Présidentielle : que proposent les candidats sur l’immigration ?

Présidentielle : que proposent les candidats sur l’immigration ?

Organisée par divers acteurs de la société civile, plusieurs candidats à l’élection présidentielle et leurs représentants étaient invités, ce vendredi 1er avril, à une audition au Musée national de l’histoire de l’immigration pour détailler leurs propositions sur le sujet. A cette occasion, Public Sénat détaille les mesures phares des 12 candidats.
Public Sénat

Par Louis Dubar

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Thème incontournable des campagnes présidentielles, la problématique des flux migratoires s’est de nouveau imposée dans les débats à l’heure des déplacements de population provoqués par la guerre en Ukraine. Cheval de bataille à droite, de nombreux candidats proposent un meilleur encadrement des migrants et des réfugiés séjournant en France. A gauche, les candidats misent sur la liberté de circulation, l’augmentation des capacités d’accueil et le renforcement du droit d’asile.

Éric Zemmour, « une immigration zéro » pour contrer le « grand remplacement »

L’immigration au cœur des préoccupations du projet présidentiel de l’ex-éditorialiste, le candidat défend une vision implacable à coups d’expression choc ou de théorie complotiste comme le « grand remplacement » et « remigration. » Sur BFMTV, le candidat du parti « Reconquête » s’est dit favorable à la construction d’un « mur » aux frontières extérieures de l’Union européenne.

Éric Zemmour souhaite « stopper les flux migratoires » en supprimant le droit du regroupement familial et « revenir à l’esprit originel du droit d’asile. » Le candidat propose que les demandes d’asile soient déposées auprès des services consulaires français en dehors du territoire national « pour éviter l’installation des déboutés qui ne repartent jamais. » Il souhaite également limiter l’accès aux aides sociales qui encourageraient selon lui les étrangers extra-européens à venir s’installer en France. Le programme du candidat liste une série d’aides sociales non contributives : allocations familiales, aides au logement, RSA et minimum vieillesse. Le programme du parti « Reconquête » envisage une suppression du droit du sol et un durcissement des conditions de naturalisation en augmentant la durée de résidence à 10 ans et exige des candidats à la citoyenneté française, « une parfaite maîtrise de la langue, une assimilation réelle et une absence totale de condamnation judiciaire. »

Éric Zemmour envisage d’instaurer une agence de gardes-frontières « à statut militaire pour épauler la police. » Il prévoit la création d’un ministère de la « Remigration » pour « mettre en œuvre » l’expulsion « des étrangers indésirables. » Éric Zemmour propose d’expulser les étrangers condamnés par la justice, les fichés S étrangers et les étrangers extra-européens « au chômage au terme d’un délai de six mois. » Le candidat du parti « Reconquête » propose de durcir les conditions d’accès au territoire hexagonal en instaurant une caution « obligatoire » de 10 000 euros pour l’obtention d’un visa. Cette mesure concernerait uniquement les citoyens étrangers provenant des pays « dont sont majoritairement issus les immigrés clandestins. » Cette vision migratoire s’étend également à l’enseignement supérieur. Le candidat propose de conditionner l’accès aux formations universitaires françaises aux étudiants étrangers en acceptant uniquement les profils « les plus prometteurs. »

Marine Le Pen, un projet de loi référendaire pour définir la politique migratoire nationale

Comme le candidat du parti « Reconquête », Marine Le Pen souhaite reprendre la main sur l’immigration, une question qui représente à ses yeux, un « grand défi du XXIe siècle. » La députée du Pas-de-Calais proposerait en début de mandat, un référendum pour définir les contours de sa politique migratoire. Le programme du Rassemblement National (RN) détaille deux grands objectifs : « La maîtrise de l’immigration et protection de la nationalité et de la citoyenneté. »

Pour contrôler les flux migratoires, le projet de loi référendaire du RN propose l’expulsion des étrangers condamnés pour « des crimes ou des délits graves ou de ceux qui font peser un risque sur l’ordre public. » La nouvelle loi permettrait de mettre fin aux régularisations des étrangers en situation irrégulière, quelques cas « exceptionnels » pourront bénéficier d’une régularisation. La candidate souhaite instaurer un contrôle du regroupement familial, « selon des critères stricts. » La création d’une « priorité nationale » est également prévue dans le projet de la députée. Ce principe permettrait aux Français de bénéficier d’un avantage dans l’accès à l’emploi et à un logement social. Elle propose une réforme des prestations sociales en accord avec ce principe. « Les prestations de solidarité qui ne relèvent pas d’un régime d’assurance » seraient réservées aux citoyens Français. Les étrangers pourraient bénéficier des prestations de solidarité uniquement après cinq ans de travail dans l’Hexagone. « Devenue l’une des voies principales de l’immigration illégale », la candidate promet de réformer la procédure du droit d’asile pour mieux l’encadrer et de réserver ce droit aux personnes « dont la vie ou la liberté seraient menacées gravement. » La nouvelle loi fixerait aux réfugiés admis à séjourner en France, « des devoirs. »

La candidate promet également une réforme de l’obtention de la nationalité française. Elle promet une suppression du droit du sol. L’obtention de la citoyenneté serait possible uniquement « par filiation. » « Ne peuvent être français que les personnes dont l’un des parents est Français », précise-t-elle.

Nicolas Dupont-Aignan, un référendum dans les 100 premiers jours sur la suspension du regroupement familial et la suppression du droit du sol

Interrogé sur CNews au sujet des questions migratoires, le constat est clair pour le candidat de Debout La France : « Il faut de vraies mesures pour bloquer l’immigration. » Nicolas Dupont Aignan propose dans son programme, un projet pour « rétablir la cohésion » nationale. Le député propose l’organisation d’un référendum dans « les 100 premiers jours du mandat sur la suspension du regroupement familial et la suppression du droit du sol. »

Le projet présidentiel porté par Nicolas Dupont-Aignan « réaffirme la supériorité des lois nationales dans le domaine de l’immigration » par rapport aux lois et directives européennes. Le candidat à l’élection présidentielle souhaite abolir « le système Schengen. » Il prévoit le recrutement de « 10 000 policiers de l’air et des frontières » pour contrôler les frontières nationales. Pour réguler les flux, le député envisage un vote annuel au Parlement d’un quota correspondant « aux capacités d’accueil. » Il propose la création d’un autre quota destiné aux étudiants étrangers. Cette mesure viserait « à stopper le pillage des pays en développement » et la fuite des cerveaux.

Le projet présidentiel envisage un délai de carence de cinq ans pour les étrangers pour recevoir les aides sociales. Nicolas Dupont-Aignan prévoit la suppression de l’Aide médicale d’Etat, le conditionnement des aides sociales et la création d’une caisse d’assurance sociale dédiée aux étrangers. Tout étranger condamné à une peine de prison serait automatiquement expulsé vers son pays d’origine dès sa libération de prison.

Jean Lassalle, garantir l’asile et lutter contre l’immigration illégale

Dans le volet ‘sécurité’ de son projet présidentiel, le Landais préconise un renforcement des moyens alloués à la lutte contre l’immigration illégale, tout en « respectant le droit d’asile », un droit jugé fondamental selon Jean Lassalle. Le candidat à l’élection présidentielle préconise une augmentation des effectifs des douanes et des forces frontières.

Valérie Pécresse pour un référendum permettant au Parlement de délivrer des quotas d’immigration

La présidente de la région Île-de-France se présente comme la candidate qui propose « de tourner la page à dix ans de laxisme migratoire. » Sur ce sujet, la candidate plaide pour une immigration « choisie. » Valérie Pécresse préconise l’instauration d’un quota de titres de séjours « par pays et par métier. » Pour réaliser cette ambition, les Français seraient invités à s’exprimer par référendum sur une réforme constitutionnelle, autorisant le Parlement à fixer des quotas d’immigration. La candidate propose également un « nouveau » droit d’asile. Les demandeurs feraient une demande dans les services consulaires ou aux frontières nationales.

Si elle est élue présidente de la République, elle remettrait en cause plusieurs accords migratoires, notamment avec les pays n’acceptant pas « de reprendre leurs ressortissants. » Elle propose d’inscrire ce durcissement dans le cadre européen. L’expulsion des « clandestins » s’effectuerait par l’agence européenne Frontex qui assurerait le financement et l’escorte. Elle prône l’expulsion des étrangers, une fois la peine effectuée, une mesure également défendue à droite par Nicolas Dupont-Aignan. Elle propose également le renforcement des accords bilatéraux pour permettre aux délinquants étrangers « de purger leur peine dans leur propre pays. »

Valérie Pécresse souhaite le rétablissement « des tests osseux pour les mineurs étrangers sans papiers » pour vérifier leur âge. En cas de refus, ils seraient considérés comme « présumés majeurs et donc expulsables. » L’ex-ministre préconise une réforme des aides sociales, aides « incitatives » pour les immigrés. La candidate de droite souhaite l’application d’une préférence nationale pour les prestations sociales non contributives. Si elle est élue présidente de la République, Valérie Pécresse proposerait de limiter l’Aide médicale d’Etat aux soins urgents.

Emmanuel Macron, réformer le droit d’asile et l’obtention des titres de séjour

A Aubervilliers, aux Docks de Paris, le président candidat a dévoilé son programme. Dans son propos liminaire, Emmanuel Macron a affirmé une position ferme sur les questions migratoires. Il prévoit une évolution du système actuel en faisant évoluer les conditions d’obtention des titres de séjour long et une « refonte de l’organisation du droit d’asile ». Le président de la République propose de conditionner l’obtention des titres de séjour de quatre ans ou plus aux étrangers qui réuniraient « un examen de français » et qui seraient engagés dans une démarche d’insertion professionnelle. Il propose une expulsion des étrangers qui perturbent « l’ordre public. » Au niveau européen, il souhaiterait poursuivre les réformes de l’espace Schengen, une initiative qui permettrait selon lui de « renforcer » les frontières de l’espace communautaire. A l’échelle hexagonale, le président envisage la création d’une « force des frontières. »

Emmanuel Macron souhaite également faciliter l’expulsion des candidats qui n’ont pas obtenu l’asile, en activant les « mesures d’éloignement » le plus rapidement possible. Concernant les pays refusant d’accueillir leurs ressortissants, il propose une réduction du nombre de visas, « une politique logique que je continuerai d’assumer », précise-t-il. Le président candidat souhaite entamer une réflexion autour du modèle d’intégration, sans préciser dans son programme les contours d’une politique.

Yannick Jadot promet « une autre politique migratoire »

L’eurodéputé écologiste place son programme sous le signe de la lutte contre les discriminations. S’il est élu président de la République, Yannick Jadot propose la fin de la politique migratoire actuelle, une politique obéissant à des impératifs « sécuritaires », selon lui. Yannick Jadot propose un virage politique à 180°, une nouvelle politique migratoire décidée par « un grand ministère des solidarités. » Le candidat promet aux migrants, le respect des droits fondamentaux et « l’accès à la santé et à des hébergements dignes. » Il envisage la fin du « harcèlement policier et judiciaire » à l’encontre des migrants et des aidants. Enfin, le candidat propose la régularisation des « personnes installées en France justifiant d’un travail, d’une vie familiale ou d’enfants scolarisés. »

Anne Hidalgo s’engage à mieux accompagner les demandeurs d’asile

Pour la maire de Paris, « l’immigration mérite une politique réfléchie et apaisée plutôt que les excès et les fantasmes dont elle fait trop l’objet. » A l’heure de la guerre en Ukraine, Anne Hidalgo propose un renforcement des dispositifs d’accueil et promet d’assurer « en toutes circonstances l’accueil des demandeurs d’asiles par une répartition équilibrée sur le territoire. » La candidate s’engager à lutter contre les passeurs. L’élue parisienne promet de « relancer » le modèle d’intégration en permettant l’accès au travail pour les demandeurs d’asile dès la demande. La candidate s’engage à organiser des cours de français gratuits pour les « nouveaux arrivants » et les immigrés qui souhaiteraient parfaire leur maîtrise de la langue.

Jean-Luc Mélenchon, « une politique migratoire humaniste et réaliste »

Le candidat de l’Union Populaire s’inscrit dans une démarche d’aide et d’assistance en faveur des réfugiés et des migrants. Jean-Luc Mélenchon dans son projet présidentiel dénonce une « Europe forteresse. » Le projet du candidat d’extrême gauche s’axe avant tout sur un renforcement des liens entre l’Europe et les pays du sud (Maghreb, Afrique subsaharienne et Moyen Orient). Le député souhaite une renégociation des accords de Schengen afin de faciliter cette coopération euro-méditerranéenne. Ce cadre de coopération permettrait selon lui, « le progrès social, écologique et de co-développement. » Toujours à l’échelle européenne, le candidat demande une suspension du règlement de Dublin, une refonte de la politique commune en matière de contrôle des frontières de l’UE et une renégociation des accords du Touquet entre le Royaume-Uni et la France. Le projet présidentiel de l’Avenir en commun envisage la création d’un bureau franco-britannique pour gérer les demandes des migrants présents à Calais. Le candidat souhaite la création d’une nouvelle agence européenne en charge du sauvetage en mer, un moyen « pour éviter les milliers de noyés en Méditerranée. »

A l’échelle nationale, il plaide en faveur d’un renforcement des dispositifs d’accueil. « La France doit assurer son devoir d’humanité. » L’inscription dans la loi du principe de responsabilité des pouvoirs publics d’offrir un accueil digne. Le député des Bouches-du-Rhône propose l’allongement des titres de séjour à dix ans comme titre de référence. Il milite en faveur d’une régularisation des travailleurs sans-papiers et un rattachement de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) au ministère des affaires étrangères.

Fabien Roussel, « régularisation des sans-papiers qui travaillent »

Invité début février de la matinale de Public Sénat, le candidat des Jours heureux avait dénoncé « l’hystérisation du débat » autour des questions liées à l’immigration. Le député du Pas-de-Calais proposait à l’époque d’une régularisation « de tous les sans-papiers qui travaillent. » Dans son programme, le candidat communiste plaide pour une interdiction des tests osseux pour les mineurs non isolés et propose une politique « d’humanité » en protégeant les mineurs non accompagnés.

Philippe Poutou, « solidarité avec les migrants »

Proche des revendications de Lutte Ouvrière, le conseiller municipal de la ville de Bordeaux plaide pour un internationalisme et un « accueil digne des migrants sans distinction entre les migrants dits ‘économiques et les réfugiés.’ » Philippe Poutou propose une libre circulation et un libre choix d’installation des migrants et des réfugiés. Ces mesures permettraient selon lui de « permettre aux gens de migrer dans des conditions dignes et sûres. » Enfin, le candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste propose que les migrants et les réfugiés « jouissent de tous les droits politiques et sociaux du pays où ils résident. »

Nathalie Arthaud, libre circulation des femmes et des hommes persécutés

La candidate du parti, Lutte Ouvrière définit son projet présidentiel à « l’opposé de l’orientation réactionnaire, anti-migrants qu’a pris le début de la campagne. » Nathalie Arthaud suggère une liberté de circulation pour les « hommes et les femmes forcés d’émigrer. » Pour permettre cette libre circulation, elle propose la suppression du règlement de Dublin. Adopté en 2003, cet accord européen détermine les compétences en matière d’asile dans l’Union européenne. Selon le système actuel, le demandeur d’asile doit effectuer sa demande dans le pays d’accueil.

 

 

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