Rémunération de Chantal Jouanno : ce que disent les documents budgétaires

Rémunération de Chantal Jouanno : ce que disent les documents budgétaires

Critiquée sur le montant de sa rémunération, la présidente de la Commission nationale du débat public touche en réalité un salaire proche de celui des autres présidents d'autorités administratives.
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À une semaine de l’ouverture du grand débat national, c’est une polémique à six chiffres qui s’est étendue sur les réseaux sociaux, relayée par certains gilets jaunes et quelques responsables politiques. Un « salaire pas très gilet jaune » tirait ce lundi la Lettre A, en référence à la rémunération de Chantal Jouanno en tant que présidente de la Commission nationale du débat public (CNDP), l’autorité chargée de coordonner cette vaste consultation sur trois mois. Face aux critiques, Chantal Jouanno a même décidé de se retirer du pilotage du grand débat national le 8 décembre.

Contrairement à ce que sous-entendent plusieurs publications, cet argent n’est pas uniquement là pour rétribuer son rôle d’animatrice du grand débat national, mais correspond bien à une indemnité de l’ensemble de ses missions de présidente de la CNDP.

Huit présidents d’autorités administratives touchent une rémunération plus importante

Selon une annexe au projet de loi de finances (appelé dans le jargon un « jaune » budgétaire), son salaire annuel s’élèvera à 176.518 euros cette année. Par mois, cela représente 14.710 euros par mois, soit un revenu proche de celui du président de la République ou du Premier ministre (15.140 euros).

Ce niveau la place dans la moitié supérieure des rémunérations des 26 autorités administratives indépendantes (AAI) qui existent en France. Autant de structures qui demandent d’assurer une réelle indépendance (financière et politique).

Fixée comme  les autres par décret (donc par décision du gouvernement), sa rémunération annuelle de 176.518 euros est un peu supérieure à la médiane de l’ensemble (un peu plus de 156.000 euros). La présidente de la Commission nationale du débat public touche moins que le président de l’Autorité de sûreté nucléaire, qui émarge à 223.419 euros, ou le président de l’autorité de la concurrence (194.688 euros).

Le montant est revanche plus important que d’autres postes, comme le Défenseur des droits (155.919 euros) ou le président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (96.450 euros).

Certains salaires sont même inférieurs à 30.000 euros annuels. C’est par exemple le cas du président du Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (24.000 euros).

Des écarts qui peuvent s’expliquer suivant le caractère complet ou non du temps de travail

Les écarts entre le bas et le haut du panier sont importants. Dans un rapport sorti en décembre 2017, la Cour des comptes expliquait que la rémunération pouvait varier « selon que le président d’une autorité indépendante exerce ses fonctions à temps complet, à temps non complet ou après avoir été admis à la retraite ». Sur la période 2011-2016, la Cour a d’ailleurs remarqué que la masse salariale pour les dirigeants des AAI avait connu une « progression dynamique », et que les montants étaient « comparables à celles des fonctions administratives les plus élevées ».

Les sages de la rue Cambon avaient surtout épinglé, à l’occasion de cette étude, la hausse des effectifs des différentes AAI. Ces autorités, qui employaient 3.096 personnes en 2016, tablaient sur 3.320 emplois pour 2018 (selon le projet de loi de finances), soit une hausse de 7,2 % en deux ans.

Dans un rapport d’information publié en 2015 – une époque où le nombre d’autorités administratives indépendantes était plus important – une commission d’enquête du Sénat avait noté que le niveau de rémunération n’était « pas toujours en adéquation avec la charge de travail ». Elle avait même considéré que « pour des responsabilités importantes », le niveau de rémunération « ne permettait pas de se consacrer à plein temps à ces fonctions ». La commission avait pris l’exemple du président du Comité consultatif national d'éthique et des sciences de la vie et de la santé (CCNE), qui exerçait ses missions à titre bénévole.

François de Rugy prend la défense de Chantal Jouanno

Chantal Jouanno s’était défendue lundi sur France Info. « C'est le salaire fixé par les autorités pour les présidents de la CNDP, quels qu'ils soient », avait-elle déclaré, indiquant que le niveau ne dépendait pas d’elle. L’ancienne sénatrice de Paris a expliqué comprendre les réactions vives concernant sa rémunération. Elle a également invité ses détracteurs à porter une proposition pour réviser à la baisse ce moment, dans le cadre du grand débat national.

Ce mardi, la présidente de la CNDP a reçu le soutien de François de Rugy, le président de l’Assemblée nationale.

Inversement, le maire écologiste du 2e arrondissement de Paris a a jugé que le montant en question était un « mauvais signal pour un débat au cœur duquel figure la lutte contre les inégalités ».

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