Marche contre la vie chère : « Cette manifestation a montré que la Nupes vivait », selon l’écologiste Guillaume Gontard

Marche contre la vie chère : « Cette manifestation a montré que la Nupes vivait », selon l’écologiste Guillaume Gontard

La manifestation organisée dimanche « montre que la force de propulsion de la Nupes est intacte », selon l’insoumis Eric Coquerel, qui espère « progressivement aller vers un front plus large ». Dans cette « période historique », « la gauche et les écologistes ont la responsabilité de travailler ensemble » selon le sénateur Guillaume Gontard. Mais pour le communiste Pascal Savoldelli, « il y a une démocratie à trouver entre les différentes sensibilités politiques » de la Nupes.
François Vignal

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Une étape. Au lendemain de la marche du 16 octobre, manifestation « contre la vie chère et l’inaction climatique » organisée par les membres de la Nupes, les parties prenantes affichent leur satisfaction. Comme toujours, c’est le grand écart pour la participation. 140.000 participants selon les organisateurs, contre 30.000 selon la police et 29.500 selon un comptage du cabinet Occurrence pour un collectif de médias. Peut-être pas un déferlement, mais beaucoup de monde dans la rue. L’image était là.

Si le PS avec Olivier Faure, EELV, ou les communistes, mais sans Fabien Roussel, étaient présents, Jean-Luc Mélenchon attire comme toujours les projecteurs dans cette Nupes où LFI pèse davantage. Alors que les syndicats appellent à manifester ce mardi 18 octobre – Philippe Martinez de la CGT n’a pas trop apprécié que les partis défilent juste avant – le leader insoumis espère que cette marche est le début de quelque chose. « Avec ce que nous sommes en train de faire aujourd’hui, nous sommes en train de dessiner la construction d’un nouveau Front populaire, qui exercera le pouvoir dans son pays le moment venu », lance l’ancien candidat à la présidentielle, qui assure que « les bras restent toujours ouverts, pour que la plus grande convergence se fasse ».

Tourner la page d’une rentrée difficile pour la Nupes

Après une rentrée compliquée pour la Nupes, entre l’affaire Quatennens et la situation de Julien Bayou, la manifestation était aussi pour la gauche l’occasion de tourner la page et de revenir sur ses thèmes de lutte plus classiques, à commencer par le social. « C’est la confirmation que finalement, tout ça n’a pas enrayé la force de mobilisation de la Nupes, malgré les efforts faits. Elle est intacte », selon le député LFI Eric Coquerel, président de la commission des finances de l’Assemblée, qui insiste : « Ça montre que la force de propulsion de la Nupes est intacte ».

Pour le président du groupe écologiste du Sénat (à majorité EELV), Guillaume Gontard, la marche était utile aussi de ce point de vue. « Cela a montré que ça fonctionne. On arrive à faire des choses. Il y avait du monde, c’était très populaire ». Autrement dit « cette manifestation a montré que la Nupes vivait », alors que beaucoup pensaient qu’elle ne ferait pas long feu. « On le voit à l’Assemblée déjà, avec une capacité des groupes à fonctionner ensemble. Comme dans toutes les grandes familles, il peut y avoir quelques problématiques, mais on voit que ça fonctionne », ajoute le sénateur de l’Isère.

Un nouveau Front populaire, « de moins en moins un vœu pieux », selon Eric Coquerel

Mais de là à parler de « construction d’un nouveau Front populaire », comme le fait Jean-Luc Mélenchon, n’est-ce pas brûler un peu les étapes ? « C’est de moins en moins un vœu pieux », répond Eric Coquerel, « le Front populaire de 1936, ce n’était pas qu’une construction gouvernementale, c’était un front qui rejoignait des organisations syndicales, des mouvements associatifs. Et là, c’est un peu la même chose qui est en germe. Tout en gardant une indépendance vis-à-vis des uns et des autres, mais c’est être capable de se rejoindre pour la mobilisation ». Tout en avançant à l’Assemblée. Le président de la commission des finances en veut pour preuve « le travail qu’on va encore matérialiser cette semaine en présentant, tous ensemble, des mesures budgétaires alternatives ». Ce fidèle de Jean-Luc Mélenchon ajoute :

D’une coalition électorale pour les législatives, on est en train progressivement d’aller vers un front plus large, pas seulement pour les élections, mais plus global.

Guillaume Gontard ne voit pas de problème à faire le parallèle avec le Front populaire de Léon Blum. L’écologiste pense de qu’« on est sur une période historique, en termes de problématique et d’enjeux auxquels il faut répondre. Et on voit que c’est éminemment populaire ». « La gauche et les écologistes, on a la responsabilité de travailler ensemble », lance le sénateur. Reste que dans la manifestation, les mots d’ordre et pancartes semblaient pencher un peu plus du côté du discours anticapitaliste et anti-Macron, que de la planète à sauver. « Mais la question du capitalisme, c’est notre modèle de fonctionnement, c’est forcément lié à l’écologie », répond Guillaume Gontard, « aujourd’hui, on s’aperçoit que le combat écologique est éminemment social. C’est la même chose ».

Le communiste Pascal Savoldelli pointe « la personnalisation outrancière de la politique »

Le sénateur communiste Pascal Savoldelli, présent aussi à la manifestation, « pense qu’il est utile qu’il y ait une marche unitaire des forces de gauche ». « J’étais venu pour la vie chère, évidemment, mais aussi pour une autre distribution de la richesse », précise-t-il. L’élu du Val-de-Marne ne parle pas de Front populaire, mais note : « Quand la gauche s’occupe du travail, du salaire, de relever les minima sociaux, elle retrouve le peuple. Et elle en a besoin ».

Le sénateur PCF pointe cependant quelques efforts à faire, encore, au sein de la Nupes. « Il y a une démocratie à trouver entre les différentes sensibilités politiques, en respectant les analyses des uns et des autres. Il faut promouvoir ce qui est unitaire, respecter ce qui est divergent, et aller vers une construction politique dans le pluralisme », avance Pascal Savoldelli, qui ajoute par ailleurs, sans nommer Jean-Luc Mélenchon, qu’il « ne croit pas en la personnalisation outrancière de la politique. La politique, c’est un lieu vivant, avec des expressions politiques. La question, c’est de faire équipe là, de jouer collectif. Et parler plus des contenus ».

« La Nupes a tout intérêt à se pérenniser car nous avons des combats communs », selon le socialiste Rémi Cardon

Présent sur le pavé parisien dimanche, le sénateur PS Rémi Cardon reconnaît que Jean-Luc Mélenchon « va peut-être un peu trop vite sur l’interprétation » en parlant de Front populaire, « mais il y avait une ressemblance ». Pour le benjamin du Sénat, « c’était majeur d’être là », « surtout pour construire un rapport de force et obtenir des acquis sociaux ». On est donc loin d’un candidat commun pour le futur. « On ne peut pas sauter les étapes non plus », dit Rémi Cardon. Mais pour l’heure, « battons-nous ensemble. La Nupes a tout intérêt à se pérenniser car nous avons des combats communs. Maintenant, chaque parti a aussi des combats particuliers ».

« Nous sommes ensemble parce que nous croyons que les causes communes que nous portons valent plus que tout le reste » a estimé dimanche Olivier Faure, le numéro 1 du PS. Perché sur le camion de la manifestation, il lance à la foule, après Jean-Luc Mélenchon : « Faites-en sorte de rester unis. Votre unité est le gage de notre succès. Même si nous avons des différences, des divergences, faites en sorte de rester groupés, qu’aucun d’entre nous ne s’écharpe, d’être encore ensemble jusqu’à la fin, jusqu’à la victoire ».

« Le leadership de LFI n’amènera jamais la gauche au pouvoir »

Au sein même de son parti, l’accord de la Nupes fait débat, voire passe très mal pour une partie des socialistes. L’idée de Front populaire, « c’est quasiment le parti unique dans la tête de Mélenchon », raille un socialiste. Un autre membre du parti à la rose interroge d’ailleurs le poids réel de la manifestation. « Entre 30.000 et 140.000 personnes, ce n’est pas la même histoire. Le fait qu’on puisse écrire qu’il y a entre 30.000 et 140.000 personnes, est-ce qu’on n’est pas entré collectivement dans l’air de la post-vérité ? » interroge cet élu.

Le congrès du PS, début janvier à Marseille, sera l’occasion pour la contestation interne de faire entendre une autre voix. Qui s’exprime selon différents niveaux d’intensité. « Je n’étais pas à la manifestation. Je n’étais pas convaincu par cette modalité-là, derrière Jean-Luc Mélenchon. […] Ce n’est pas une démarche dans laquelle je me suis retrouvé » affirme ce matin sur Public Sénat le sénateur PS de Paris, Rémi Féraud, qui reste mesuré dans sa critique. Mais pour ce proche d’Anne Hidalgo, « l’important, c’est que dans cette semaine très sociale, on obtienne des avancées ».

Sous couvert d’anonymat, un autre socialiste est plus dur. « La question du congrès, ce sera est-ce qu’on continue à collaborer avec LFI, qui a leadership ? » avance ce socialiste. « Dupe de rien », il ajoute : « LFI a été imaginé, concocté, au profit du projet politique d’un homme, Jean-Luc Mélenchon. Et comme ils voient que LFI a des limites, ça doit être toute la Nupes qui doit être au service de Mélenchon. La nouvelle LFI, c’est la Nupes. Mais l’objectif reste le même ». « Je pense que le leadership de LFI n’amènera jamais la gauche au pouvoir », tranche le même, « et ce que je vois, c’est que Jean-Luc Mélenchon, qui était préretraité, ne l’est plus ». « Cette manifestation, c’était une démonstration de force et une remise en selle de Jean-Luc Mélenchon », note une observatrice de la gauche. Ce à quoi Eric Coquerel rétorque : « Je ne crois pas qu’il soit descendu de la selle »…

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