribunaux d'instance (TI), qui jugent les petits litiges du quotidien (jusqu'à 10.000 euros d'amende) et les tribunaux de grande instance (TGI) seront fusionnés quand ils sont situés dans la même ville.

- Simplifier les démarches -

Pour les procédures pénale et civile, l'objectif de la réforme est de faciliter l'accès à la justice en simplifiant les démarches et en accélérant le rendu des décisions.

Au niveau pénal, le gouvernement plaide pour le dépôt de plainte en ligne, la forfaitisation de certains délits comme la consommation de cannabis, et la suppression de la présentation obligatoire au procureur d'un suspect en cas de prolongation de sa garde à vue.

Un dossier numérique unique sera créé, de la plainte jusqu'au jugement, auquel auront accès policiers, avocats, magistrats ou justiciables.

Au niveau civil, l'exécutif veut encourager les règlements amiables des différends. La réforme pourrait instaurer "le caractère exécutoire de la décision de première instance", c'est-à-dire l'application immédiate du jugement. Pour l'USM, qui critique cette mesure, le but est "d'assécher les appels, qui perdent un peu de leur sens".

Les annonces sur le sens et l'efficacité de la peine ont été largement dévoilées par le président mardi. Les peines de moins d'un mois seront proscrites et pourront jusqu'à 6 mois être effectuées en milieu ouvert. Cela permettra selon Emmanuel Macron de "sortir de prison plusieurs milliers de personnes", alors que la surpopulation carcérale atteint en moyenne 120% en France. En revanche, il veut qu'une peine de prison de plus d'un an soit effectivement et aussitôt exécutée.

Le président est revenu sur sa promesse de création de 15.000 places de prison supplémentaires, s'engageant désormais à la construction de 7.000 places d'ici 2022.

Partager cet article

Dans la même thématique

SIPA_01059366_000001
7min

Politique

Bataille audiovisuel public/médias Bolloré : « Ce n’est pas la gauche contre la droite, mais un modèle démocratique contre un modèle illibéral »

Le paysage audiovisuel français est en train de se fracturer en deux blocs. L’animateur vedette, Pascal Praud a accusé la patronne de France Télévision, Delphine Ernotte de mettre « une cible » sur les journalistes sa chaîne, après que cette dernière a qualifié CNews de « chaîne d’extrême droite ». A moins de deux ans de l’élection présidentielle, l’Arcom, le gendarme de l’audiovisuel, subit une pression inédite. Son président, Martin Ajdari sera, auditionné dans quelques jours au Sénat.

Le

La création d’un « tribunal criminel », annonce surprise de la réforme de la justice
5min

Politique

Mobilisation du 18 septembre : « Soit une politique de rupture est menée, soit on continue à mettre la pression »

A l’appel de l’intersyndicale, des centaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue partout en France pour protester contre le projet de budget pour 2026. Dans le cortège parisien, les manifestants, pas convaincus par la nomination de Sébastien Lecornu à Matignon, sont déterminés à maintenir la pression sur l’exécutif. Reportage.

Le

SIPA_01229633_000009
1min

Politique

Info Public Sénat. Bataille audiovisuel public/médias Bolloré : une délégation de sénateurs LR reçue à Radio France le 30 septembre

Alors que le ton se durcit entre les dirigeants de l’audiovisuel public et la chaîne CNews de Vincent Bolloré, qualifiée « d’extrême droite » par Delphine Ernotte, une délégation de sénateurs LR sera reçue par la patronne de Radio France Sibyle Veil le 30 septembre. Le 1er octobre, le président de l’Arcom, Martin Ajdari sera, lui, auditionné par la commission de la culture et de la communication de la chambre haute.

Le