« Voltaire dit «  le peuple corse », Rousseau dit « le peuple corse », et le Conseil constitutionnel le refuse », l’incompréhension de Michel Vergé-Franceschi

« Voltaire dit « le peuple corse », Rousseau dit « le peuple corse », et le Conseil constitutionnel le refuse », l’incompréhension de Michel Vergé-Franceschi

Quelle place pour les Corses dans la République ? Faut-il reconnaître la co-officialité de la langue corse ? Depuis leur élection à la tête de la nouvelle assemblée unique, les dirigeants nationalistes Gilles Simeoni, et Jean-Guy Talamoni multiplient les demandes. Pour l'historien Michel Vergé-Franceschi, la notion de "peuple corse" remonte au 18 eme siècle.
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Par Priscillia Abereko

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Plus de 25 ans après le refus par le conseil constitutionnel de reconnaître la notion de "peuple corse" à part entière, la résurgence des questions d'identité dans le débat qui oppose l'état et les élus de l'île surprend l’historien Michel Vergé-Franceschi. Pour lui cette notion est déjà présente au XVIIIe siècle parmi l'élite intellectuelle du siècle des lumières : « Voltaire dit « le peuple corse », Rousseau dit « le peuple corse » et le Conseil constitutionnel le refuse ».

Invité sur le plateau de l’émission d’histoire L’Info dans le Rétro, présentée par Fabrice D’Almeida vendredi dernier, Michel Vergé-Franceschi regrette que la reconnaissance de la culture corse et de son autonomie soit encore un sujet d'opposition.

Une décision injuste pour l’historien au regard de l’Histoire. Les plus grands de la littérature française au XVIIIe siècle ont reconnu l’existence d’un peuple corse, pourquoi alors ne pas en faire autant ? Au XVIIIe siècle déjà, Voltaire évoquait cette notion de peuple corse comme étant courageux lors de la bataille opposant les troupes du Général Pascal Paoli aux soldats du roi Louis XV en 1769. Rousseau lui aussi, dans son œuvre le Contrat social décrivait les valeurs et la bravoure du peuple corse.

EN MARCHE VERS L’AUTONOMIE 

« Toute la longue marche politique dont on vit actuellement une nouvelle étape, c’est à chaque fois vers plus de pouvoir à l’assemblée régionale pour prendre en compte les spécificités de la Corse »

Déjà dans les années 80, les Corses se mettent en marche pour leur autonomie et obtiennent des résultats : en 1982 la décentralisation amène la création d’une Assemblée de Corse et fait évoluer le statut de l’île.

Une quête pour l'autonomie qui n'est pas nouvelle et qui est justifiée pour le journaliste et fin connaisseur de l'île Jean-Louis Andréani : « Déjà en 1982, les nationalistes et les autonomistes demandent plus. Toute la longue marche politique dont on vit actuellement une nouvelle étape c’est à chaque fois vers plus de pouvoir à l’Assemblée régionale pour prendre en compte les spécificités de la Corse. La Corse cumule les différences […] et il y en a une qui très importante et que ne comprend pas bien la métropole. La Corse est avant tout une île… et la France n’a pas la culture de l’insularité ».

Avant d'ajouter : « En 1990, Pierre Joxe reconnaît dans une première version de son statut, le peuple corse. Mais le Conseil constitutionnel lui dit qu’il n’y a qu’un peuple c’est le peuple français. À ce moment-là, on décide de rajouter le peuple corse composant du peuple français pour que ce soit compatible avec le Conseil constitutionnel ». Référence au projet de loi dit « Projet Joxe » sur un nouveau statut particulier de l’île, où figure la notion de "peuple corse".

« Seulement 30 000 locuteurs de la langue corse sur une population de 330 000 habitants »

Aujourd’hui encore, les autonomistes et les indépendantistes continuent le combat commencé 50 ans plus tôt.

L’une des principales revendications des leaders Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni auprès du gouvernement d’Édouard Philippe est la reconnaissance officielle de la langue corse.

Une volonté que partage l’historien Michel Vergé-Franceschi : « La langue corse était en train de mourir parce que les Corses eux-mêmes ne la parlaient pas aux jeunes générations. Quand j’étais enfant, mes grands-parents parlaient corse entre eux mais ne parlaient jamais en corse aux enfants. Donc c’est vrai qu’aujourd’hui Gilles Simeoni déplore à juste titre qu’il n’y ait plus que 30 000 locuteurs de la langue corse sur une population de 330 000 habitants ».

Des revendications qui semblent dans l'impasse mais qui pourraient aboutir avec la venue du Président de la République Emmanuel Macron, attendu le 6 février en Corse.

 

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