La suppression de l’ENA : un « coup de communication »
Emmanuel Macron devait annoncer lundi soir, selon un projet d'allocution dont l'AFP a obtenu copie, la suppression de l’ENA,...

La suppression de l’ENA : un « coup de communication »

Emmanuel Macron devait annoncer lundi soir, selon un projet d'allocution dont l'AFP a obtenu copie, la suppression de l’ENA,...
Public Sénat

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

Emmanuel Macron devait annoncer lundi soir, selon un projet d'allocution dont l'AFP a obtenu copie, la suppression de l’ENA, installée à Strasbourg depuis le années 90. Un "très bon coup de communication mais qui ne règle absolument pas le problème de la formation des hauts fonctionnaires", selon David Guilbaud, énarque et auteur de "L'illusion méritocratique" (Éditions Odile Jacob).

QUESTION: Faut-il supprimer l’ENA pour rétablir l'ascenseur social ?

REPONSE: Depuis des années, il y a des réflexions sur une réforme de l’ENA, le classement de sortie et le contenu de la scolarité. Sans réelle réponse du côté de l’école ou de l’exécutif. Aujourd’hui, on nous sort comme réponse miracle à la crise des gilets jaunes la suppression de l’ENA. La question c’est : que va-t-on mettre à la place? Le projet originel de l’ENA reste valable. Il était de créer une école pour avoir à la fois des fonctionnaires bien formés et indépendants. Mais la logique du classement de sortie a complètement dévoyé ce projet. Elle embarque les élèves dans une course à l’échalote au détriment des contenus intellectuels qui devraient être dispensés par l’école. La vraie question n'est pas celle de la suppression mais celle de la réforme. Elle exigerait une réflexion approfondie, au-delà d'un très bon coup de communication mais qui ne règle absolument pas le problème de la formation des hauts fonctionnaires ni celui des inégalités sociales d’accès à la haute fonction publique.

QUESTION : Quelles seraient les pistes d'une réforme de l'ENA?

REPONSE : La question centrale, c'est : veut-on, comme dans le cas des élèves externes de l’ENA (admis après au moins trois ans d'études, NDLR), que dès 25 ans, les énarques aient une carrière toute tracée? Ou veut-on un dispositif plus progressif? Il y a bien aujourd’hui le concours interne (à l’administration) pour accéder à l’ENA, destiné à des personnes qui ont une expérience et passent le concours pour franchir le plafond administratif qui les empêche de progresser. Mais ces personnes sont mises dans le même panier que les externes formatés pour les épreuves du classement de sortie. Et, de fait, les externes sont surreprésentés dans les premières places et trustent dans une large mesure l'accès aux grands corps de l’Etat. On pourrait imaginer un autre modèle, fondé sur une logique de progression de carrière.

QUESTION: C’est le modèle de l’Ecole de guerre, des officiers qui font l’école de guerre après avoir servi un certain temps et révélé leurs qualités...

REPONSE: Oui. Mais il ne faut pas exagérer. Certains critiquent l’ENA en disant que, dans l’armée, être passé par Saint-Cyr et l’Ecole de guerre ne donne aucune garantie de terminer général. Ils semblent croire que les énarques bénéficient d’un droit à occuper, plus tard, les postes les plus prestigieux de l’administration. C’est un peu simpliste. Tous ceux qui accèdent à ces très hauts postes sont énarques, mais tous les énarques n’y accèdent pas. Il y a toujours une sélection en fonction du parcours et de l’expérience. Il faut donc éviter l’écueil d’une stigmatisation des énarques en général, comme si ces derniers bénéficiaient d’une rente qui les dispenserait de faire leurs preuves.

Partager cet article

Dans la même thématique

La suppression de l’ENA : un « coup de communication »
3min

Politique

Programmation énergétique : le Sénat acte la relance du nucléaire

Le Sénat a adopté en deuxième lecture l’article de proposition de loi de programmation énergétique entérinant la relance du nucléaire. L’objectif de construction de six puis huit EPR2 est ainsi inscrit dans la version adoptée par le Sénat, tout comme la composition « majoritairement » nucléaire du mix électrique français à horizon 2050.

Le

FRA : Assemblee : Quatre Colonnes
5min

Politique

Décès d’Olivier Marleix : « Nous sommes tous sidérés », confie Gérard Larcher

La mort brutale d’Olivier Marleix, ancien président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, a plongé le monde politique sous le choc. Ce mardi 8 juillet, de nombreux hommages lui ont été rendus au Parlement. Au Sénat, la réunion de groupe des Républicains s’est ouverte dans une atmosphère de recueillement.

Le

La suppression de l’ENA : un « coup de communication »
7min

Politique

Budget 2026 : ce que proposent les sénateurs avant les annonces de François Bayrou

Les groupes du socle commun du Sénat contribuent à la réflexion, en mettant sur la table quelques « pistes » d’économies pour un total de 25 milliards d’euros, dont une année blanche, même si le principe fait débat. Pour le centriste Hervé Marseille, il faut « toucher les grandes fortunes, car il faut des signaux », notamment envers le PS, qui veut plus de « justice fiscale ».

Le

La suppression de l’ENA : un « coup de communication »
7min

Politique

Texte sur l’énergie : les rapporteurs du Sénat veulent évaluer « l’impact financier » de l’éolien… mais aussi du nucléaire

Pas de jaloux. Après la tribune de Bruno Retailleau, qui appelle à arrêter les subventions à l’éolien, la majorité sénatoriale LR et centriste va défendre un amendement visant à évaluer « l’impact financier de toutes les formes de production d’énergie », explique le corapporteur centriste Patrick Chauvet, qui ne veut pas « stigmatiser » les énergies renouvelables. L’objectif global de la PPL Gremillet reste cependant bien la relance du nucléaire.

Le