Transparence : René Dosière fait « confiance » au gouvernement

Transparence : René Dosière fait « confiance » au gouvernement

Le député René Dosière a présenté au ministre de la Justice, François Bayrou, ses propositions sur la transparence et la moralisation. Il veut lutter contre les micro-partis, interdire la réserve parlementaire. Mais il ne veut pas fiscaliser l’IRFM, ce qui reviendrait à « doubler le salaire des députés » met en garde René Dosière.
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La moralisation de la vie politique sera le premier gros chantier d’Emmanuel Macron. Un député travaille sur ces questions depuis plusieurs années, c’est René Dosière. Le député PS de l’Aisne, qui a soutenu Emmanuel Macron, a rencontré ce lundi à 14 heures le ministre de la Justice François Bayrou, chargé de défendre le futur projet de loi, pour lui présenter ses préconisations en matière de transparence. « Cet engagement du président de la République (sur la moralisation), que je porterai, est sans faille » a expliqué François Bayrou en recevant le député.

L’élu de l’Aisne fait douze propositions, traduites en plusieurs projets de lois. « C’est mon initiative » tient à préciser René Dosière. Autrement dit, rien d’organisé avec le nouvel exécutif. A charge au nouveau garde des Sceaux de reprendre ce qui lui semble juste : « C’est à lui de prendre ses responsabilités » a expliqué le député, lors d’une conférence de presse ce midi.

« Améliorer le financement de la vie politique car il y a un certain nombre de dérives »

Le député, qui ne se représente pas en juin, fait « grande confiance » à François Bayrou comme à « notre jeune président de la République pour impulser un renouveau pour la moralisation de la vie politique », après une première loi de transparence sous François Hollande, à la suite de l’affaire Cahuzac. Le fait que le premier ministre Edouard Philippe n’ait pas voulu jouer le jeu de la transparence, en 2014 (lire notre article), ne suscite pas d’inquiétude chez le député : « J’ai noté qu’il n’avait pas présenté d’appétence particulière sur sa déclaration de patrimoine », note René Dosière, « mais je suis de culture chrétienne. Et dans l’Evangile, les derniers arrivés sont aussi bien accueillis que les premiers ! »

L’un des objectifs de René Dosière est « d’améliorer le financement de la vie politique car il y a un certain nombre de dérives » (voir la vidéo ci-dessous. Images : Cécile Sixou et Nelson Getten). Il a notamment dans sa ligne de mire les 451 micro-partis. Il préconise d’« éviter que certains partis ne soient que des succursales bancaires ou d’imprimeries, comme c’est le cas dans la famille Le Pen. Il faut qu’un parti politique soit transparent », dit-il, rappelant que « chaque voix permet a un parti d’empocher 1,42 euros par an, soit 7 euros pour la législature. Or on s’aperçoit qu’il y a des pseudos partis politiques qui n’ont d’existence que pour récupérer un financement et disparaissent après ». Pour éviter ces dérives, il propose de donner une définition aux partis politiques, selon trois conditions : « Avoir un objet politique, rassembler des militants et soutenir des candidats aux élections locales et nationales ».

René Dosière veut "améliorer le financement de la vie politique car il y a un certain nombre de dérives"
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Le député propose également un statut pour les collaborateurs parlementaires, la suppression des 120 millions de la réserve parlementaire, l’interdiction des emplois familiaux pour les parlementaires, comme le prévoit l’exécutif, mais aussi pour les cabinets et groupes politiques des collectivités territoriales.

Certaines propositions de René Dosière recoupent celles du chef de l’Etat. Le député propose ainsi d’encadrer les fonctions de conseil des parlementaires, en interdisant de continuer ces fonctions, même si le parlementaire a créé sa société de conseil avant son élection. René Dosière souhaite aussi renforcer le non-cumul en limitant dans le temps à trois le nombre de mandats des parlementaires. Mesures qui n’est pas sans poser des risques juridiques : « On peut légitimement s’interroger sur la constitutionnalité de la limitation dans le temps », reconnaît le député de l’Aisne.

« Le Président dit qu’il faut fiscaliser l’IRFM. Or dans ce cas, on considère que l’indemnité parlementaire est de 13.000 euros »

Autre point important : le député de l’Aisne veut mettre au clair l’IRFM, l’indemnité représentative de frais de mandats. D’un montant de 5372 euros nets pour les députés et de 6109 euros nets pour les sénateurs, il s’agit en quelque sorte d’une avance sur les frais liés à l’exercice du mandat du parlementaire. Actuellement, les parlementaires ne paient pas d’impôts sur l’IRFM puisqu’il ne s’agit pas d’un revenu complémentaire. Le salaire des parlementaires, ou indemnité parlementaire de base, s’élève à 7209 euros bruts.

C’est pourquoi René Dosière a raison de dire que « fiscaliser l’IRFM, c’est d’une part augmenter de manière apparente le salaire des députés, le doubler, ce n’est pas un bon signal à donner » (voir la première vidéo). « Le Président dit qu’il faut fiscaliser l’IRFM. Or dans ce cas, on considère que l’indemnité parlementaire est de 13.000 euros » ajoute René Dosière. En mars dernier, le candidat Macron ne cachait pas sa volonté de mieux payer les parlementaires. Sur le media en ligne Explicite, il avait expliqué vouloir rémunérer les parlementaires « comme des cadres supérieurs ». « Si vous prenez la rémunération principale d’un parlementaire et vous ajoutez l’IRFM, il a de quoi vivre. Il faut que ce soit fiscalisé, que ce soit transparent » précisait clairement Emmanuel Macron.

Vouloir fiscaliser l’IRFM pourrait revenir à reconnaître que certains parlementaires utilisent cette enveloppe comme bon leur semble, puisqu’ils n’ont aucun compte à rendre dessus –  des guides de bonnes pratiques ont juste été écrits par l’Assemblée et le Sénat. Au lieu de changer les comportements, Emmanuel Macron semble vouloir adapter la règle aux comportements, fussent-ils discutables.

René Dosière voit une autre raison pour ne pas fiscaliser l’IRFM : « Ce serait obliger les parlementaires à justifier aux services fiscaux les frais professionnels qu’ils ont eus. Or je considère que l’indépendance du Parlement rend impossible que l’exécutif vienne s’occuper du fonctionnement interne du Parlement ».

Pouvoirs du déontologue renforcés

Au nom de cette séparation des pouvoirs, le député propose plutôt de renforcer les pouvoirs et les moyens du déontologue de l’Assemblée nationale. Il serait à temps plein et non plus à mi-temps. On pourrait lui « confier le soin de vérifier si l’IRFM est utilisée conformément à son objet. Et si ce n’est pas le cas, il aurait possibilité d’obliger le Parlementaire de rembourser, c'est-à-dire qu’on lui retient la somme en question sur sa prochaine indemnité ». Et des notes des frais, comme au Parlement britannique ? L’expérience anglaise montre, selon le député, « que ce n’est pas tout à fait satisfaisant ».

La proposition « de contrôle interne » de René Dosière ne concerne que les députés. Et les sénateurs ? Elle pourrait « être utilisée au Sénat ». Mais René Dosière s’empresse d’ajouter : « Les sénateurs sont assez grands pour faire le ménage chez eux ». Chaque assemblée tient en effet à garder la main sur son fonctionnement et ses règles internes. Le député préfère laisser à François Bayrou la charge d’impulser des règles pour tous.

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