Suspension de France 24 et RFI au Mali : Christian Cambon condamne une « folie incontrôlable » des autorités maliennes

Suspension de France 24 et RFI au Mali : Christian Cambon condamne une « folie incontrôlable » des autorités maliennes

Le président de la commission des affaires étrangères au Sénat Christian Cambon dénonce la décision récente de la junte militaire malienne de suspendre la diffusion de deux médias français. Dans une interview à Public Sénat, le sénateur LR appelle en outre à « plus d’efficacité dans l’aide au développement » sur le continent africain.
Public Sénat

Par Pierre-Louis Boucé

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C’est une étape de plus dans la longue mésentente diplomatique entre Paris et Bamako. Jeudi 17 mars, la junte militaire malienne a annoncé la suspension de la diffusion des médias français RFI et France 24, suite à la publication d’informations faisant état d’exactions de l’armée malienne sur des civils. Le porte-parole du gouvernement malien a qualifié ces révélations de « fausses allégations contre les vaillantes FAMa » (forces armées maliennes). Emmanuel Macron a dénoncé une décision « grave » et appelé la CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest) et l’Union Africaine à « prendre les décisions qui conviennent ».

Interrogé par Public Sénat, le sénateur LR du Val-de-Marne et président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat Christian Cambon, nous livre son analyse de la situation. Il critique vivement les positions de la junte malienne du colonel Assimi Goïta, et souhaite renforcer l’appareil diplomatique français ainsi que l’aide au développement.

La junte malienne a ordonné la suspension de France 24 et RFI au Mali. Le président Macron a répondu en dénonçant une « course en avant pour le pire ». Quel est votre point de vue sur la situation ?

Le président a eu raison de s’exprimer ainsi. La suspension de ces deux médias constitue une étape supplémentaire dans la folie incontrôlable de la junte militaire. En choisissant de couper l’accès à l’information à sa population, le pouvoir malien s’inspire de la stratégie de Vladimir Poutine. Il faut savoir que cette chaîne de télévision et cette radio sont des médias très suivis au Mali, même plus suivis que certains relais d’information locaux. Je regrette d’observer que la junte fait fonctionner de vieux ressorts et veuille priver sa propre population d’une vraie information.

Au vu d’une telle décision de la junte, estimez-vous qu’un dialogue apaisé est encore possible entre Paris et Bamako ?

J’imagine difficilement un tel cas de figure au vu de la position des autorités de Bamako. Ce qui me préoccupe avant tout, c’est le départ des plus de deux mille cinq cents soldats français qui sont actuellement déployés au Mali. Si les autorités maliennes souhaitent renouer le dialogue avec nous, elles doivent avant tout changer de registre, car la France a produit énormément d’efforts pour préserver la souveraineté du Mali depuis 8 ans. Je rappelle que sans l’intervention militaire décidée par François Hollande [Opération Serval en 2013, ndlr], le Mali serait aujourd’hui un califat islamique.

Le 21 février, la junte au pouvoir a repoussé de cinq ans la nécessité de tenir des élections et le retour des civils au pouvoir. a-t-il l’espoir d’une solution politique au Mali ?

Pour être honnête, je n’imagine pas non plus de progrès sur ce dossier. Peut-être que la situation pourrait évoluer si la population malienne, exaspérée, venait à se soulever contre la junte. D’après certaines informations, les militaires multiplient les arrestations, et pourraient rapidement lasser leurs concitoyens. Il faut garder à l’esprit le fait que de nombreuses promesses formulées par la junte à son arrivée au pouvoir n’ont pas été tenues.

« L’enjeu, c’est de refonder notre relation avec le continent africain » déclarait Jean-Yves Le Drian en conclusion d’un débat au Sénat il y a quelques semaines. De quelles options dispose la France dans cette refondation ?

C’était notre souhait de refonder cette relation sur de nouvelles bases. Personnellement, j’estime qu’il faut renforcer et amplifier notre appareil diplomatique. Nous nous devons d’être plus à l’écoute, à travers nos ambassades dans la région. Nous devons aussi relancer une réflexion plus approfondie sur nos relations et la coopération que nous menons avec ces pays africains. Il faut aussi rappeler que les décisions liées à la sécurité des États d’Afrique doivent être prises par les dirigeants africains. De plus, nous avons dépensé énormément d’argent dans le cadre de l’aide au développement, pour en retour obtenir des résultats en deçà de ce que nous pouvions attendre. Nous nous devons d’aider ces populations plus efficacement. Il ne faut pas oublier que la pauvreté est le terreau de l’insécurité. On imagine difficilement les conséquences qu’une déstabilisation économique ou démographique sur le continent pourrait avoir.

» Lire aussi : Sahel : le Sénat essaye de tirer les leçons de l’opération Barkhane

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