Légitimé démocratique et décision politique : vif débat à Rennes

Légitimé démocratique et décision politique : vif débat à Rennes

Alors que le vote ne suffit plus toujours à assurer la totale légitimité démocratique d’une décision, débat entre Bruno Retailleau, Eric Coquerel et Philippe Martinez aux assises nationales de la citoyenneté, organisée par Ouest France à Rennes.
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La légitimité démocratique. Vaste débat, que les participants des assises nationales de la citoyenneté, organisée par Ouest-France, en partenariat avec Public Sénat, à Rennes, ont tenté d’aborder ce vendredi. Thème de la table ronde de l’après-midi : « De Notre-Dame-des-Landes à la loi travail en passant par l’écotaxe, le vote ne suffit plus à assurer la totale légitimité démocratique d’une décision politique. Pourquoi ? »

Bruno Retailleau, l’ancien président LR de la région Pays-de-la-Loire, en a profité pour rappeler tout le mal qu’il pense de l’abandon de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, alors qu’une majorité, lors du référendum organisé en Loire-Atlantique, s’était prononcée pour.

« Il y a une uberisation de la démocratie »

« Il y a une uberisation de la démocratie. On supporte de moins en moins les intermédiaires. Il faut tout faire sauter. Mais au bout du compte, (…) qu’est ce qui vous reste ? Des groupes de pression face aux élus » selon le président du groupe LR du Sénat (voir le début de la vidéo). Le sénateur de Vendée ajoute : « Je pense que l’abandon de Notre-Dame-des- Landes est la victoire d’une violence. Victoire d’une violence physique, d’une violence symbolique, contre le pacte qui lie entre eux les Français, qui fait que l’individu s’efface devant les citoyens. Or l’individu a de plus en plus de droits aujourd’hui et le citoyen de moins en moins de devoirs ». A la fin de son intervention, des « on a gagné ! », venant d’opposants à l’aéroport, montent de la salle.

Le député de la France Insoumise, Eric Coquerel, se dit « d’accord » sur l’analyse d’un contournement de la démocratie. Mais il ne prend pas les mêmes exemples. « On a aujourd’hui un système néolibéral qui contourne toutes les souverainetés populaires. Mais il ne faut pas se réveiller sur ces questions, quand vous pensez que localement, il y a quelque chose que vous estimez injuste. Quand en 2005, le traité constitutionnel européen a été refusé par tous les Français (lors du référendum), et que tous les parlementaires ont accepté de le remettre en actualité avec le traité de Lisbonne, (…) est ce que ce n’était pas une insulte à la souveraineté populaire ? (…) Quand on décide que le CETA va être appliqué en Europe, avant même que les parlementaires nationaux soient consultés, est-ce que ce n’est pas une insulte à la souveraineté populaire ? » demande ce proche de Jean-Luc Mélenchon (voir la seconde partie de la vidéo).

L’ambiance s’échauffe

Interrogé sur la légitimité de la réforme du droit du travail, annoncée par Emmanuel Macron dans son programme, Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, souligne « cette réforme n’avait pas été détaillé » lors de la campagne. Et de prendre un exemple : « Aviez-vous entendu parler dans le programme, d’Emmanuel Macron, de rupture conventionnelle collective ? Moi non. Pourtant, c’est la première mesure de la réforme du droit du travail qui est appliquée… »

Viennent ensuite les questions de la salle. L’ambiance commence alors à s’échauffer quand une femme met en cause le traitement par Ouest France des « mouvements (sociaux) qui ont existé à Rennes » et l’événement lui-même. Stéphane Vernay, directeur de la rédaction parisienne du quotidien régional et co-animateur du débat, répond au contraire qu’« il y a des gens ici qui ont la parole, qui ont des points de vue tout à fait opposés, qui ne sont pas forcément les nôtres. Et notre vocation, c’est de faire vivre le débat, c’est le sens de ces assises de la citoyenneté ». Le « vivre ensemble », thème des assises, ce n’est pas tous les jours simple, la preuve.

Question de la concentration des medias 

En démocratie, le rôle d’information de la presse joue aussi un rôle fondamental dans le processus de vote, et in fine de décision politique. Une question de la salle élargit ainsi le sujet à la pluralité des medias. Ou plutôt au manque de pluralité. Une femme évoque, là encore, le référendum de 2005, « avec des prises de position dans un sens », à l’époque, de la grande majorité des éditorialistes en faveur du projet de traité constitutionnel européen.

Philippe Martinez se prononce justement pour « une loi sur la concentration des medias », « la pluralité de la presse et son financement ». « On retrouve dans l’audiovisuel et la presse quelques très riches patrons qui détiennent la quasi-totalité des medias », ajoute-t-il, évoquant « les éditos de Serge Dassault, tous les premiers janvier, dans Le Figaro ». Bruno Retailleau rejoint sur le fond le numéro 1 de la CGT. Il met lui aussi en garde : « Comme les journaux ne vont pas bien, un certain nombre de grands capitalistes ont concentré un certain nombre de moyens de presse entre leurs mains. C’est préoccupant. Il faut faire très attention ». En démocratie, il y a parfois des rapprochements surprenants.

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