Agression d’un député à Saint-Pierre-et-Miquelon : les pistes du Sénat pour protéger les élus

Agression d’un député à Saint-Pierre-et-Miquelon : les pistes du Sénat pour protéger les élus

Après l’agression d’un député LREM à Saint-Pierre-et-Miquelon en marge d’une manifestation antivax, la présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales revient sur les différents travaux en cours pour protéger les élus locaux. Françoise Gatel mise sur l’approfondissement des relations entre forces de l’ordre et élus locaux, mais elle sait aussi que ces agressions sont liées à des dynamiques de fond et de long terme de la société française.
Louis Mollier-Sabet

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La thématique n’est pas nouvelle. En 2019, la mort du maire de Signes, Jean-Mathieu Michel, à la suite d’une altercation avec ses administrés autour d’une décharge sauvage, avait donné lieu à plusieurs dispositifs dans la loi « Engagement et proximité. » Le Sénat avait aussi mené un travail dans la foulée, sous la houlette de Philippe Bas (LR), qui avait présenté un rapport comprenant 12 recommandations, dont la demande aux parquets « d’orientations fermes » en cas d’agressions d’élus locaux. Françoise Gatel (UC), présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales rappelle à cet égard « l’engagement du ministre de la Justice » dans la construction des relations procureurs-maires et dans le meilleur suivi des affaires impliquant des élus locaux.

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« Quel que soit le degré d’agressivité, il ne faut rien laisser passer » ajoute la sénatrice d’Ille-et-Vilaine, qui salue « le gros travail » mené dans le sillage de la loi « Engagement et proximité. » La délégation aux collectivités territoriales s’inscrit dans la continuité de ce travail et a d’ailleurs publié un rapport sur « l’ancrage territorial de la sécurité intérieure. » Au niveau de l’évaluation de ces initiatives, Françoise Gatel explique encore avoir très récemment demandé à Éric Dupond-Moretti un « bilan » du traitement de ces affaires par la Justice sur l’année 2020. La délégation sénatoriale aux collectivités territoriales auditionnera aussi prochainement Adeline Hazan, ancienne maire de Reims et magistrate, qui devrait prochainement rendre un rapport sur le sujet

« Le pays est devenu particulièrement éruptif »

Mais depuis la mise en route de ces différentes initiatives, la crise sanitaire a installé un climat politique « pas du tout apaisé » selon les mots de Françoise Gatel, qui sent que « nos concitoyens sont nerveux. » Difficile de ne pas être d’accord après l’agression du député LREM Stéphane Claireaux, à Saint-Pierre-et Miquelon ce week-end, en marge d’une manifestation antivax. Gérard Larcher a d’ailleurs condamné ce matin une « agression d’une extrême gravité » et a appelé à « des sanctions exemplaires contre les auteurs de tels actes. »

L’examen des différents textes législatifs sur le passe sanitaire et vaccinal, ou bien au Sénat sur la proposition de loi socialiste sur l’obligation vaccinale avait d’ailleurs fait l’objet de nombreux courriers menaçants. Elles se traduisent aujourd’hui par des agressions physiques, comme à Saint-Pierre-et-Miquelon, mais Françoise Gatel y voit un « moment conjoncturel » dans un pays devenu « particulièrement éruptif. » D’après elle, ces agressions d’élus témoignent d’un problème structurel dans le rapport à l’autorité en France : « On est dans la déraison, mais le moment n’explique pas tout. Il y a une volonté de provoquer, de ne pas supporter que quelqu’un vous contraigne et vous dise de faire quelque chose. Le but est de faire sauter les cadres de l’autorité légitime, d’un maire, d’un policier, d’un pompier ou d’un enseignant. » Or, pour la présidente de la délégation aux collectivités territoriales, « une société doit vivre avec un cadre et le respect de l’autorité, qui n’est pas autoritaire, mais légitime. » Elle poursuit : « C’est comme dans une famille, une entreprise, ou une équipe de foot : il y a certaines règles, des rapports d’autorité, une forme de respect. »

Relations entre élus locaux et forces de l’ordre : « Il faut que ça devienne naturel »

Ainsi, le suivi judiciaire doit se coupler d’une « sensibilisation », en milieu scolaire, notamment, autour de ces enjeux. « Il faut rappeler, comme le dit Édouard Philippe, qui on est et ce en quoi l’on croit, ajoute ainsi la sénatrice centriste. On ne vit pas dans le Far West quand même. » Et précisément parce que la France d’aujourd’hui n’est pas le Far West qu’il faut s’atteler à un travail culturel de long terme : « Cela ne va pas se résoudre en mettant tout le monde en prison. »

Mais à court terme, la délégation aux collectivités territoriales a tout de même planché sur des solutions pour protéger les élus locaux de telles agressions. Françoise Gatel mise ainsi sur « le continuum de sécurité », une formule un peu technique qui désigne ces relations entre les élus locaux et les forces de l’ordre, qu’il conviendrait de rendre plus « naturelles » : « Avec la gendarmerie, cela fonctionne déjà plutôt bien et le directeur général de la police national a la volonté d’introduire cette culture des relations avec les élus locaux dans les modes de travail. Il y a une vraie volonté de travailler dans un écosystème de relations régulières avec les élus locaux. Il faut que tout cela devienne naturel dans les villes, comme c’est déjà plus le cas en zone rurale. »

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