Comment sont appliquées les mesures de lutte contre les violences conjugales ?

Comment sont appliquées les mesures de lutte contre les violences conjugales ?

Deux ans jour pour jour après le lancement du Grenelle des violences conjugales, un comité ministériel se réunissait dans la Manche pour tirer le bilan de l’application des dispositions votées durant le quinquennat. « La coordination entre les acteurs est la clé de la réussite de notre action », a rappelé le Premier ministre.
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A quelques mois de la fin du mandat d’Emmanuel Macron, il est l’heure de tirer le bilan de la « grande cause du quinquennat » : la lutte contre les violences conjugales.

« L’année 2021 a été marquée une fois encore par des féminicides dramatiques. Depuis le début de l’année, 76 femmes ont été tuées sous les coups meurtriers d’un assassin […] C’est dans cette volonté de combattre ce fléau que le gouvernement sous l’autorité de mon prédécesseur a lancé il y a deux ans jour pour jour […] le Grenelle contre les violences conjugales », a rappelé Jean Castex, ce vendredi, depuis, Saint-Lô.

« C’est un bilan qui ne peut être qu’en demi-teinte, car malgré les textes votés, nous en sommes à 76 féminicides cette année. Certains auraient peut-être pu être évités si des dispositifs comme le bracelet anti-rapprochement ou le téléphone grave danger avaient été mieux déployés », constate Annick Billon, sénatrice centriste, présidente de la délégation au Droits des femmes.

En matière de lutte contre les violences conjugales, la production législative a effectivement été féconde ces 4 dernières années avec l’adoption de deux projets de loi et deux propositions de loi (voir nos articles ici et ici). Sur les 46 mesures issues du Grenelles, 36 sont effectives. 100 % sont engagés, assure l’exécutif.

La proposition de loi LREM qui en a débouché, a conduit à la levée du secret médical pour les cas de violences, la saisie des armes blanches et des armes à feu dès le dépôt de plainte, L’organisation de l’accompagnement des enfants, ou encore l’encadrement du permis de visite pour protéger les victimes.

1000 places d’hébergement d’urgence supplémentaires

Le gouvernement s’est également engagé, ces deux dernières années, à augmenter le nombre de place d’hébergement d’urgence. 1 000 nouvelles places en 2020 et 1000 autres sont prévues pour la fin de l’année, pour arriver à 7800 places contre 5700 en 2019. « Il ne s’agit pas uniquement de créer des hébergements supplémentaires, il faut qu’ils soient bien répartis sur le territoire et adaptés à l’accueil des femmes qui sont souvent avec leurs enfants », insiste Annick Billon.

L’année dernière, l’annonce de 1000 places supplémentaires par Jean Castex avait été accueillie avec scepticisme par les associations. « L’hébergement des femmes repose principalement sur les centres d’hébergement généralistes. Ces femmes sont mélangées aux hommes, ce qui n’est pas sans causer des problèmes pratiques », avait expliqué Florent Guéguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité (FNARS) à Public Sénat.

Annick Billon se félicite, par ailleurs, de la signature en mai dernier, d’une convention pluriannuelle d’objectifs entre l’Etat et la Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) afin d’étendre les horaires du 3919 (accueil téléphonique des femmes victimes sur l’ensemble du territoire, incluant les Outre-mer. Une demande de la Délégation aux droits des femmes.

Ces derniers mois, des faits divers « qui ont défrayé la chronique » selon les termes du Premier ministre, ont surtout démontré des défaillances dans l’application sur le terrain des mesures votées. Les missions d’inspections qui ont suivi les meurtres de deux femmes sous les coups de leurs conjoints à Mérignac, le 4 mai, et à Hayange, le 2 mai, ont conduit l’exécutif à prendre des mesures supplémentaires cet été.

Parmi celles-ci, la mise à disposition de 3000 « téléphones grave danger » d’ici 2022, et la mise en place d’un fichier des auteurs de violences conjugales. Une instance de suivi judiciaire des situations individuelles sera également créée, et réunira magistrats, forces de sécurité intérieure et service pénitentiaire d’insertion et de probation.

La coordination territoriale entre les acteurs : la clé de la réussite

Ce matin, Jean Castex a insisté sur « la coordination territoriale entre les acteurs », « clé de la réussite de notre action ». Une circulaire a été signée en ce sens et prévoit des réunions mensuelles portant sur des situations individuelles « entre les acteurs compétents afin de s’assurer que l’information circule et que les mesures de répression et protection soient activées en temps et en heure ». Des réunions trimestrielles se tiendront aussi « pour veiller au bon déploiement sur le terrain de l’ensemble des dispositifs que nous avons, soit adoptés, soit renforcés », a-t-il détaillé.

Le gouvernement compte aussi sur les « bracelets anti-rapprochement » généralisés par la loi contre les violences au sein de la famille du député LR Aurélien Pradié. Un millier est à disposition des magistrats et 245 sont « actifs » contre une centaine au mois de juin dernier.

En juin dernier, le garde des Sceaux indiquait devant les sénateurs « avoir donné un coup de patte la fois dernière en disant que ces bracelets anti-rapprochement ne pouvaient pas rester dans les tiroirs. On en a augmenté l’utilisation de 100 % ». « Le bracelet anti-rapprochement, parfois, il n’est pas posé parce que la victime ne souhaite pas qu’il soit posé. Il faut aussi le dire ça », avait-il aussi expliqué.

Comme on le relevait au Sénat dernièrement, les ambitions affichées par le gouvernement devront se traduire par des moyens. Ils seront scrutés de près lors de l’examen du dernier budget du quinquennat.

 

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