Remaniement : face à « un atterrissage difficile », l’exécutif dément tout blocage entre Macron et Philippe

Remaniement : face à « un atterrissage difficile », l’exécutif dément tout blocage entre Macron et Philippe

Attendu mardi, le remaniement n’interviendra finalement pas avant vendredi. Un retard étonnant, qui montre la difficulté pour l’exécutif de trouver les bons profils mais aussi peut-être des tensions internes. Edouard Philippe comme l’Elysée démentent tout désaccord.
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« Après avoir répondu pendant une semaine sur le remaniement, maintenant, il faut répondre sur le non-remaniement » s’amuse un député LREM. « C’est de mieux en mieux » ironise un autre membre de la majorité. Face à un remaniement qui ne cesse d’être repoussé, certains parlementaires de la majorité préfèrent encore en rire (jaune). Plus d’une semaine après le départ de Gérard Collomb, la nouvelle équipe gouvernementale se fait attendre. A ce point là, on atteint des records. L’idée d’un désaccord au plus haut sommet de l’Etat, entre Emmanuel Macron et son premier ministre Edouard Philippe, fait son chemin.

Faute de remaniement, c’est l’équipe sortante qui a assisté au Conseil des ministres ce mercredi, avant que le Président ne s’envole pour une visite de deux jours en Arménie. Le remaniement n’interviendra donc pas – au mieux – avant vendredi. Quant à l’idée d’un nouveau discours de politique générale, elle est aux oubliettes, tout comme une démission formelle d’Edouard Philippe, qui serait renommé pour mieux former son gouvernement. « On fait un discours de politique générale quand on change de politique. Ce n’est pas le cas. Donc il n’y a pas besoin de discours de politique générale. Nous maintenons le cap que nous avons fixé » a justifié le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, lors du compte rendu du Conseil des ministres ce mercredi (voir la vidéo).

Griveaux : "On fait un discours de politique générale quand on change de politique. Ce n’est pas le cas"
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« Le Président a dit que tout allait bien entre lui et le premier ministre » (un ministre)

Alors que la situation paraît de plus en plus ubuesque, l’exécutif s’efforce de contrecarrer l’idée d’une tension entre le duo à la tête de l’Etat. Devant les ministres, « le Président a simplement dit que tout allait bien entre lui et le premier ministre, qu’ils prennent le temps nécessaire et qu’il fallait se détacher de ce qu’on lit ou entend » raconte à publicsenat.fr un membre du gouvernement, après le Conseil des ministres.

Même message d’Edouard Philippe devant les députés, lors des questions d’actualité : « Il n’y a pas le début d’un commencement d’une feuille de papier à cigarette entre le Président et le premier ministre » (voir la première vidéo et le sujet de Fabien Recker). « Ils ont engagé un dialogue. Ils ont décidé d'éviter de s'imposer des gens dont l'un ou l'autre ne voudrait pas et de prendre leur temps », minimise aussi l'Élysée auprès de l’AFP. A tous les étages, on cherche à atteindre le feu qui monte.

« L’équilibre est super subtil »

Reste que ça dure. « L’atterrissage est assez tardif, il est difficile » reconnaît un cadre de la majorité présidentielle. Mais il ajoute :

« On ne choisit pas les copains qu’on va inviter à son anniversaire, c’est un gouvernement. S’il y a besoin de temps, il faut du temps ».

Selon Le Canard Enchaîné, le dispositif bloque toujours sur le ministre de l’Intérieur. Emmanuel Macron voudrait Christophe Castaner, quand Edouard Philippe préférerait Gérard Darmanin ou Frédéric Péchenard, tous deux sarkozystes, à l’origine. Si l’option Castaner l’emportait, il faudrait le remplacer aux Relations avec le Parlement, peut-être par Marc Fesneau, président du groupe Modem de l’Assemblée. Lui-même a été cité le week-end dernier à l’Agriculture pour remplacer Christophe Travert. On le voit, les choses peuvent encore bouger, entraînant un jeu de chaises musicales.

Dans les allées du pouvoir, on est dans le flou. « Nous sommes tous réduits à écouter et lire les rumeurs » confiait lundi un membre du gouvernement. Même expectative chez ce possible futur ministre, qui ne peut confirmer le titre de son futur maroquin. « Il y a plusieurs options. On verra l’équilibrage final » glisse à publicsenat.fr cette personnalité dont le nom est cité avec insistance pour faire son entrée. Il ajoute : « Parfois, l’information est vraie à 14 heures, mais pas après ! »

Dans ce jeu de bonneteau, ce parlementaire trouve des excuses à ses (possibles) futurs patrons : « L’équilibre est super subtil : parité, nombre, équilibre politique entre En Marche, Modem, centre droit, centre gauche pour trouver le barycentre de la majorité, part de société civile et désidérata des gens en place. Vous voyez à quel point ça peut être complexe ! »

Bateau gouvernemental en plein tangage

Dans les éléments de langage visant à faire redescendre la température, Benjamin Griveaux explique qu’« auparavant on choisissait des ministres pour des équilibres politiques, des accords d’appareil, de bien mauvaises raisons. Là, on souhaite avoir des personnalités compétentes, reconnues dans leur secteur, mais aussi en ligne avec l’action de transformation que nous portons ».

Le porte-parole du gouvernement pense peut-être à Mathieu Klein. Le président PS du Conseil départemental du Meurthe-et-Moselle, à qui le premier ministre avait confié une mission sur le RSA, a affirmé hier avoir refusé le poste de ministre qui lui a été proposé. Cet ancien porte-parole de Manuel Valls lors de la primaire explique préférer son ancrage local. Mais dans une tribune, cosignée avec Olivier Faure et Martine Aubry, il avait l’été dernier fortement dénoncé l’attitude de la France sur l'Aquarius. Il accusait le gouvernement de se faire « le complice » de ces « drames » et « des inacceptables discours nationaux populistes »… Il avait aussi demandé à Jacqueline Gourault de « garder ses leçons de bonne gestion », répondant aux critiques de la ministre après le refus de son département de signer un pacte financier avec l’Etat. L’exemple illustre la difficulté pour l’exécutif de trouver des postulants qui répondent à tous les critères et prêts à monter dans le bateau gouvernemental, en plein tangage.

Un pôle territoire mieux identifié

Si le casting et si difficile à monter, le scénario ne devrait pas changer officiellement. Emmanuel Macron n’entend pas modifier sa politique. Pas de tournant. « On n’est pas fébrile du cap » se rassure un parlementaire. Le contour de certains ministères sera cependant revu. Alors que la grogne des élus locaux dure depuis des mois, les territoires devraient bénéficier d’un ministère renforcé. Un pôle territoires mieux identifié, alors que ces questions sont dispatchées entre l’Intérieur, la Cohésion des territoires et même les Transports. Après le plan pauvreté, il serait aussi question de mieux porter les questions sociales.

En attendant, on temporise. « Il a fallu 151 jours pour former un gouvernement en Allemagne, et le gouvernement en place avait continué à faire tourner l’Etat » souligne un parlementaire. En 2010, la Belgique a même attendu 541 jours pour avoir un nouveau gouvernement. Il y a encore de la marge.

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