Une partie du pays est en train de se retirer du débat public pour Gérald Andrieu

Une partie du pays est en train de se retirer du débat public pour Gérald Andrieu

Invité de l’émission « On va plus loin », le journaliste Gérald Andrieu, qui a parcouru une partie du pays à pied et interviewé des Français de la « France périphérique », met en garde contre « une forme de partition civique » dans le pays.
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Partir 5 mois en sac à dos et faire 2000 kilomètres pour aller à la rencontre des Français qui vivent aux frontières du pays et dont on parle peu, c’était le pari du journaliste Gérald Andrieu. De cette expérience, il en a tiré un livre, « Le peuple de la frontière » (Éditions du Cerf) et en est revenu lui-même changé dans sa manière de faire son métier.

Après avoir travaillé sur la campagne présidentielle de 2012 de façon « classique », en suivant les partis politiques de gauche, Gérald Andrieu en est sorti « frustré » : « On fait le roman de la campagne. On psychologise le moindre rebondissement. On s’attarde sur la petite phrase, le petit déraillement. Mais en fait on ne s’intéresse jamais à ceux qui doivent décider si oui ou non quelqu’un mérite d’être porté à l’Elysée. C'est-à-dire l’électeur ». D’où son envie, pour cette campagne présidentielle, de travailler autrement et d’aller voir les gens directement. L’accueil n’a pas été toujours facile, les journalistes n’étant pas bien vus en général :

« On a droit à un petit savon pendant à peu près un quart d’heure : « Vous êtes des relais du système, vous mentez… » La collusion avec les responsables politiques, c’est un discours qui est très répandu et que j’ai trouvé très utile à entendre. Sans doute que l’on est trop proche, quand on est journaliste politique, des dirigeants et des différents responsables qui se portent candidats aux élections ».

 

La France périphérique

Puis les gens se sont livrés au journaliste : « La France que je décris c’est la France périphérique. C’est un concept qui est beaucoup utilisé. Tous les responsables politiques ont cette expression à la bouche mais cela n’est jamais concret. On ne voit jamais les visages, on n’entend jamais la parole des gens qui se cacherait derrière ce concept (…) Moi ce que j’ai voulu (…) c’est entendre des histoires et des destins des gens qui ne parlent jamais, Je ne comprends pas comment un  journaliste aujourd’hui peut se contenter de chiffres. On a besoin de ce vécu, de ressentir les choses ».

Durant ces 5 mois, Gérald Andrieu à découvert une France à la marge, repliée :

« Ils vivent une société atomisée (…) Il n’y a plus de lieux où se rencontrer. Il n’y a quasiment plus de cafés, de bistrots (…) Donc si on n’a plus de lieux, on ne discute plus. Si on ne discute plus, il n’y a plus de lien social. Et ça explique pourquoi les gens disent : « Basta ! Moi je ne veux plus participer à ce que vous appelez vous, la politique. Parce que la politique telle que vous la pratiquez ne m’intéresse plus ». Donc ils se mettent en retrait et ça devrait nous inquiéter. Il y a une forme de sécession civique, de partition civique. Une partie du pays est en train de se retirer du débat ».

Les mots sont forts mais le constat est accablant pour le journaliste : « La rupture qui peut paraître un peu tarte à la crème, peuple/ élite, je l’ai vécue, je l’ai constatée, je le confirme ici. C’est quelque chose qui existe. Et c’est peut-être cette rupture qu’il va falloir essayer de résorber. Quand on voit le taux d’abstention au second tour de l’élection présidentielle, il y a quand même 13 millions de personnes qui décident de ne pas aller voter. 3 millions de votes blancs, 1 million de votes nuls. C’est ahurissant que l’on arrive à un score historique tel que celui-ci pour l’abstention. Et ça ne préoccupe personne puisqu’il faut célébrer la victoire d’Emmanuel Macron ».

OVPL : Gérald Andrieu et la "France périphérique" Entretien intégral
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Gérald Andrieu, entretien en intégralité

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