Restreindre (encore) le droit du sol à Mayotte, une mesure polémique

Restreindre (encore) le droit du sol à Mayotte, une mesure polémique

En déplacement dans le département de Mayotte, Gérald Darmanin propose de limiter encore davantage l’accès à la nationalité française par le droit du sol. Un enfant né sur l’île devra avoir l’un de ses parents présents légalement et en permanence sur le territoire depuis plus d’un an, contre trois mois actuellement. Un sujet qui divise au Sénat.
Public Sénat

Par Jérôme Rabier

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Il est à l’origine de l’exception mahoraise, et pourtant Thani Mohamed Soilihi, sénateur RDPI (LREM) de l’île, n’est pas opposé à une nouvelle législation, mais préfère tout d'abord que la loi soit intégralement appliquée : « Allons déjà au bout du texte voté en 2018, à ma demande, en faisant une campagne de dissuasion auprès de la population comorienne, pour leur fait comprendre que désormais leurs enfants n’auront pas la nationalité française », demande le sénateur.

 

Une mesure soutenue par Emmanuel Macron

 

En 2018 c’est en effet lui qui avait, contre l’avis du gouvernement, fait voter cette entorse au droit du sol, avant de convaincre Emmanuel Macron en personne de soutenir sa proposition. Emportant ainsi l’adhésion de la majorité à l’Assemblée Nationale. Saisi par des parlementaires de gauche, le Conseil constitutionnel avait validé la mesure. « Car elle était proportionnée et adaptée à la situation particulière de Mayotte », rappelle Thani Mohamed Soilihi. « Mais est-ce que ce sera encore le cas si on allonge le délai à un an ? Je ne sais pas » s’interroge-t-il.

 

Particularisme local

 

Marc-Philippe Daubresse, sénateur LR du Nord est lui « personnellement favorable à cet allongement » du temps de présence légalement sur l’île-département. « Mais je ne suis pas pour une profonde réforme du droit du sol. L’équilibre actuel est un bon équilibre. A Mayotte, la situation le justifie » tranche-t-il. Dans un Sénat qui prône souvent la spécificité des territoires, il plaide pour la prise en compte de ces particularismes locaux.

« A Mayotte, il y a désormais davantage d’étrangers que de Français » rappelle Thani Mohamed Soilihi, une situation unique en France. Sur les 10 000 naissances annuelles sur l’île, la moitié serait originaire de parents étrangers, selon le sénateur mahorais.

« Ce n’est pas un hasard si ce sujet ressurgit en ce moment » se désole pour sa part Guy Benarroche, sénateur écologiste des Bouches-du-Rhône. « Ces sujets à visée électoraliste vont réapparaître, car face à la droite et l’extrême droite, le gouvernement veut se montrer actif », regrette-t-il.

 

Une efficacité contestée

 

Thani Mohamed Soilihi regrette surtout qu’on ne regarde pas l’efficacité de la mesure. « Je ne pense pas que cela ait fait baisser l’immigration illégale, ni le nombre de naissances » concède-t-il. « Car ce doit être seulement un effet indirect de la lutte contre cette immigration. Mais sans campagne de dissuasion aux Comores comme préconisée par le Conseil d’État, l’effet est limité » regrette-t-il.

Le débat sur cette question polémique pourrait intervenir au Parlement juste avant l’élection présidentielle, en début d’année 2022, lors de l’examen d’une loi-cadre sur Mayotte. Au moment même ou certains candidats pourraient défendre une profonde réforme du droit du sol pour l’ensemble du territoire français.

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