La loi de moralisation de la vie publique aura-t-elle un effet sur les élections sénatoriales ?

La loi de moralisation de la vie publique aura-t-elle un effet sur les élections sénatoriales ?

La loi de moralisation de la vie publique du gouvernement Macron prévoit de limiter à 3 le nombre de mandats successifs. Le texte, s’il est adopté cet été, pourrait avoir un effet sur les élections sénatoriales de septembre.
Alexandre Poussart

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Premier chantier du gouvernement d’Emmanuel Macron, la loi de moralisation de la vie publique devrait lutter contre le cumul des mandats dans le temps en fixant à 3 le nombre de mandats électifs successifs. Un sénateur ayant déjà fait trois mandats d’affilée ne pourrait donc pas se représenter à sa succession.

13 sénateurs renouvelables ont fait au moins 3 mandats consécutifs

Les sénateurs suivront de près l’évolution de cette réforme en vue des prochaines élections sénatoriales qui auront lieu le 24 septembre, et renouvelleront la moitié de la Haute Assemblée. 13 sénateurs renouvelables lors de ce scrutin pourraient être concernés par cette mesure. C’est le cas du président du Sénat, Gérard Larcher, qui termine son quatrième mandat de sénateur des Yvelines - il a été élu sénateur pour la première fois en 1986 - mais pas consécutivement puisqu’il a été ministre de Jacques Chirac entre 2004 et 2007. Gérard Larcher a fait part de sa volonté de se présenter aux prochaines élections sénatoriales.

Certains sénateurs renouvelables concernés par ce non-cumul des mandats dans le temps hésitent à se représenter. Philippe Nachbar, sénateur (LR) de Meurthe-et-Moselle depuis 1992, n’a pas pris encore sa décision de briguer un quatrième mandat.

Le non-cumul des mandats dans le temps « met fin à l’expertise »

Jean Bizet, sénateur (LR) de la Manche depuis 1996, s’est déclaré candidat pour briguer un 4e mandat : « Je n’ai pas effectué exactement trois mandats consécutifs mais deux et demi puisque j’ai été élu en 1996 lors d’une élection partielle. » Celui qui préside la commission des Affaires européennes au Sénat trouve que cette future règle du non-cumul des mandats dans le temps ne prend pas en compte l’expertise des élus. « Dès mon premier mandat, j’ai travaillé au sein de la délégation aux affaires européennes. Nous l’avons ensuite transformée en commission à part entière. L’Europe est une priorité de la politique française et il faut plus qu’un mandat de sénateur pour acquérir une expertise sur le sujet » estime Jean Bizet.

Laisser les élus libres de se représenter

« Cette loi de moralisation et le non-cumul des mandats dans le temps donne l’impression de sanctionner tous les hommes politiques », juge Michèle André, présidente de la commission des Finances du Sénat, qui ne se représentera pas en septembre. « Il ne faut pas imposer de règle trop violente aux élus et leur laisser la liberté de juger s’ils peuvent cumuler des mandats ou non. Si certains sénateurs veulent siéger jusqu’à 80 ans, qu’ils le fassent. »

Certains sénateurs défendent cette idée d’un nombre limité de mandats parlementaires dans le temps. Gérard Miquel, sénateur socialiste du Lot, ayant trois mandats à son actif, a décidé de ne pas se représenter. « Je considère qu’il faut renouveler la classe politique et savoir s’arrêter. »

27 sénateurs renouvelables concernés par le cumul d’un mandat local dans le temps

Le contenu exact de cette loi de moralisation, qui sera menée par le ministre de la Justice François Bayrou, n’ayant pas encore été défini, nul ne sait si le non-cumul des mandats dans le temps concernera les mandats locaux. Si c’est le cas, cela pourrait influer sur les candidatures aux élections sénatoriales. Alors que la loi de 2014 sur le non-cumul d’un mandat national et d’un mandat local va être appliquée pour les sénateurs et renouveler la Haute Assemblée en profondeur, certains élus hésitent à lâcher leur siège sénatorial. 27 sénateurs renouvelables en septembre ont cumulé au moins 3 mandats locaux successifs.

Caroline Cayeux hésite à garder la mairie de Beauvais

« En septembre, j’avais prévu de choisir mon mandat local en tant que maire de Beauvais mais ayant déjà fait 3 mandats de maire, cette future loi pourrait m’empêcher de continuer en 2020, aux élections municipales », explique Caroline Cayeux, sénatrice (LR) de l’Oise. « J’hésite donc à opter pour mon mandat parlementaire et à me représenter aux prochaines sénatoriales car je n’ai fait qu’un mandat de sénatrice. »

Jean-Pierre Bosino, sénateur (PCF) de l’Oise, aurait bien choisi de se concentrer sur sa mairie de Montataire, mais il dirige sa commune depuis 1994. Il réfléchit donc à briguer un nouveau mandat de sénateur en septembre.

Créer un vrai statut de l’élu 

« Je ne suis pas opposé à cette loi de moralisation mais il faudrait créer un vrai statut de l’élu », affirme Jean-Pierre Bosino. « Quelqu’un qui vient du privé pour être élu est obligé de démissionner. Dix ou vingt ans plus tard, à la fin de ses mandats, il ne retrouvera pas un emploi. »

La loi de moralisation pourra-t-elle s’appliquer avant septembre ?

Le calendrier semble très serré pour que la loi de moralisation du gouvernement Macron soit votée, promulguée et appliquée aux élections sénatoriales de septembre. D’autant plus que la tradition politique veut qu’on ne change pas les règles d’une élection au moins six mois avant.

Si le gouvernement considère qu’une révision de la Constitution n’est pas nécessaire pour changer les règles d’une élection, et que le Conseil constitutionnel le valide, une procédure accélérée pourrait permettre de faire voter le texte en juillet. Cela dépendra aussi du calendrier des ordonnances pour réformer le code du travail.

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