Lutte contre le terrorisme : que contient le nouveau projet de loi ?
Hasard du calendrier moins d’une semaine après l’attaque de Rambouillet, Gérald Darmanin présente mercredi en Conseil des ministres un projet de loi qui entérine et renforce des mesures temporaires en matière de renseignement et d’antiterrorisme contenues dans la loi dite SILT qui arrive à échéance en juillet.

Lutte contre le terrorisme : que contient le nouveau projet de loi ?

Hasard du calendrier moins d’une semaine après l’attaque de Rambouillet, Gérald Darmanin présente mercredi en Conseil des ministres un projet de loi qui entérine et renforce des mesures temporaires en matière de renseignement et d’antiterrorisme contenues dans la loi dite SILT qui arrive à échéance en juillet.
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Adoptée en octobre 2017, pour renforcer la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, la loi dite « SILT » introduisait dans le droit commun diverses mesures à titre temporaire, jusqu’en jusqu’au 31 juillet 2021 en attendant une nouvelle loi.

C’est ce texte qui sera présenté en Conseil des ministres, mercredi, une semaine après l’avis rendu par le Conseil d’Etat. Son inscription était actée « depuis plusieurs jours » , assure une source proche de l’exécutif à l’AFP, balayant la suspicion d’une accélération du calendrier après l’attentat qui à coûter la vie à une fonctionnaire de police dans un commissariat de Rambouillet, vendredi dernier.

Ce meurtre au couteau perpétré au sein même d’un commissariat, alourdit la charge politique et symbolique d’un texte qui s’ajoute à la vingtaine de lois antiterroristes promulguées en France depuis 1986.

« L’hydre islamiste est toujours très présente », ce qui justifie de continuer « à renforcer nos moyens pour lutter contre une menace qui évolue », a plaidé Gérald Darmanin dans le Journal du dimanche.

Ce texte de 19 articles porté par le ministre de l’Intérieur vise, pour l’essentiel, à inscrire de manière permanente des dispositions temporaires de la loi SILT.

Pour mémoire, c’est sous l’impulsion du Sénat que 4 dispositions de la loi SILT comportent un caractère temporaire et sont amenées à disparaître au 31 juillet 2021 (à l’origine le 30 décembre 2020) : la mise en place de périmètre de protection (fouilles aux abords de grands évènements), la fermeture administrative des lieux de culte, les visites domiciliaires et les saisies (perquisitions administratives), enfin et surtout, les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (MICAS) qui s’apparentent à une assignation à résidence.

« Visites domiciliaires »

Le gouvernement souhaitait que les « visites domiciliaires », que Gérald Darmanin avait intensifiées après la décapitation de Samuel Paty en octobre 2020, puissent être menées en cas de simple « menace grave » et non plus en cas de menace d’une « particulière gravité », mais a choisi d’y renoncer après l’avis du Conseil d’Etat.

Les personnes condamnées à au moins cinq ans ferme (ou trois ans en récidive) pour terrorisme pourront faire l’objet de contraintes administratives « jusqu’à deux ans » après leur sortie de prison, contre un an aujourd’hui. La durée de ces mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (MICAS) était jugée trop courte par la majorité sénatoriale, l’année dernière, qui proposait une mesure judiciaire de surveillance allant jusqu’à 10 ans en cas de délit et 20 ans en cas de crime.

Lieux de culte

Outre la fermeture administrative de lieux de culte soupçonnés d’être liés à des faits de nature terroriste que permet la loi SILT, le projet de loi offre la possibilité de fermer des locaux dépendants de ces lieux de culte.

Cette mesure vise à « éviter que ces lieux soient utilisés par les associations gestionnaires du lieu de culte dans le but de faire échec à sa fermeture », explique-t-on au ministère de l’Intérieur.

Recours aux algorithmes

Sur le volet renseignement, une révision de la loi de juillet 2015 est nécessaire face à « l’évolution des technologies et des modes de communication, qui se caractérisent, en particulier, par l’utilisation croissante d’outils de communication chiffrés », souligne-t-on au ministère.

Ainsi, la durée autorisée pour recueillir des données informatiques sera portée à deux mois et les interceptions de correspondances échangées par voies satellitaires seront facilitées.

Enfin, le texte propose que la technique controversée de l’algorithme, introduite dans la loi de 2015 et qui permet le traitement automatisé des données de connexion pour détecter les menaces, soit pérennisée, dans le respect du droit européen.

Interrogé dans le JDD sur le risque d’atteinte aux libertés individuelles, Gérald Darmanin a demandé d’arrêter avec la « naïveté » « Toutes les grandes entreprises utilisent des algorithmes. Et il n’y aurait que l’Etat qui ne pourrait pas les utiliser ? » met-il en avant.

En octobre dernier, le Sénat avait adopté la prolongation de l’expérimentation de la technique de renseignement dite de « l’algorithme », dans l’attente d’une réforme plus large du cadre légal du renseignement ».

Le projet de loi, dont la promulgation doit aboutir avant la fin juillet.

 

Partager cet article

Dans la même thématique

Lutte contre le terrorisme : que contient le nouveau projet de loi ?
4min

Politique

Réforme des retraites : « La suspension est un leurre, elle sera retoquée en commision mixte paritaire », avertit Cécile Cukierman (PCF)

Au Sénat, la droite et une partie de la gauche tombent d’accord sur une chose : la procédure parlementaire permettra à la droite et le centre d’enterrer la suspension de la réforme des retraites. Un fait qui inspire de la sérénité à Claude Malhuret (Horizon) sur la possibilité de réécrire la copie de Sébastien Lecornu, et pousse au contraire Cécile Cukierman (PCF) à enjoindre les députés de gauche à le prendre en compte dans leur vote de la censure ce jeudi.

Le

Paris: Questions au gouvernement Assemblee nationale
4min

Politique

Budget : l’abandon du 49.3 va-t-il prendre les socialistes à leur propre piège ?

Avec le non-recours au 49.3, les socialistes ont été entendus par Sébastien Lecornu. Mais ils sont désormais contraints à voter le budget de la Sécurité sociale pour valider la suspension de la réforme des retraites. Un véhicule législatif confirmé par le Premier ministre, ce mercredi. Sans cette arme du parlementarisme rationalisé, les budgets de la Sécurité sociale comme celui de l’Etat seront également amendés par la droite. Ce qui pourrait amener à des copies finales difficiles à assumer pour les socialistes.

Le

Direct. Suivez la déclaration de politique générale de Sébastien Lecornu devant le Sénat
30min

Politique

Sébastien Lecornu accueilli froidement au Sénat : revivez les temps forts de la déclaration de politique générale

Le Premier ministre s'est exprimé devant les sénateurs pour sa déclaration de politique générale. Suspension de la réforme des retraites, décentralisation, budget...Le discours de Sébastien Lecornu était différent de celui prononcé à l'Assemblée la veille. Si l'ambiance était plus calme qu'au Palais Bourbon, l'accueil des sénateurs n'en était pas pour autant très enthousiaste.

Le

Lutte contre le terrorisme : que contient le nouveau projet de loi ?
9min

Politique

Budget : « Incertain » en 2029, le passage à 3 % de déficit arrivera « au mieux en 2031 », alerte Pierre Moscovici

« Le scénario économique pour l’année 2026 repose sur une hypothèse optimiste », affirme devant le Sénat Pierre Moscovici, président du Haut conseil des finances publiques. Il doute de la capacité du gouvernement à atteindre ses objectifs, avec un budget dont la copie finale est très incertaine. Seule « bonne nouvelle » : « Un début d’amélioration de nos finances publiques » en 2025, après « le bug majeur de 2024 ».

Le