Présidentielle : quelles règles pour encadrer les sondages ?

Présidentielle : quelles règles pour encadrer les sondages ?

Les enquêtes d’opinion se multiplient, mais elles sont strictement régulées par la loi, et particulièrement en matière électorale. Retour sur les obligations qui pèsent sur les instituts de sondage et les règles qui encadrent leur diffusion par les médias.
Louis Mollier-Sabet

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Avec un nombre d’enquêtes croissant en période électorale, la régulation de la publication de sondages en période électorale paraît de plus en plus cruciale pour le bon fonctionnement du débat démocratique. D’après la commission des sondages, 157 sondages avaient été réalisés pendant la campagne de 1995, contre 560 en 2017. Pourtant c’est une loi de 1977 qui continue de réglementer la publication de sondages en période électorale, même si elle a été modifiée à de nombreuses reprises en 1990, 2002, 2016 et 2017. Jean-Pierre Sueur (sénateur PS) et Hugues Portelli (ancien sénateur UMP) avaient porté une proposition de loi en 2011, qui n’est jamais allée au bout du processus législatif. Mais quelles règles exactement doivent respecter les instituts et les médias qui utilisent ces enquêtes ?

>> Lire aussi : À deux mois de la présidentielle, quel crédit accorder aux sondages ?

D’abord, de quoi parle-t-on ? La modification de 2016 a permis une définition du sondage comme une « enquête statistique visant à donner une indication quantitative des opinions, souhaits, attitudes ou comportements d’une population par l’interrogation d’un échantillon. » Toute mesure d’intention de vote, de popularité ou simplement d’opinion sur un sujet particulier tombe donc sous la définition légale de sondage et est donc assortie de certaines obligations. Ainsi, même au-delà des périodes électorales, tous les sondages d’intention de vote ou d’opinion sur les candidats sont soumis à ces règles. Les sondages sur des sujets de société, en revanche, n’entrent dans le champ d’application de la loi que si ces sujets « animent le débat électoral. »

Tout sondage doit être au préalable déclaré à la Commission des sondages

Avant même la publication d’un sondage, un certain nombre d’éléments doivent être transmis à la Commission des sondages qui contrôle a priori la méthode employée pour réaliser l’enquête d’opinion. Les instituts de sondage fournissent donc une « notice » à cette commission où figurent :

  • Objet du sondage
  • Méthode de sélection et la composition de l’échantillon
  • Conditions dans lesquelles l’échantillon a été interrogé (questionnaire auto-administré sur internet, entretien avec des enquêteurs …)
  • Proportion des non-répondants
  • Critères de redressement des résultats bruts du sondage
  • Eventuellement, la gratification reçue par les personnes interrogées

Un sondage doit obligatoirement être publié avec un ensemble d’informations complémentaires

Une fois qu’une enquête a été validée par la Commission des sondages, la publication du sondage doit être accompagnée d’indications obligatoires.

  • Nom de l’organisme de sondages
  • Nom de l’acheteur ou du commanditaire du sondage
  • Nombre de personnes interrogées et date de l’interrogation
  • Texte intégral des questions posées
  • Mention que tout sondage est affecté d’une marge d’erreur ainsi que la marge d’erreur elle-même
  • Mention du droit de toute personne à consulter la notice

Interdiction des sondages le jour et la veille d'une élection

Les sondages en rapport avec l’élection présidentielle (intentions de vote ou simplement thèmes de la campagne) ne peuvent pas être publiés ou commentés la veille et le jour de chaque scrutin.

  • Ainsi pour le 1er tour, aucun nouveau sondage ne pourra être publié et aucun sondage précédent ne pourra être publié ou commenté du samedi 9 avril à 00h au dimanche 10 avril à 20h.
  • De même, pour le 2ème tour, aucun nouveau sondage ne pourra être publié et aucun sondage précédent ne pourra être publié ou commenté du samedi 23 avril à 00h au dimanche 24 avril à 20h.

La Commission des sondages

La Commission qui valide les sondages et publie les notices est composée de 9 membres, soit issus des grands corps d’inspection de l’Etat, soit nommés.

  • Deux membres du Conseil d’Etat élus par l’assemblée générale du Conseil d’Etat
  • Deux membres de la Cour de cassation élus par l’assemblée générale de la Cour de cassation
  • Deux membres de la Cour des comptes élus par l’assemblée générale de la Cour des comptes
  • Trois « personnalités qualifiées » désignées par le Président de la République, de l’Assemblée nationale et du Sénat

En cas de non-respect des obligations liées à la fabrication et la publication de sondages, la Commission des sondages peut imposer des « mises au point » aux instituts ou aux médias. Le non-respect des obligations légales peut être puni par une amende allant jusqu’à 75 000 euros. Sans aller jusque-là, la Commission peut publier des communiqués pour attirer l’attention des instituts ou des médias.

Dans la même thématique

Turin – Marifiori Automotive Park 2003, Italy – 10 Apr 2024
6min

Politique

Au Sénat, la rémunération de 36,5 millions d’euros de Carlos Tavares fait grincer des dents. La gauche veut légiférer.

Les actionnaires de Stellantis ont validé mardi 16 avril une rémunération annuelle à hauteur de 36,5 millions d’euros pour le directeur général de l’entreprise Carlos Tavares. Si les sénateurs de tous bords s’émeuvent d’un montant démesuré, la gauche souhaite légiférer pour limiter les écarts de salaires dans l’entreprise.

Le

Operation Wuambushu a Mayotte : Demolition en cours d’un vaste bidonville – Operation Wuambushu in Mayotte: Ongoing demolition of a vast slum
8min

Politique

« Mayotte place nette » : « La première opération était de la communication et la deuxième sera de la communication », dénonce le sénateur Saïd Omar Oili

Le gouvernement a annoncé ce mardi 16 avril le lancement du dispositif « Mayotte place nette », un an après le maigre bilan de l’opération baptisée « Wuambushu ». Saïd Omar Oili, sénateur de Mayotte, regrette le manque de communication du gouvernement avec les élus du département et met en doute l’efficacité de ce « Wuambushu 2 ».

Le

Paris : Question time to the Prime Minister Gabriel Attal
6min

Politique

100 jours à Matignon : « La stratégie Attal n’a pas tenu toutes ses promesses », analyse Benjamin Morel

Le Premier ministre marquera jeudi le passage de ces cent premiers jours au poste de chef du gouvernement. Si Gabriel Attal devait donner un nouveau souffle au deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron, sa stratégie n’est néanmoins pas payante car il « veut en faire trop sans s’investir fortement sur un sujet », selon Benjamin Morel, maître de conférences en droit public.

Le