Mise en retrait d’Esther Benbassa : « Il fallait réagir vite », estime le président du groupe écologiste du Sénat

Mise en retrait d’Esther Benbassa : « Il fallait réagir vite », estime le président du groupe écologiste du Sénat

Suite aux accusations de harcèlement moral de la part d’une dizaine d’anciens collaborateurs parlementaires, la sénatrice Esther Benbassa est mise à l’écart du groupe écologiste du Sénat. Guillaume Gontard, le président du groupe écologiste indique ne pas avoir voulu attendre les suites judicaires éventuelles de l’affaire pour réagir, conformément au règlement intérieur de son groupe.
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La réaction du groupe écologiste du Sénat n’aura pas traîné. Quelques heures après l’article de Mediapart qui révèle, documents à l’appui, des accusations de harcèlement de la part d’une dizaine de collaborateurs parlementaires d’Esther Benbassa, la sénatrice de Paris était mise en retrait du groupe.

« L’article de Mediapart révèle des faits particulièrement graves, mais également répétés. Même si ces faits sont antérieurs à la constitution du groupe (le groupe écologiste a été créé à la suite du dernier renouvellement du Sénat en septembre 2020), il fallait réagir vite. Nous nous sommes réunis en présence d’Esther Benbassa et il a été convenu avec elle de sa mise en retrait du groupe. C’est-à-dire qu’elle ne peut plus représenter notre groupe dans les instances du Sénat », explique à publicsenat.fr, le président du groupe écologiste Guillaume Gontard.

« On ne pouvait pas se cacher derrière la justice »

Esther Benbassa vice-présidente du groupe écolo avant sa mise en retrait, ne pourra, par exemple, plus se rendre au Bureau du Sénat dont elle est membre. « C’était une réunion assez difficile. Il ne s’agissait pas de la suraccabler, mais nous devions appliquer le règlement intérieur du groupe qui impose aux sénateurs et sénatrices de se comporter normalement avec ses collaborateurs », rappelle le sénateur de l’Isère.

Mediapart rapporte que deux ex-assistants parlementaires songeraient à porter plainte contre l’élue. « Il y a un circuit judiciaire qui va se mettre en place. Certains semblent relever des prud’hommes, d’autres du pénal, mais ça ne peut pas nous enlever cette responsabilité. On ne pouvait pas se cacher derrière la justice. C’est pourquoi nous avons décidé cette mise en retrait qui n’est pas à proprement une sanction, mais elle permet aussi à Esther Benbassa d’apporter des éléments pour sa défense », souligne Guillaume Gontard.

Dans un communiqué publié hier soir sur son compte Twitter, Esther Benbassa indique regretter « des erreurs et des fautes » qu’elle a pu commettre « de façon non-intentionnelle » et présente ses excuses. Sollicitée par publicsenat.fr, la sénatrice n’a pas souhaité s’exprimer.

« A un moment donné, il faudra prendre une décision sur son exclusion ou sa réintégration »

La mise en retrait de la sénatrice court au moins jusqu’à la rentrée. « Ce qu’on souhaite c’est que cette affaire aille devant la justice. Y compris pour Esther Benbassa qui pourra alors se défendre, porter plainte en diffamation si elle le souhaite. Ce n’est pas à nous de tenir le rôle d’un tribunal, mais à un moment donné il faudra prendre une décision sur son exclusion ou sa réintégration » indique le président du groupe, qui reconnaît que ce sujet des relations professionnelles entre parlementaires et collaborateurs « est particulièrement important au Sénat »

Depuis 2018, le Sénat a mis en place une « cellule d’accueil et d’écoute » à destination des victimes de harcèlement. « Cette cellule pourra, le cas échéant, transmettre au président du Sénat une évaluation de la situation avec l’accord exprès du collaborateur. Le président du Sénat pourra, si nécessaire, faire un rappel à l’ordre, engager une procédure disciplinaire ou décider de saisir le Procureur », peut-on lire dans le compte rendu du Bureau du Sénat en date du 9 décembre 2017.

Depuis le 4 novembre 2020, une nouvelle procédure de traitement des situations de harcèlement a été mise en place. Elle fait intervenir le comité de déontologie parlementaire. Il est en charge d’émettre « une véritable instruction contradictoire », avant de faire des recommandations au président du Sénat, « telles que le prononcé d’une sanction disciplinaire par le Bureau ou la saisine du Parquet en application de l’article 40 du code de procédure pénale ».

Le 25 mai dernier, pour la première fois, le Bureau du Sénat a été amené à se prononcer sur une suspicion de harcèlement dénoncée par un collaborateur de la sénatrice LR, Joëlle Garriaud-Maylam. Si le Bureau a considéré que les faits n’étaient pas constitutifs de harcèlement, il a enjoint la sénatrice à s’engager « pour une durée minimale d’un an dans une démarche d’accompagnement individualisé en matière de management ».

« Les collaborateurs n’ont pas suffisamment confiance en l’institution pour mettre en œuvre les outils censés les protéger »

Du côté des associations de collaborateurs parlementaires, on estime que les outils mis en place ne sont pas assez opérationnels. « De toute évidence, les collaborateurs n’ont pas suffisamment confiance en l’institution pour mettre en œuvre les outils censés les protéger. C’est un métier qui requière un lien de confiance entre le parlementaire et son collaborateur. Lorsque ce lien est rompu, ils ont peur de se mettre en difficulté professionnelle s’ils alertent la cellule d’écoute », relève Yseline Fourtic-Dutarde, membre CGT collaboratrices & collaborateurs parlementaires, qui suggère par exemple l'idée d’un reclassement des collaborateurs au sein des groupes.

Florence Faye, secrétaire générale de l’Union syndicale des collaborateurs parlementaires du Sénat (UNSA-USCP-Sénat) milite depuis longtemps pour une « externalisation » de la cellule d’écoute.

Hasard du calendrier, le 13 juillet prochain, le Bureau du Sénat devra se prononcer une nouvelle fois sur une suspicion de harcèlement à l’égard d’un collaborateur parlementaire.

 

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