Les élus locaux font d’un « nouveau choc de décentralisation » une réponse aux gilets jaunes

Les élus locaux font d’un « nouveau choc de décentralisation » une réponse aux gilets jaunes

Les maires, départements et régions demandent à nouveau à Emmanuel Macron plus de décentralisation. Certaines de leurs demandes, comme le droit à l’expérimentation locale, sont déjà défendues par le chef de l’Etat. La loi NOTRe sera aussi révisée. Mais ils veulent aller plus loin.
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Ces trois-là ne se quittent plus. François Baroin, Dominique Bussereau et Hervé Morin ont bien compris qu’unis, ils pèsent davantage face au gouvernement. Depuis l’été dernier, le président de l’Association des maires de France (AMF), de l’Association des départements de France (ADF) et des Régions de France ont décidé d’agir ensemble face à un Etat qu’ils accusent d’être recentralisateur.

« Les 17 semaines qui viennent de s’écouler ont confirmé que cette attente de proximité est forte »

Ce mercredi 13 mars, les trois associations d’élus ont présenté leur contribution au grand débat. « Nous souhaitons un nouveau choc de décentralisation » résume Dominique Bussereau, président (ex-LR) du département de Charente-Maritime. Un mouvement de décentralisation du même niveau que les lois Defferre, en 1982.

Ils en font aussi une réponse à la crise des gilets jaunes. « Les 17 semaines qui viennent de s’écouler ont confirmé que cette attente de proximité est forte » pour François Baroin, maire LR de Troyes. « Nous avons été des lanceurs d’alerte et des précurseurs de la demande démocratique » souligne Hervé Morin, président centriste de la région Normandie. « Nous nous félicitons qu’à l’amorce du grand débat, le Président ait voulu s’appuyer sur les maires » ajoute François Baroin, qui semble oublier qu’il y a deux mois son association avait clairement pris ses distances, se cantonnant au service minimum…

« Autonomie financière et fiscale des collectivités »

Pour le président de l’AMF, c’est aujourd’hui le moment d’« offrir de nouvelles compétences aux régions, départements et communes ». Il affiche cinq objectifs, qui incluent une révision constitutionnelle. Les trois associations d’élus proposent notamment de donner un pouvoir réglementaire local, un droit à la différentiation et de prévoir « une conférence nationale de la décentralisation dans la Constitution ». Ils veulent aussi permettre d’assurer « réellement l’autonomie financière et fiscale des collectivités », ce qui impliquerait là encore de revoir la loi fondamentale. Ils souhaitent une loi de finances pluriannuelle des finances locales, demande qu’ils mettent sur la table depuis des mois. « Qui décide paie, et qui paie décide » aime à répéter François Baroin.

Autre point essentiel, surtout aux yeux de François Baroin : « Mettre la commune au cœur de la démocratie locale » en « inscrivant dans la Constitution la clause de compétence générale de la commune », qui lui permet de traiter de tous les sujets.

« Ouvrir le chantier d’une nouvelle répartition des compétences »

Territoires unis demande aussi un renforcement du rôle des collectivités dans les politiques publiques. Il s’agit de donner aux départements, qui gèrent déjà le RSA, « le pilotage de toutes les politiques sociales et de solidarité, et aux régions la cohésion des territoires avec le développement économique, l’enseignement supérieur, le financement des politiques d’excellence et la mobilité ». « Pour les régions, la question n’est pas celle d’un transfert massif de compétences, mais d’un toilettage de compétences » tempère Hervé Morin.

Toujours au chapitre du « qui fait quoi », les élus locaux rêvent d’« ouvrir le chantier d’une nouvelle répartition des compétences », notamment dans le domaine du logement, du sport, de la culture, de l’insertion, de l’emploi et de la formation. « Il faut plus de libertés pour les collectivités, chaque fois que la proximité est un gage de réussite » résume François Baroin.

Alors que l’idée de la participation à la décision publique ressort du grand débat, Dominique Bussereau souligne que les collectivités la pratique d’une certaine manière depuis longtemps. Il évoque « la démocratie municipale participative », les conseils de quartiers ou les référendums locaux. « Ça fait longtemps que les élus locaux pratiquent tout ça à grande échelle ».

Jeu de rôles

Interrogés sur l’éventualité, évoquée par le Canard enchaîné, du retour du Conseiller territorial, réforme de Nicolas Sarkozy supprimée ensuite par François Hollande, les trois présidents s’y opposent clairement. « C’est une proposition gadgetesque et ubuesque » pour Dominique Bussereau. « Si c’était certainement une bonne idée à l’instant T, aujourd’hui ce n’est pas adapté » ajoute François Baroin (voir notre article sur le sujet).

La liste des doléances de l’AMF, de l’ADF et de RF est longue. Mais à écouter les trois élus, une impression de jeu de rôles apparaît. Un jeu où on exagérerait son indignation. Car si toutes les revendications sont loin d’être reprises, l’exécutif n’est pas non plus totalement sourd. Emmanuel Macron défend ainsi depuis des mois l’idée d’expérimentations locales, l’une des demandes des trois associations d’élus. L’une des conclusions du grand débat est aussi déjà connue et les concerne directement, avec une révision de la loi NOTRe. Mais les élus pourront toujours se prévaloir de leur réussite. Ils veulent aussi maintenir la pression sur l’exécutif, au moment où beaucoup de décisions vont être prises pour la seconde partie du quinquennat.

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