Stanislas Guerini : « Les plus modestes doivent avoir un masque gratuitement »

Stanislas Guerini : « Les plus modestes doivent avoir un masque gratuitement »

Stanislas Guerini, le délégué général de La République en Marche, parle d’un moment clé pour le quinquennat. Ce plan de déconfinement est une opération risquée selon lui et il défend la stratégie de prudence et de progressivité présentée par Édouard Philippe. Dans cette stratégie, les élus et collectivités vont jouer un rôle majeur. Le député de Paris répond aux questions d’Oriane Mancini.
Public Sénat

Par Oriane Mancini

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La date du 11 mai :

« Il y a une part de risque. Le Premier ministre ne l’a pas caché, c’est une opération risquée. J’adhère à sa philosophie prudente et à ce déconfinement progressif. Je pense que cela permet de créer de la confiance autour de cette stratégie. Il faut aussi faire confiance aux élus locaux et appuyer nos décisions sur la situation sanitaire. Le Premier ministre a été très clair, si le 7 mai la situation sanitaire n’est pas améliorée alors il sera difficile de commencer le déconfinement. Jour après jour, la carte des départements verts et des départements rouges permettra de donner corps à une approche territorialisée et c’est la bonne manière d’avancer. »

 

L’unité de LREM :

« Notre formation a été très soudée pour donner sa confiance au gouvernement pour mettre en œuvre ce plan de déconfinement. Il y a eu une exception et je le regrette profondément. C’est une faute politique de Martine Wonner d’avoir voté contre le plan de déconfinement. Je remarque que les avis sont très partagés sur ce plan dans les autres groupes politiques. Dans cette période, nous avons besoin d’unité et c’est une bonne chose qu’elle puisse s’expliquer parce que son choix, je ne le comprends pas. L’éventuelle sanction dépendra de ce qu’elle avancera comme raisons à ce vote. Il s’agit de savoir aussi si elle adhère toujours à ce que nous portons. Ce que le Premier ministre a présenté devant l’Assemblée nationale c’est en quelque sorte un discours de politique générale et c’est un moment clé dans le quinquennat. Cette explication avec Martine Wonner est nécessaire mais je le répète, pour moi, c’est une faute politique.»

 

Le traçage numérique :

« Il y a un débat sur cette question et les interrogations sont légitimes. Je suis le premier à être attaché à nos libertés individuelles. Ceci dit, je crois que nous avons mieux compris de quoi on parlait désormais. Ce n’est pas une application qui va nous géolocaliser à tout moment mais une application qui permettra de repérer des points de contact avec des personnes infectées. C’est un outil qui peut être utile à la stratégie de déconfinement mais ce ne sera qu’une seule brique d’un plan global. La stratégie est de pouvoir casser les chaînes pandémiques avec les enquêtes sanitaires et avec un outil numérique s’il respecte bien nos libertés individuelles. Il y a tellement de questions pratiques qui se posent, que je pense qu’il ne faut pas se concentrer sur cette question qui n’est encore que théorique. Le jour où cette application sera prête, alors débattons-en à l’Assemblée. Avec les précisions apportées ces derniers jours, je crois qu’une grande majorité de nos députés LREM sont convaincus. Je comprends qu’il y ait des préventions et je les respecte. Nous sommes face à une crise sans précédent et les Français attendent de l’efficacité et de la responsabilité. »

 

La gratuité des masques :

« Il faut que toutes les populations les plus fragiles aient accès aux masques gratuitement. C’est extrêmement important. Le gouvernement va accompagner les collectivités et 50% sera pris en charge par l’État. Il faut aussi que tous ceux qui vont travailler aient accès à des masques fournis par leurs employeurs, c’est le plus important à ce stade. »

 

Le port du masque obligatoire :

« On ne peut pas appliquer une stratégie nationale unique à l’ensemble du territoire. Le pays n’est pas touché partout de la manière par le virus. Il est normal et sain que les élus prennent des décisions pour adapter ce plan et en faire une réalité localement. C’est territoire par territoire qu’il faut apprécier la situation. À Paris, je pense que dans des contextes de rassemblement important, c’est recommandable mais pas dans une rue moins fréquentée par exemple. » 

 

Le retour à l’école :

« Si l’école doit rouvrir, c’est en priorité pour les familles dont les enfants n’ont pas la chance d’avoir accès à un ordinateur à la maison et qui ont été durablement coupé de l’école et cela peut laisser des traces profondes. Les règles seront d’avoir de petits groupes en classe et cela permettra de donner justement la priorité aux classes que l’on a dédoublées dans les zones d’éducation prioritaire. Je crois que c’est extrêmement important. Ensuite, la situation doit être appréciée ville par ville en fonction de la situation sanitaire. Il faut que les parents suivent les recommandations des directeurs d’établissements en lien avec les mairies. Quand il est question de nos enfants, c’est évidemment l’acte de confiance le plus absolu et rien ne doit être laissé au hasard pour les remettre à l’école. Cette confiance se fait au niveau local. Si les maires décident de laisser des écoles fermées, je ne crois pas qu’ils devront être  sanctionnés. La publication des données sanitaires département par département doit conditionner l’approche que l’on doit avoir. »

 

Le rôle des élus locaux :

« Je crois qu’il serait injuste de dire que nous avons ignoré les élus locaux depuis le début du quinquennat mais oui cette crise met en lumière un certain étatisme français. On attend tout de l’État mais l’État ne peut pas tout. C’est ce à quoi il faudra mettre fin et la méthode pour mener le plan de déconfinement porte les germes de ce que nous ferons par la suite. Ce sera un État qui fixe les règles et les principes d’égalité et les collectivités qui adaptent cette doctrine au niveau local. »

 

Les élections municipales :

« Il faut examiner la situation sanitaire le 23 mai. Le rapport prévu ce jour-là nous dira si les conditions sanitaires sont réunies ou non pour tenir ce deuxième tour. Si c’est le cas, ce serait une bonne nouvelle mais en aucun cas il ne faudra jouer avec la santé des Français. Si les conditions ne sont pas réunies, il ne faudra pas hésiter une seconde et le faire après l’été. Ces élections sont secondaires dans cette période. »

 

Les municipales à Paris :

« Agnès Buzyn a fait le choix courageux de retourner soigner à l’hôpital et je trouve ça plutôt sain de raisonner ainsi. Il me semble que reprendre la blouse dans cette période c’est vraiment une façon d’être utile. Elle n’a pas tourné la page de la politique et restera notre candidate à Paris. Je n’ai aucun doute là-dessus. Elle a mené cette campagne avec brio, a animé un collectif et reste notre candidate. »

 

L’après crise :

« Ce qui est important c’est de mettre un projet sur la table. Il faut fixer une direction et voir celles et ceux qui sont en accord avec cette direction. Je ne crois pas à l’union nationale pour l’union nationale. Le Président a rassemblé en 2017 des gens d’horizons politiques très différents et c’est comme ça qu’il faut continuer à faire mais sur la base d’un projet clair et partagé. »

 

Les réformes en cours :

« Je continue de penser que la réforme des retraites correspond aux besoins du pays. Il est en revanche évident que nous ne pourrons pas reprendre le quinquennat là où nous l’avions laissé. Il faut reproposer un projet qui donne du sens et être ouvert sur la question du calendrier. Sur la réforme de l’assurance chômage, je ne pense pas qu’il faut l’abandonner car elle protégera mieux les chômeurs mais j’ai plaidé pour qu’il y ait une concertation avec les organisations syndicales pour un assouplissement des règles d’éligibilité. Nous allons connaître une situation sociale extrêmement dure avec une augmentation forte du chômage et il faudra veiller à ce que le plus grand nombre de Français puisse être protégé.

 

Le rôle de La République en Marche :

«  D’abord, nous voulons être utiles en agissant concrètement. Il nous faut penser l’après. Cette crise nous invite à revisiter beaucoup de choses avec humilité. Il faut mener un projet plus social et orienté sur la transition écologique. L’idée est de mettre la priorité dans cette seconde partie de quinquennat sur ce qui nous rassemble, ce qui unit les Français. »

 

 

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