« On déconfine notre colère ! » : pourquoi les soignants manifestent
Trois mois après le début du confinement, et un mois après le début du « Ségur de la santé », les blouses blanches sont dans la rue. Si des élus de tous bords les soutiennent, les soignants attendent toujours la mise en place de leurs revendications phares : plan d’embauche, revalorisation des salaires et réouverture des lits

« On déconfine notre colère ! » : pourquoi les soignants manifestent

Trois mois après le début du confinement, et un mois après le début du « Ségur de la santé », les blouses blanches sont dans la rue. Si des élus de tous bords les soutiennent, les soignants attendent toujours la mise en place de leurs revendications phares : plan d’embauche, revalorisation des salaires et réouverture des lits
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Par Ariel Guez

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Elle est finalement autorisée. Lundi, après plusieurs jours de doute, le préfet de police de la ville de Paris a confirmé que les soignants pourront défiler dans les rues de Paris, à partir « de 14 heures 30, à l’angle de l’avenue de Ségur et du boulevard Garibaldi, (à quelques pas du ministère de la Santé, ndlr) jusqu’à 18 heures, heure d’arrivée et de dispersion, à l’angle de la rue Constantine et de la rue de l’Université (proche de l’Assemblée nationale, ndlr) ».

Dans la capitale comme partout en France, les blouses blanches se sont donné rendez-vous pour réclamer une hausse générale des moyens dans leurs secteurs. Dans un communiqué unitaire, dix organisations syndicales affirment que les personnels de santé « ne se contenteront plus de belles promesses. Elles expliquent que la crise sanitaire a démontré « que les questions de santé, d’améliorations des conditions de travail des salariés de ces secteurs d’activité et la prise en charge de la population doivent être des enjeux prioritaires pour notre société ».

 

« La première mesure dont nous avons besoin, c’est une augmentation du nombre de soignants, pour donner le véritable bol d’air dont l’hôpital a besoin », explique à publicsenat.fr Yann Flecher, infirmier à l’AP-HP et élu du personnel CGT. Selon lui, il manque également 110.000 lits en France pour que les services puissent fonctionner correctement. « C’est l’une des leçons de la crise : il faut rouvrir les lits fermés ces dernières années », affirme-t-il.

 

Les élus de gauche soutiennent les soignants et seront dans la rue

Enfin, la bataille salariale doit s’engager, plaide Yann Flecher. Il revendique avec ses collègues une hausse de 100 points d’indice et une « revalorisation immédiate pour tout le personnel ». Après avoir été applaudies tous les soirs par les Français à leurs fenêtres lors du confinement, les blouses blanches comptent désormais sur leur soutien dans la rue. Et leur rendez-vous à quelques pas du ministère de la Santé n’a rien d’un hasard : « On déconfine notre colère ! » lance Yann Flecher. Le syndicaliste constate que la mobilisation est nécessaire puisque « visiblement, on n’a pas encore été entendus ».

Comme la CGT, Force Ouvrière appelle également à manifester. Les élus du Palais du Luxembourg eux aussi se mobilisent. Laurence Cohen, vice-présidente de la commission des Affaires sociales pour le groupe CRCE au Sénat, affirmait que les personnels soignants « pourront trouver les sénateurs communistes à leurs côtés ». Même son de cloche pour la sénatrice EELV Esther Benbassa, contactée par publicsenat.fr, et qui sera cet après-midi avec les blouses blanches. Comme Yves Veyrier (FO) sur notre antenne, l’eurodéputé Yannick Jadot l’eurodéputé EELV, expliquait dans une interview donnée à nos confrères de France 2 qu’il fallait « augmenter les salaires, de 300 euros en moyenne » et  « repenser l’hôpital ».

« Il y a eu des plans pour l’automobile et pour l’aéronautique, mais pas encore pour le personnel soignant »

Des mots qui feront certainement écho à ceux que Bernard Jomier, médecin généraliste qui est retourné auprès des malades lors de la crise, a pu tenir ces dernières semaines. Le sénateur de Paris, apparenté au groupe socialiste, maintient qu’il faut une augmentation des salaires, mais aussi une refonte globale de la gouvernance de l’hôpital en France. S’il ne sera pas dans le cortège ce mardi après-midi, il a marqué son soutien au personnel de l’hôpital Saint-Louis en étant à leurs côtés au moment de leur départ vers le ministère de la Santé.

S’il ne sera pas non plus dans la rue, René-Paul Savary, ancien médecin et sénateur Les Républicains « comprend » la vague de colère des blouses blanches. « Il y a eu des plans pour l’automobile et pour l’aéronautique, mais pas encore pour le personnel soignant », déplore-t-il au micro de publicsenat.fr. Sur le volet de la rémunération, René-Paul Savary regrette « qu’aucune proposition » n’ait été mise sur la table par le gouvernement après un mois de « Ségur de la santé ».

Un don de chèques vacances pour répondre à la colère ?

Même du côté de La République en marche, on peut trouver des voix pour comprendre la colère des soignants. Pour y répondre, à l’Assemblée nationale, certains députés de la majorité ont proposé une loi visant à mettre en place un système de dons de chèques vacances pour le personnel hospitalier. Alors que le texte doit être étudié en première lecture ce mardi par les sénateurs, cette mesure est loin de faire l’unanimité au Palais du Luxembourg, comme nous vous l’expliquons dans cet article.

Toutefois, comme on a pu le constater lors de l’étude du projet de loi Santé en 2019 ou lors de l’examen des PLFSS successifs ces dernières années, il existe une réelle convergence entre les différents groupes politiques dans les deux chambres sur la question de l’hôpital : tous déplorent de mauvaises conditions de travail pour les soignants. Après une crise sanitaire sans précédent, l’union pour l’hôpital sera-t-elle enfin effective ? Yann Flecher l’espère : « On ne veut pas le retour à l’anormal ».

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