Covid et établissements scolaires : « Ce ne sont pas les épidémiologistes qui gouvernent », tacle Max Brisson

Covid et établissements scolaires : « Ce ne sont pas les épidémiologistes qui gouvernent », tacle Max Brisson

Alors que le taux de contamination grimpe dans les établissements scolaires, le gouvernement persiste à maintenir les écoles ouvertes, ouvrant la porte à la vaccination des professeurs. Une décision qui clive les membres de la Haute assemblée.
Public Sénat

Par Marylou Magal avec F. V.

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Le gouvernement tient bon pour maintenir les écoles ouvertes. Alors que le nombre de contaminations explose parmi les élèves et le personnel des écoles, le gouvernement campe sur sa position, à savoir maintenir les établissements ouverts sur tout le territoire. Avec la multiplication des tests salivaires réalisés dans les écoles, le nombre de cas détectés est en forte hausse, avec 15 484 cas comptabilisés le 19 mars, contre 9 221 la semaine précédente. Parmi le personnel également, 1809 cas ont été détectés le 19 mars, contre 1106 la semaine précédente. Des chiffres qui inquiètent certains épidémiologistes. Dans une interview accordée au Journal du dimanche, le 20 mars, Arnaud Fontanet assurait que le maintien des écoles ouvertes représentait un risque. « Si l’immense majorité des enfants ne fait pas de complications cliniques, ils exposent leurs proches ayant des comorbidités ou leurs grands-parents », détaillait-il. « L’école est le talon d’Achille assumé du dispositif actuel ».

Pourtant, le ministre de l’Education nationale l’assure : le taux de contamination des écoles ne dépasse pas les 0,5 % et le maintien de leur ouverture permet d’éviter une « catastrophe éducative mondiale ». La semaine dernière encore, dans l’entourage de Jean-Michel Blanquer, on semblait minimiser l’impact du virus à l’école. « De temps en temps, il y a un cluster. Mais le milieu scolaire n’est pas un lieu particulier de propagation du virus » assurait-on, ajoutant que « l’objectif fondamental est de maintenir ouvert tout au long de l’année ». Tout juste reconnait-on que « le maillon faible de la journée, c’est la cantine. Ce n’est pas pour rien que les restaurants sont fermés ». Mais pas question de toucher aux écoles, « c’est ce qu’on fermera en dernier ».

De manière générale, la décision du gouvernement concernant les établissements scolaires fait consensus auprès des élus. « Je suis très fier de cette exception française, en France le rapport à l’école est très particulier », commente le sénateur LR et vice-président de la commission de la culture et de l’éducation Max Brisson, au micro de Public Sénat. « Nous avons fermé l’école pendant le premier confinement, on a vu les conséquences, il faut tout faire pour les garder ouvertes, ce ne sont pas les épidémiologistes qui gouvernent ce pays. » « La stratégie actuelle me semble cohérente », abonde la sénatrice Catherine Deroche. « Que l’on puisse maintenir les écoles ouvertes c’est bien, car le décrochage scolaire est délétère. Néanmoins quand une épidémie arrive assez fort sur un secteur, il ne faut pas prendre de risques inconsidérés, il est normal que des classes voire des écoles soient fermées de temps en temps », tempère-t-elle.

« Les enseignants attendent des actes »

Pour certains, toutefois, le prisme par lequel le gouvernement aborde la question du maintien de l’ouverture des écoles n’est pas le bon. « Ce que les enseignants et gens comprennent, c’est que l’objectif prioritaire du gouvernement est avant tout de permettre le bon fonctionnement de l’économie et que pour cela les parents doivent pouvoir aller travailler et poser les enfants à l’école », décrypte le sénateur communiste Pierre Ouzoulias. « Que le confinement ait posé de graves problèmes psychologiques aux enfants, notamment ceux des familles les plus défavorisées, est une réalité absolue et pour des raisons sociales il y a besoin de maintenir le lien entre l’école et les enfants. Le Sénat avait d’ailleurs demandé qu’il y ait des cycles de remédiation en septembre pour identifier les élèves en difficulté et les remettre à niveau, or rien n’a été fait », regrette-t-il.

Pour justifier cette décision de maintenir les établissements scolaires ouverts, l’exécutif assure encore une fois que la campagne de vaccination va s’accélérer. En déplacement à Valenciennes, ce mardi, le président de la République a ouvert la perspective de vaccination au personnel des écoles. « A partir de mi ou fin avril, nous allons avoir plus de vaccins qui vont arriver, et qui nous permettront d’envisager d’avoir des campagnes ciblées sur des professions exposées, a-t-il annoncé. Les enseignants en feront légitimement partie. » Des annonces reçues avec scepticisme parmi les membres de la Haute assemblée. « On parle des enseignants : c’est de la communication pour rassurer les gens ! », cinglait ce mardi René-Paul Savary, sénateur LR de la commission des Affaires sociales. « Il faut aller le plus vite possible. Vacciner matin, midi, et soir, très bien, mais il ne faut pas que ce soient que des mots ! Les enseignants attendent des actes ». « Sur les enseignants c’est positif, pour le reste il faut s’attendre à ce que les effets d’annonces se multiplient pour éviter de parler des réanimations », abondait, Bernard Jomier, président de la mission covid-19 du Sénat.

« Il faut des mesures fortes dans les écoles »

Pour Catherine Deroche, la stratégie du gouvernement de vacciner les professionnels des écoles est une bonne initiative, dans la mesure où elle s’accompagne d’une accélération de la vaccination sur l’ensemble de la population. « Il faut vacciner au plus vite l’ensemble de la population, notamment les publics jeunes et actifs et ceux qui sont les plus exposés du fait de leur profession », assure-t-elle. Pierre Ouzoulias craint, quant à lui qu’une telle stratégie ne crée des clivages au sein de la population, alors que le pays fait face à une pénurie de doses de vaccins. « Je crains que le gouvernement, par des politiques très ciblées, finisse par opposer certaines catégories de Français à d’autres », commente le sénateur.

 

Ce mercredi, à l’occasion des questions d’actualité au gouvernement, Sophie Taillé-Polian a interpellé la secrétaire d’Etat chargée de l’Education prioritaire Nathalie Elimas à ce sujet, réclamant des mesures supplémentaires dans les établissements scolaires pour lutter contre la propagation de l’épidémie. « Il n’y a aucune réponse apportée dans les collèges et les lycées », pointe du doigt la sénatrice. « Nous voulons, comme vous, garder les écoles ouvertes mais pas n’importe comment. Il faut des mesures fortes pour que la situation revienne sous contrôle. » « Nous avons une double responsabilité : assurer la protection des élèves et personnels, et garantir la réussite scolaire », rétorque Nathalie Elimas, qui assure que des mesures à la hauteur de l’enjeu sont mises en place par le gouvernement, à travers le déploiement des tests salivaires, des gestes barrières et de l’élargissement de la stratégie vaccinale.

 

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