Politique de la ville : ce qu’il faut retenir du discours de Macron

Politique de la ville : ce qu’il faut retenir du discours de Macron

Dans un discours de plus d’une heure le président de la République a dévoilé son plan pour la politique de la ville. Emploi, sécurité, services publics. Emmanuel Macron annonce une mobilisation générale en direction des quartiers populaires.
Public Sénat

Par Héléna Berkaoui

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Après Clichy Sous-Bois et Roubaix, le chef de l’État s’est rendu dans la ville de Tourcoing dans le cadre du lancement de son plan pour la politique de la ville. En proie aux critiques des acteurs locaux suite à ce que certains qualifient de « coupes sombres dans la politique de la ville » Emmanuel Macron a tenté d’apaiser les tensions.

Lire aussi : Politique de la ville : « Tout cela finira mal si on ne met pas les moyens nécessaires » prévient le maire de Nanterre

La maire de Lille, Martine Aubry, s’est quant à elle interrogée sur le sens de sa visite « quand on casse le logement social et les emplois aidés. »

« Que ceux qui les défendent les prennent » rétorque Emmanuel Macron sur la question des emplois aidés. Il a aussi taclé la méthode de François Hollande, sans toutefois le nommer. « Ce n’est pas sain, selon les cycles électoraux, de monter à 500.000 ou 600.000 les emplois aidés » a-t-il déclaré. François Hollande avait porté les emplois aidés au nombre de 459.000 contrats aidés en 2016.

Emmanuel Macron souhaite un « plan de mobilisation nationale » pour les quartiers. Le chef de l’État entend ramener « l’effectivité des droits des citoyens dans les quartiers » et mettre fin à « l’assignation à résidence. » Celui qui est présenté comme le « président des riches » et de « la mondialisation heureuse » a fustigé « une mondialisation », « une métropolisation » qui laisse les plus démunis à la marge. Il met en cause « une société de statut où le déterminisme est plus fort qu’il y a trente ans. »  

Les principales propositions d’Emmanuel Macron pour la politique de la ville :

LES SERVICES PUBLICS

Emmanuel Macron revient sur les suppressions de subventions aux associations et aux collectivités

Le président de la République a assuré que les subventions aux associations ne souffriraient pas de coupes budgétaires. L’annonce de la suppression de 46,5 millions de crédits alloués à la politique de la ville avait nourri la grogne des acteurs locaux.  

Doublement des maisons de santé

Les quartiers dits de « politique de la ville » comptent deux fois moins de généralistes et trois fois moins de spécialistes. Emmanuel Marcon souhaite remédier à cette situation en doublant les maisons de santé sur ces territoires.  

Construction de crèches et majoration du complément de mode de garde

Emmanuel Macron annonce « dès 2018 », « une majoration de 30 % du complément de mode garde (...) ce qui représente 138 euros par mois. » Le chef de l’État constate que « dans les quartiers cette pauvreté a deux visages, celui des femmes et celui de leurs enfants (…) il y a 5 % de place en crèche dans les quartiers contre 20 % » dans le reste de la France. Cet autre constat pour le moins alarmant quand la précarité des familles monoparentale dans les quartiers défavorisés amène le président de la République à créer « un plan dédié à la construction de crèches dans les quartiers. »

Doublement des crédits de l’ANRU

Déjà annoncé, le doublement des programmes de rénovation urbaine portera les crédits à hauteur de 10 milliards d’euros sur les premières années. Emmanuel Macron a dit sa volonté de « reconstruire la ville belle, redonner la dignité au quotidien. » Il a par ailleurs salué le plan Borloo et affirmé que le « plan logement » devait veiller à instaurer une mixité sociale.

Un accélérateur d’associations

À l’image des accélérateurs de start-up, le président de la République entend créer une plateforme unique pour mutualiser les bonnes initiatives. « Le financement et l’évaluation » des associations permettraient ainsi de démultiplier les associations qui réussissent, selon la formule du président.  

LA SÉCURITÉ

Des contraventions pour l’usage ou la détention de stupéfiants

Emmanuel Macron veut un « changement de notre politique pénale. » Gérard Collomb avait déjà annoncé sa volonté de mettre en place une contravention qui remplacerait le tribunal pour réprimer l’usage ou la détention de stupéfiants en mai 2017. Emmanuel Macron estime que cette mesure – qui reste à définir – « désengorgera les tribunaux. »

Police de sécurité du quotidien

Emmanuel Macron a annoncé que la police de sécurité du quotidien (PSQ) serait mise en place prioritairement dans les quartiers populaires. L’expérimentation de la PSQ doit démarrer en 2018 dans une quinzaine de villes.

Le chef de l’État a aussi évoqué « la possibilité d'éloigner du territoire des jeunes dont on sait qu'ils produisent des nuisances et rendent la vie des quartiers insupportables » sans pour autant « qu’ils aient été pris en flagrant délit. »

Lutte contre la radicalisation

« Ceux qu’on appelle les radicalisés, ils sont nés sur le sol de la République, ils sont allés à l’école de la République » rappelle Emmanuel Macron. S’il refuse « le piège de la stigmatisation » il estime que ce phénomène doit « nous conduire à nous remettre en question. » Selon le chef de l’État la radicalisation est du moins en partie due au fait que « la République a démissionné. » Pour Emmanuel Macron, « le combat que nous devons ici conduire c’est de rétablir la République. » Il annonce un plan de lutte contre la radicalisation mené par le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb. « Une quinzaine de plans de lutte contre la radicalisation » seront mis en place d'ici au début de l'année 2018.

L’EMPLOI

Emmanuel Macron veut « pénaliser la discrimination à l’embauche »

Dans « la lutte contre les discriminations (…) la clef, la réponse c’est de pénaliser les entreprises » affirme Emmanuel Macron. Le chef de l’État souhaite « que nous rendions publics les entreprises qui ont les pires pratiques. » Pas de nouvelles sanctions financières donc mais une stratégie aussi appelée « name and shame » (nommer et blâmer). Pour contrôler lesdites pratiques. Emmanuel Macron entend multiplier les campagnes de testing des entreprises privées. Il s’agit d’envoyer des curriculum vitae factices afin de débusquer les entreprises qui se rendraient coupable de la discrimination à l’embauche. Emmanuel Macron a également annoncé qu’il renforcerait « les moyens de l’inspection du travail. »  

« Il y a une autocensure qui s’est installée chez beaucoup de nos jeunes » regrette Emmanuel Macron. Pour briser ce fameux plafond de verre, le chef de l’État souhaite un « travail sur l’orientation des jeunes dès le collège et le lycée. »

Les contrats francs

Le chef de l’État propose ici un dispositif simple et effectif pour les quartiers populaires dès le 1er janvier prochain. Les contrats francs concernent « tous les demandeurs d’emploi, sans critères d’âge. » Les entreprises qui embaucheront un demandeur d’emploi résidant dans des quartiers populaires toucheront une prime de 5.000 euros par an sur trois ans pour un CDI et une prime de 2.500 euros par an sur deux ans pour un CDD. Les emplois francs seront généralisés en 2020.

« On ne parle de la Seine-Saint-Denis que quand il y a des émeutes. Mais c'est le département avec le plus de créations d'entreprises en France » observe le président de la République. Emmanuel Macron a annoncé qu’il favoriserait « l’accès à l’entreprenariat. »

Les contrats aidés maintenus pour les quartiers

Emmanuel Macron a annoncé qu’il maintiendrait les emplois aidés « au niveau de 200.000 » dans les quartiers en difficulté. Déjà annoncé par Édouard Philippe, le maintien d’une partie des contrats aidés – il y en avait 320.000 en 2017 – ne signifie que le président souhaite voir perdurer ce dispositif. Le chef de l’État a affirmé que l’emploi aidé n’était « pas la bonne solution quand il n'y a pas une formation à la clé pour trouver un emploi. » Le gel des contrats aidés avait déclenché la colère des acteurs locaux, notamment lors des états généraux de la politique de la ville. « Que ceux qui les défendent les prennent » s’est emporté Emmanuel Macron, soulignant qu’il n’était « pas sain, selon les cycles électoraux, de monter à 500.000 ou 600.000 les emplois aidés. » Une phrase qui résonne comme une pique à François Hollande. Son prédécesseur avait porté à 459.000 le nombre de contrats aidés en 2016.

Un plan pour le permis de conduire

Le président de la république veut « d’ici 6 mois, un plan national pour le permis de conduire. Avec un budget qui permettrait de « financer le code et le permis de conduire », il souhaite aussi « simplifier les procédures. »

L’ÉDUCATION

Ouverture des bibliothèques soirs et week-end

« L’État accompagnera toutes les communes qui sont prêtes à ouvrir en soirée et le week-end les bibliothèques » assure Emmanuel Macron.

Réouverture des internats d’excellence

Pass culture

« Les Pass culture, dès la fin 2018, seront expérimentés » dans les quartiers populaires. Emmanuel Macron évoque « une émancipation par la culture. »

Réforme de l’orientation

« L’année de terminale sera structurée de manière beaucoup plus efficace, dès le premier trimestre on va orienter les élèves vers les formations qui sont possibles » explique le président de la République tout en rappelant la réforme de l’Université menée par la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal.  

Aide aux stages de 3ème

Emmanuel Macron veut une politique qui aide les jeunes à « obtenir leur stage » ce qui se fait déjà dans la région des Hauts-de-France.

Emmanuel Macron a rappelé les mesures prises par son gouvernement : réouverture des classes bilingues, doublement des classes de CP dans les établissements dits REP+ et l’opération du ministre de l’Éducation « devoir fait » qui permet aux élèves de travailler dans leur établissement après les heures de cours. 

 

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