Stratégie vaccinale contre le Covid-19 : le plan de la Haute autorité de santé jugé « cohérent » par des sénateurs

Stratégie vaccinale contre le Covid-19 : le plan de la Haute autorité de santé jugé « cohérent » par des sénateurs

L’autorité publique indépendante a dévoilé ce lundi matin ses préconisations quant à un plan en cinq phases pour vacciner la population conte le Covid-19. Priorité est donnée « aux plus vulnérables ».
Public Sénat

Par Pierre Maurer

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Qui protéger en priorité ? « Les plus vulnérables et ceux qui s’en occupent », a résumé lundi la présidente de la Haute autorité de santé (HAS) lors d’un point presse. Dans cette optique, la HAS a préconisé que les personnes âgées vivant dans les Ehpad, soit environ 750 000 personnes, et les salariés de ces établissements présentant « un risque de forme grave » en raison de leur âge ou de leur santé, soit 90 000 à 100 000 personnes, soient visés par la première phase de vaccination. Le calendrier proposé par la HAS se décline ensuite en quatre autres phases : les personnes âgées (d’abord les plus de 75 ans, puis les 65-74 ans) et les personnels sanitaires, puis les plus de 50 ans, ensuite les personnes dont le métier favorise une infection et les personnes vulnérables et en précarité, et, enfin le reste de la population.

« C’est assez cohérent », estime Bernard Jomier, sénateur socialiste de Paris. « On vise d’abord à protéger les personnes les plus susceptibles de faire des formes graves », ajoute-t-il. « Mais il faut aussi réussir à casser les chaînes de transmission », prévient le rapporteur de la commission d’enquête sur la gestion de l’épidémie de Covid, médecin de formation. Il préconise donc que les « trois premières phases suggérées par la HAS soient menées de front ». Ce qui sera, selon lui, « conditionné au nombre de doses de vaccins ». Catherine Deroche, présidente Les Républicains de la commission des affaires sociales se dit quant à elle « favorable à ce que ce ne soit pas une vaccination obligatoire mais bien une vaccination phasée. D’abord sur les personnes les plus vulnérables, les plus susceptibles d’avoir des complications très graves et même létales de la maladie. Et puis bien évidemment, tous les personnels qui sont autour de ces personnes vulnérables. » Il y a deux semaines, elle plaidait déjà pour une stratégie de vaccination « par phases », sur le modèle de l’Allemagne.

Emmanuel Macron a assuré dans son allocution de mardi dernier que la première étape de la vaccination commencerait « vraisemblablement dès fin décembre, début janvier, sous réserve de validation par les autorités sanitaires », en premier lieu l’Agence européenne du médicament (EMA), qui examine trois vaccins candidats et atteignant plus de 90 % d’efficacité (Pfizer/BioNTech, Moderna, AstraZeneca/Université d’Oxford). « C’était relativement clair, mais je reste très critique d’un mode de communication très centralisé et qui témoigne d’un resserrement autour du chef de l’Etat », analyse Bernard Jomier. Il regrette :

« On gère l’épidémie comme on gère la Ve République, c’est contre-productif »

Bernard Jomier met aussi en garde sur un point absent du discours du chef de l’Etat : la mise en place d’une véritable stratégie de tests avant les fêtes de fin d’année. « Il y risque d’y avoir la queue devant les laboratoires. D’autres épidémiologistes le disent. On croise les doigts pour que ça n’arrive pas… »

Logistique et transparence

Si les « phases » de vaccination font consensus, les sénateurs ont encore des doutes sur la capacité de l’Etat à assurer un dialogue transparent. « La HAS évoque en une phrase la communication sur les conditions de vaccination », regrette Bernard Jomier. « Il faut de la transparence en associant les acteurs usuels des systèmes de santé : les infirmiers, les médecins libéraux etc. C’est aussi important que la stratégie de mise en œuvre pour rétablir la confiance », insiste-t-il alors que la défiance des Français augmente au fil des semaines. Selon une étude Elabe, réalisée pour BFMTV, seuls 40 % des Français envisagent de se faire vacciner contre le virus. Les professionnels de santé libéraux espèrent, eux, se voir confier la responsabilité de l’organisation de la vaccination au niveau local. « Je pense que c’est la bonne organisation », abonde Catherine Deroche. « C’est d’ailleurs un peu ce qui avait fait défaut lors de la grande vaccination prévue contre la grippe H1N1 où les libéraux avaient été plutôt écartés. Que les médecins libéraux en soient les garants et les responsables me semble bien », explique la sénatrice du Maine-et-Loire. « Il y aura beaucoup de pédagogie à faire. Pour ma part je me ferai vacciner dès que je rentrerai dans les cases des phasages », assure-t-elle.

Dominique Bussereau : "Nous avons saisi le Premier ministre pour la grande organisation logistique"
00:59

Invité de la matinale de Public Sénat, « Bonjour chez vous », Dominique Bussereau, le président de l’Assemblée des départements de France a rappelé qu’il avait, avec François Baroin et Renaud Muselier, saisi « le Premier ministre et Olivier Véran » , leur réaffirmant que les élus locaux pouvaient « être les fourmis qui organisent la vaccination sur le terrain en liaison avec l’Etat ». « Des réunions ont déjà eu lieu avec l’équipe d’Olivier Véran et avec nos équipes des régions, des départements et des communes […] Nous ferons tout ce qu’on nous demandera et s’il y a des bonnes idées qui viennent des collectivités, nous les proposerons à l’Etat », a-t-il ajouté, estimant que « l’échelon des agences régionales de santé (ARS) est en train de mieux fonctionner que pendant la première vague ». « Les ARS ne sont pas des championnes de la logistique, donc il va falloir travailler avec les préfets. Je connais des entreprises qui stockent à température très basse des produits, il faut se rapprocher d’elles. Il faut mettre tout le monde autour de la table et s’appuyer localement sur les structures qui peuvent apporter un renfort sur cette vaccination en coordonnant les élus locaux, les préfets et les ARS », propose Catherine Deroche. Bernard Jomier sait que « des locaux sont en train d’être réservés ». « Est-on en retard par rapport à d’autres pays d’Europe ? Je ne saurais le dire », se fait-il prudent. Catherine Deroche pose elle aussi la question : « Des pays commencent déjà à mettre en place la stratégie vaccinale, j’espère que nous ne serons pas à la traîne. On y veillera », assure-t-elle. Elle espère également que le gouvernement ne va pas faire « de fausses déclarations comme sur les masques et les tests. Nous voulons de la transparence, la réalité des chiffres, et qu’on ne nous raconte pas des bobards parce que c’est trop grave ». La commission des Affaires sociales du Sénat sera « vigilante » : « Il faut s’assurer que les données sur les vaccins soient les plus sécurisantes possible. Et il ne faut pas non plus que l’on soit dans une pénurie de vaccins. » Pour le moment, la France a préréservé autour de « 90 millions de doses de vaccins contre le Covid-19 ».

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